Alors que pour certains, la réforme de la Constitution votée hier par le Congrès équivaut à une hyper présidence, Nicolas Sarkozy a perdu une des prérogatives dues à son rang. Désormais, le Chef de l'Etat n'est plus de droit le Président du CSM. Du même coup, Rachida Dati, en qualité de Garde des Sceaux, n'est plus vice Présidente de cette formation. Le ministre de la Justice peut néanmoins participer aux séances. Ce sont le Premier Président et le Procureur Général de la Cour de Cassation qui tiennent les premiers postes du Conseil.
Ce bouleversement dans le fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature ne calme pas pour autant la grogne des magistrats. La réforme constitutionnelle a également changé la composition de cette autorité judiciaire. Dans un communiqué du 15 mai dernier, l'actuel CSM avait compris que le combat pour que les magistrats restent majoritaires était perdu d'avance. Il notait en revanche qu'il "importe que le CSM représente de manière équilibrée la société française et qu'il soit composé sur la base de la parité entre magistrats et personnalités de l'extérieur". Le conseil n'a pas été entendu. Dans les deux compositions du CSM, chargées du parquet et du siège, les magistrats sont désormais minoritaires. Avant le rapport de force était de 6 magistrats contre 4 personnalités appartenant à la vie civile. Désormais, il est de 7 magistrats contre 8. 6 de ses 8 membres sont choisis, à part égale, par le Président de la République et les Présidents de l'Assemblée et du Sénat. La parité subsiste en revanche lorsque les deux formations se réunissent en conseil de discipline.
Dernière nouveauté: un justiciable pourra désormais saisir directement le CSM. On peut imaginer aisément que cette formation risque d'être surchargée de demandes tant le nombre de personnes déçues par la justice est en augmentation constante. Une loi organique doit prochainement définir les modalités de cette saisine.
Cette réforme du CSM ne change en rien le sort du procureur Gérald Lesigne. Vendredi dernier, la formation du parquet a rendu son avis sur le procureur de la République qui a eu à gérer le dossier "Outreau" aux cotés du juge Fabrice Burgaud. Alors que le représentant de la Chancellerie avait requis le déplacement d'office du magistrat, toujours en poste à Boulogne sur Mer, le CSM a considéré qu'il n'y avait pas matière à sanction. Un avis qui a choqué aussi bien une des victimes de ce dossier, Karine Duchochois, que l'ancien Président de la Commision d'enquête parlementaire André Vallini.
Cette procédure disciplinaire a été lancé par le précédent Ministre de la Justice, Pascal Clément. La décision finale appartient désormais à Rachida Dati. Elle devrait intervenir avant la fin de la semaine. Depuis 1958, par trois fois seulement les Gardes des Sceaux n'ont pas suivi l'avis du CSM. Par deux fois, ils ont aggravé la sanction. Une seule fois, ils l'ont revu à la baisse.
Une décision éminament politique. En juin 2006, l'inspection générale des services judiciaires de la Chancellerie avait remis son rapport. Elle notait une responsabilité collective mais ne relevait aucune faute commise. Une exonération qui avait provoqué l'indignation de Nicolas Sarkozy, qui était alors Président de l'UMP.