Le caprice de nuit

Tous les parents, et quelques héros, le savent : le manque de sommeil est une des tortures les plus folles. J'avais connu les nuits hachées, les réveils affamées au petit matin, la dépression des nuits de maladie. Je pensais donc avoir faire le tour et être limite en mesure d'ouvrir un cabinet de conseils, histoire de faire du fric. J'avais oublié ma fille.

Il faut l'avouer, puisqu'on en parle, ça fait un moment qu'elle est pénible. Elle est même incroyablement reloute, à faire des caprices, se rouler par terre et poursuivre sa dictature du rose. Mais c'est toujours au moment où on pense sérieusement à la perdre dans un supermarché qu'elle lève vers nous ses grands yeux bleus pour devenir pendant cinq minutes la merveille la plus délicate que la Terre ait portée.

Depuis quelques semaines, ma gorgone a trouvé un nouveau supplice. Entre 5 et 6 heures, elle se met à hurler en boucle la même phrase, mue par un désespoir impressionnant. Quand je me précipite vers son lit, j'entends distinctement sa litanie. Au choix : "Je veux des pâtes", "J'ai pas déchiré la feuille", "Je veux une glace à la fraise". Voila. Ma fille est tellement colérique qu'elle fait même des caprices dans son sommeil.

Evidemment, je ne me rendors pas. Evidemment, j'ai envie de la perdre dans une forêt sombre et profonde. Et en même temps, non, elle me fait trop marrer.