Après Marx, Jaurès et Blum... c'est au tour de Jean-Moulin

Depuis de longues années, le Front national s'approprie nombre de valeurs, de figures, d'images et de lieux de la gauche française. En février 2016, le compte Twitter FN SciencesPo s'emparait de l'image d'une des grandes figures du socialisme français pour se dresser contre la loi sur la réforme du travail, présentée par la ministre du travail Myriam El Khomri. Il écrivait ceci : « Congés payés, réduction du temps de travail, dialogue social. Léon Blum voterait FN ». 

Aujourd’hui, il « emprunte » un autre grand nom et visage à l'histoire française. Celui d’un résistant français, entre autres créateur du CNR (Conseil national de la Résistance)... et torturé par Klaus Barbie.

Le communiqué du FN SciencesPo vient de tomber. Il annonce leur nom de section : Jean Moulin.

Rendre hommage à ce « grand patriote »

« Jean Moulin, c’est le préfet d’Eure-et-Loir qui fut révoqué par Vichy car il était viscéralement républicain ». Le communiqué continue ainsi : « C’est aussi celui qui se rendit à Londres en prenant tous les risques afin de rencontrer le chef de la France libre, le Général de Gaulle, qui lui donna alors pour mission d’unifier les mouvements de la Résistance française. Cette mission, il l’accomplit avec brio en réunissant autour d’une même table des Français aux sensibilités politiques différentes mais qui n’avaient au coeur qu’un seul objectif : rendre à la France sa dignité, sa souveraineté et son honneur.

Jean Moulin, c’est également le premier président du Conseil National de la Résistance, conseil qui posa pour la Libération les bases d’un État protecteur pour les libertés individuelles, stratège pour l’économie nationale, social pour les salariés, les retraités et les plus démunis.

C’est enfin l’homme qui ne fléchit pas sous la barbarie nazie et qui paya de sa vie la loyauté envers son pays.

En prenant ce nom de baptême, le FN Sciences Po espère ainsi honorer la mémoire de ce serviteur exceptionnel de la France et méditer son exemple. Nous affirmons enfin solennellement notre attachement aux valeurs portées par Jean Moulin et appelons à l’union de tous les Français autour de Marine le Pen, pour un sursaut patriote dans notre pays ».

Le logo du FNSciencesPo va dans le même sens. Il s’agit, sans aucun doute, de la récupération d’une des photos de Jean Moulin largement identifiable par les Français : celle, prise fin 1939 à Montpellier par son ami Marcel Bernard :

Jean-Moulin

Robert Ménard ne l’oublie pas non plus

Le numéro 27 du Journal de Béziers, daté du 15 janvier 2016, le mettait également en avant (en utilisant et détournant le même support) ; ce pour annoncer la réhabilitation de l’immeuble où Jean Moulin est né le 20 juin 1899.

Moulin3

 

« Jean Moulin retrouve (enfin) son chez lui », avançait alors l'édito de la municipalité d'extrême droite qui se poursuivait avec ces quelques mots choisis : Jean Moulin est « l’exemple même du sacrifice patriote, (…) avant tout Français. (...) d’autant que jamais sans doute depuis la guerre, la Résistance a été une valeur aussi importante pour notre peuple ».

Rues, écoles, collèges, lycées, promotions, université et fondation portent son nom.... Et le FN n'entend pas que faire sien de Jean Moulin. Le parti d'extrême droite prétend aujourd'hui incarner ses idées et valeurs. Les termes du communiqué le montrent bien. L'organisation politique étudiante FN revendique l'héritage historique et politique de Jean Moulin. Le parti de Marine Le Pen n'accomplirait-il pas, en quelque sorte, ce qu'il considère comme son devoir de mémoire ?

Dans un tweet daté du 12 janvier 2016, Robert Ménard écrivait : « Jean Moulin n'appartient pas à la gauche. Et encore moins à la gauche actuelle, si loin des idéaux de la Résistance ». Florian Philippot a immédiatement réagit ce 21 mars. Pour le numéro deux du FN, le FNSciencesPo a « fait un choix magnifique. Le patriotisme une idée toujours moderne ».