Un avocat sans robe

Au cinéma, c'est ce qu'on appele occuper le second rôle. Hier, lors de l'ouverture devant la cour d'assises de Paris du procès de l'attaque quasi militaire de la prison de Fresnes en 2003, les regards se sont d'abord tournés vers Antonio Ferrara avant de se diriger vers Maître Karim Achoui. Il y a 5 ans et demi, l'homme était l'avocat du champion de la belle. Aujourd'hui, il est considéré comme son complice, coupable selon l'accusation d'avoir donné le feu vert de l'opération si spectaculaire.

Avant que les débats débutent, M° Karim Achoui cherchait un peu sa contenance dans le prétoire, cherchant au maximun à créer un fossé entre lui et ses 20 autres co-accusés. Il n'était plus avocat. Il était accusé. Il n'était pas dans le rôle de celui qui défend mais dans celui qui doit plaider sa propre cause. Conscient que l'enjeu de ce procès est énorme pour lui. Mis en examen pour complicité de tentative d'assassinat, il encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Pour la première fois peut être dans les annales de la justice, un avocat vit ce qui est d'habitude le vécu de son client. Souvent, on entend les avocats dans leurs plaidoieries dire "nous sommes innocents",  " Nous savons que nous risquons gros et que ce soir nous pouvons finir en prison". Bref, souvent, l'avocat s'identifie à son client. Emploie le JE. Ici l'avocat est le client.

Lors d'une suspension d'audience, Maître Francis Szpiner, l'un des ses défenseurs nous confiait que M° Achoui vivait très mal ce moment de se retrouver sur le banc des accusés. "Pour moi, ajoutait-il, la place de Maître Achoui est à notre coté sur le banc des avocats". Mais M° Karim Achoui a laissé sa robe au vestiaire. Il a déjà pris les réflexes des accusés. Au suspension d'audience, il refuse de se livrer, de se confier aux micros qui se tendent. Il renvoit les journalistes vers ses 2 avocats. Le client est taisant. Il réserve ses explications à la cour.

Dans deux mois, les 12 jurés diront si ils ont été convaincus par l'innocence de M° Karim Achoui. Dans deux mois, nous saurons si l'accusé Karim Achoui a été son meilleur avocat.

Publié par Dominique Verdeilhan / Catégories : Ma chronique