Déchéance de nationalité : à quelles conditions pour le FN ?

Proposition d'affiche pour la campagne FN sur le code de la nationalité

Le FN se réjouit de l’annonce du PS à propos de l'extension de la déchéance de nationalité aux binationaux, nés en France, condamnés pour acte de terrorisme. Nombres d’idéologues du parti d’extrême droite se sont prononcés pour une réforme du code de la nationalité, « un des principaux facteurs incitatifs de la submersion migratoire » - s'appuyant, entre autres, sur la suppression de la double nationalité et sur un « élargissement du principe » de la déchéance de nationalité. Pendant les années 1990, un des « succès » de l'atelier de propagande du FN est la création d'une « carte nationale d’identité », éditée à 8 millions d’exemplaires lors de la réforme du code de la nationalité.

 

carte d'identité rectocarte d'identité verso

 

 

 

 

Les revendications du FN reviennent sur le principe phare de leur parti : la « préférence nationale » qui entend priver de leurs droits politiques, économiques et sociaux ceux considérés comme des étrangers. Pour Jean-Yves Le Gallou (qui rejoint le FN en 1985), être français, cela « s’hérite ou cela se mérite, c’est-à-dire qu’on devient français par la filiation quand on est de parent français ou par la naturalisation quand on apporte la preuve de son assimilation à la culture et à la civilisation française (...) voilà la logique du concept de préférence nationale ». Une définition que cet ancien du GRECE (Groupement de recherche et d'études pour la civilisation européenne) et premier secrétaire du Club de l’Horloge impose au sein du FN. Bruno Mégret, lui, secrétaire général du FN pendant 10 ans (1988-1998), est l'auteur notamment des Cinquante propositions présentées par le FN, à leur parution en 1991, comme une « politique de l’immigration efficace et humaine ». La huitième - intitulée « Rétablir le Jus sanguinis » - prône le droit du sang selon lequel est français à la naissance toute personne née de parents français. Elle ne fait pas que reprendre l'idée force de la thématique frontiste « Être français, cela s’hérite ou cela se mérite ». Elle remet en cause le code de la nationalité, fondé sur le droit du sol, qui « privilégie la résidence sur la filiation, il est donc matérialiste et anti-naturel ». 

En ce qui concerne la déchéance de nationalité, un historique d'une vingtaine d'années se concentrant sur les principales propositions du FN montre, certes, une évolution mais également une imprécision évidente quant aux « critères » de la mise en application de cette mesure.

Retour sur les propositions du FN sur la déchéance de nationalité :

1991 (Bruno Mégret, Immigration. 50 mesures concrètes) : « Durant une période probatoire, tout étranger naturalisé devra satisfaire aux règles de bonne conduite nécessaire à la sérénité de la communauté nationale. Si au cours de cette période probatoire, il était condamné pour un quelconque délit (souligné par l'auteur), il pourrait être engagé contre lui une procédure de déchéance de la nationalité française telle qu’elle existe déjà dans son principe, dans l’actuel code de la nationalité ».

1992 (Jean-Yves Le Gallou, Philippe Olivier, Immigration. Le Front national fait le point, éditions nationales) : « La révision du code de la nationalité doit aussi porter sur la suppression des cas de double nationalité. (…) Les réformes que nous avons proposées rendront impossible la création de nouveaux cas de double nationalité. Quant à ceux qui existent, il faudra prévoir leur réduction progressive en demander aux intéressés d’opter pour l’une ou l’autre des nationalités dont ils disposent et en ouvrant pour le gouvernement la possibilité de déchoir de la nationalité française les binationaux qui ne réunissent pas les conditions de loyauté, de dignité et d’assimilation qu’on est en droit d’exiger d’eux ».

2006 (FDA, dossier « code de la nationalité ») : « Être français cela se respecte (…) par un comportement conforme à la loi. (…) Les possibilités de déchéance sont étendues à tous les cas de condamnation pour atteinte aux  intérêts de la nation (ensemble du Livre IV du Code pénal, comprenant les atteintes à l’ordre et à la sécurité publique) ainsi qu’aux condamnations pour crimes et délits supérieurs à 6 mois de prison ferme ».

2011 (Marine Le Pen, C/politique) : « Très clairement, je pense qu’au moment de l’acquisition de la nationalité, il faut une sorte de nationalité à point pendant une durée de dix années, c’est-à-dire que pendant dix ans, on peut perdre la nationalité française si on a commis soient des délits graves en récidive, soit un crime parce que dans ces conditions-là, on a violé de la manière (…) la plus grave la loi de l’hospitalité justement qu’a accordée le peuple français (…). D’autres critères (…) : le fait de ne pas vouloir se soumettre aux principes de vie (…), aux grandes valeurs françaises comme la laïcité, comme l’égalité hommes-femmes, comme la liberté individuelle ».

2012 (Tract FN « Double nationalité : il faut en finir ») : « La déchéance de (...) nationalité française pour les binationaux condamnés pour des faits délictuels ou criminels ».

2015 (Florian Philippot, 28 décembre, itélé) : « Une fois que le principe a été réhabilité par François Hollande, nous allons passer à l’étape numéro 2, c’est-à-dire faire pression pour que cette déchéance soit appliquée concrètement beaucoup plus largement. (...)  Je pense que tout binational qui commet un crime très grave, ou qui est impliqué avant un attentat (…) dans une entreprise jihadiste n’est pas digne d’être français ».

À suivre.