Depuis 25 ans, l’affaire Grégory fait la une des journaux. On ne sait pas si on doit s’en féliciter tant cet état de fait est la preuve tangible d’un échec de la justice. Depuis 25 ans, les médias, toutes tendances confondues, se font l’écho des soubresauts de la procédure. Hier encore, la photo du petit Grégory est apparue sur les petits écrans. Il a suffit d’une dépêche tombée à 16h45 pour que les rédactions repartent à la chasse aux infos.
Un mélange de trois ADN a été retrouvé sur le rabat de l’enveloppe d’une lettre. Pas n’importe laquelle puisqu’il s’agit de la lettre de revendication de l’assassinat postée à Lépanges le 16 octobre 1984. Cette découverte ne date pas d’hier. Elle figure dans le rapport du laboratoire Biomnis qui avait été remis aux magistrats de la chambre d’instruction de Dijon en octobre dernier.
Pourquoi cette révélation tardive ? Parce que l’un des avocats des époux Villemin, M° Moser, en fait la confidence à un journaliste de « Vosges Matin ». L’info sera reprise ensuite par l’AFP. On connait la suite. Joint par téléphone, sa consœur, M° Chastang-Morand se déclare surprise par ce pseudo rebondissement. Joint également par téléphone, Jean-Marie Beney, procureur général de la cour d’appel de Dijon, confirme que cet élément figurait dans le rapport Biomnis. Le magistrat me confiera que si il n’en a pas fait état lors de sa conférence de presse du 22 octobre c’est parce que les experts avaient parlé d’un échantillon d’ADN « complexe, à la limite de la détection ». Autrement dit, sans grand espoir quant au suite à obtenir.
En clair, 25 ans après, ces éléments sont dans un tel état qu’ils peuvent difficilement être considérés comme probants. Comme nous l’avions déjà dit à l’époque, ils peuvent permettre d’écarter des hypothèses, d’exclure des suspects mais en aucun cas permettre l’identification d’un présumé coupable. Ainsi, toutes les traces d’ADN relevées ont permis, pour les experts et donc pour la justice, d’écarter les parents du petit Grégory. Christine Villemin, un moment suspectée, inculpée et mise en détention pendant 11 jours, avait bénéficié d’un non lieu en 1993.
Des mélanges Adn du même ordre a été relevé sur les cordelettes qui liaient les mains du jeune garçon. Selon la justice, des ADN « identifiables » ont été retrouvé sur une lettre du corbeau de juillet 1985. Autrement dit, 9 mois après la mort du jeune garçon mais aussi 4 mois après l’assassinat par Jean Marie Villemin de Bernard Laroche, le principal suspect.
Depuis une quinzaine de jours, des gendarmes sont chargés de faire des prélèvements d’ADN afin de les comparer à ceux retrouvés sur les scellés. Dans un premier temps, cette phase d’enquête concerne tous ceux qui ont été amené durant l’instruction à être en contact avec les pièces à conviction. On l’aura compris, il s’agit d’abord de procéder par élimination. S’il s’agit de l’ADN d’un gendarme, d’un expert, d’un magistrat, l’information judiciaire rouverte s’arrêtera là.
25 ans après, il nous faut donc rester lucide. La justice fait tout, et on ne peut pas lui reprocher, pour rattraper ses erreurs passées. Les médias continuent de suivre un feuilleton judiciaire qui n’en finit pas. 25 ans plus tard, une famille attend de connaitre la vérité sur le mort de son enfant. 25 ans plus tard, une autre famille se sait condamner au soupçon perpétuel.