Le crash du Concorde en 3D

 

L’audience qui s’est déroulée hier devant le tribunal correctionnel de Pontoise préfigure-t-elle la procédure pénale de demain ?

 

Le dossier « Concorde » a été instruit par plusieurs juges d’instruction successifs. Il arrive devant la juridiction de jugement dix ans après les faits. Selon l’accusation, le crash du supersonique a été provoqué par une succession de maladresses ou d’erreurs. D’abord une lamelle en titane tombée d’un Boeing de la C° Continental Airlines décollé 4 minutes avant. Ensuite un éclatement de pneu et un défaut de structures de l’intrados du réservoir n°5 à l’aile gauche de l’avion. Une version contestée par la défense de la compagnie aérienne américaine. Jusque là rien de surprenant dans un dossier d’une telle complexité.

 

Hier, David. Mercaldi, ingénieur mécanicien se targuant d’avoir « examiné » dans sa carrière une vingtaine d’accidents aériens, est venu tout droit des Etats-Unis avec dossiers et ordinateur. A la barre des témoins, il a d’abord projeté à l’assistance une impressionnante série de photos. Ces clichés sont extraits de la 3D qu’il a réalisé à la demande de la Continental Airlines. En se basant sur le témoignage de 19 personnes présentes ce 25 juillet 2000 à Roissy, il a reconstitué « son » scénario de la catastrophe. 19 personnes situées soit dans des avions en attente de décollage et venant d’atterrir, soit dans le bâtiment des pompiers, soit dans la tour de contrôle. Témoignages en apparence troublante puisque 14 d’entre elles disent avoir vu des flammes avant l’éclatement du pneu et l’endroit supposé où l’avion aurait roulé sur la dite lamelle. Parmi ses personnes figurent le commandant de bord de l’avion présidentiel qui venait de se poser à Roissy. A son bord, Jacques Chirac avait vu le Concorde passé en feu à quelques 20 mètres de son avion qui le ramenait de Tokyo.

 

Tous ses témoignages ont été écarté par l’accusation au prétexte qu’ils ne correspondent aux constations matérielles relevées sur place, principalement les traces de fumée sur la piste d’où le supersonique a décollé.

 

Pendant une heure et demie, M. Mercaldi a donc expliqué avec une foule de détails sa méthodologie pour réaliser ce document. Une sorte de « bonus » avant le film qui dure un peu plus de 8 minutes qui est donc l’enchaînement de tous les angles de vues – selon la position des témoins – lors du décollage du « Concorde ». Un document à prendre avec prudence puisqu’il ne s’agit que d’une reconstitution en 3D et non d’un film authentique d’amateur ou autre.

 

Rappelons encore une fois qu’il ne se base que sur des témoignages et l’on sait combien en matière judiciaire plus que tout autre, il est bon de mettre en avant leur fragilité. Ainsi les pompiers, professionnels du feu par excellence, disent avoir vu les flammes surgir sous l’aile droite du Concorde. Or le feu a pris à gauche….

 

Ce qui est à noter en revanche, car peut être jamais vu dans une enceinte judiciaire, c’est le travail réalisé à la demande d’une partie au procès, ici la défense de l’avionneur américain. Face à une accusation qui s’exprime sur le papier, les avocats d’une partie viennent avec un document visuel très élaboré. Et très couteux. La totalité de cette contre enquête a couté à la compagnie poursuivie par la justice française la somme de 800 000 dollars. Une parfaite illustration de ce que certains professionnels de la justice craignent à l’avenir. L’inégalité qui découle d’une justice à l’américaine…..

Publié par Dominique Verdeilhan / Catégories : Ma chronique