Quelques minutes seulement pour balayer une attente et un espoir de 17 ans. Cet après-midi, le tribunal correctionnel de Paris a rendu un jugement à la vitesse de l'éclair. A 13 h 30 tapantes. Pas question de faire patienter encore des victimes et des prévenus face à une procédure qui dure depuis bientôt 2 décennies. 5 minutes pour annoncer un délibéré de 7 mois et demi. Alors que certaines personnes n'étaient pas encore entrées dans la salle des criées, que de nombreuses parties civiles étaient maintenues à l'extérieur faute de place, le président Olivier Perusset, qui avait tellement hâte d'en finir, a lu les motifs du jugement d'une telle manière que la plupart des personnes présentes n'a pas saisi la portée de la décision: relaxe générale.
Le magistrat ayant pris le parti de ne pas lire le dispositif qui les a amené à cette décision, avocats, victimes, journalistes sont sortis de la salle sans connaître les raisons de cette relaxe. Sans pouvoir l'expliquer, la commenter sur le fond. Le tribunal avait remis aux avocats un cd-rom contenant la totalité du jugement qui fait 183 pages. Impossible pour eux de le lire sur place, chaque conseil devait donc attendre d'être revenu à son cabinet pour comprendre le comment du pourquoi.
Tout tient pourtant en une seule phrase située à la page 99. Elle concerne la connaissance du risque par les prévenus. Le tribunal rappelle qu'il a entendu comme témoin de nombreux scientifiques. Pas des moindres. Le Professeur Stanley Prusiner, prix Nobel américain pour sa découverte du prion mais aussi le Professeur Montagnier, devenu depuis lui aussi prix Nobel de Médecine pour la découverte du virus du Sida. Pour les magistrats, "la synthèse de ces témoignages ne permet pas d'affirmer que les pédiatres, biologistes et pharmaciens qui participaient au cycle d'élaboration et de distribution de l'hormone de croissance avaient conscience à partir de 1980 d'exposer les malades traités par ce médicament au risque de contamination par la maladie de Creutzfeldt-Jacob".
Les victimes sont sorties de la salle abattues, sonnées. Les avocats de la défense ont d'une seule voie déclaré que le tribunal avait appliqué la loi. Maître Benoit Chabert qui défendait l'un des prévenus, salue "un jugement courageux".
Juridiquement, les parties civiles ne peuvent aujourd'hui rien faire. Elles n'ont pas pouvoir de faire appel. C'est pourquoi après avoir écrit la semaine dernière au procureur de la République, elles se tournent désormais vers Rachida Dati afin qu'elle donne des instructions au Parquet Général de la cour d'appel de Paris pour faire appel et obtenir un second procès.