FN... comme Frontières Nationales

« Comment Abdelhamid Abaaoud, a-t-il pu se retrouver en France ? » Comment a-t-il pu « aussi facilement passer les frontières européennes puis françaises pour s’installer en Île-de-France ? »  La présence sur le sol français de l’organisateur présumé des attentats de Paris (tué dans l’assaut policier du 18 novembre) pose, selon Marine Le Pen, une question centrale : celle de l'absence de frontières nationales.... ceci sous-tendu par une autre interrogation : le gouvernement français doit, pour la « sécurité des Français », informer de l'itinéraire d’Abdelhamid Abaaoud. En d'autres termes, l'homme s’est-il, « comme un autre terroriste du 13 novembre, inséré dans (celui) des migrants en Grèce ? »

Le FN mariniste aborde le thème de l’immigration sous l’angle du rétablissement des frontières nationales, vues comme l'unique moyen afin d'« empêcher la submersion migratoire en cours ». Depuis quelques jours, la présidente du FN ne cesse de le répéter : la « première urgence, c'est de remettre en place des frontières ! », la frontière « n'est pas un antidote absolu contre le terrorisme c'est le premier moyen pour limiter drastiquement ce danger » ou, encore, il « est illusoire de penser que nous pourrons opérer un contrôle aux frontières européennes. L'Union Européenne est une passoire ! »

« Stop ! À la submersion migratoire ! »

C’est un tract mis en circulation par le FN en septembre 2015, lors de la crise des réfugiés. Il est relayé par une pétition sur le site du FN « Contre la submersion migratoire en France » qui reprend les idées-forces de ce tract, appliquées à la ville de Calais.

À partir du socle idéologique frontiste intemporel – l’identité nationale –, le FN de Marine Le Pen porte plus que jamais sa thématique phare : le combat contre l’immigration, lié à l’insécurité et à la « question centrale de l’absence de frontières nationales » : priorité accordée aux Français, réforme du code de la nationalité avec suppression du droit du sol, suppression du regroupement familial, suspension des demandes d'asile en cours d'examen, reconduite des clandestins aux frontières... répression accentuée et budget renforcé dans le domaine de la sécurité.

Le visuel et la sémantique frontistes utilisés dans le tract exposent la ligne FN, fondée sur le rejet de l’islam, assimilée en tant que culture et religion à un danger ; la stigmatisation des musulmans faisant de l’islam et de la République deux entités incompatibles. Une politique d' « invasion-immigration » qui ne peut que déboucher sur une « tragédie nationale ». Une question (listée en rouge) résume bien l'instrumentalisation frontiste des contextes hexagonal et international : « combien de djihadistes infiltrés parmi la masse des migrants ? » 

verso du tract FN "Stop ! À la submersion migratoire"

verso du tract FN "Stop ! À la submersion migratoire"

 

« Immigration zéro, insécurité zéro, préférence nationale totale »

Dès son premier programme (Défendre les Français, 1973), le Front national met en évidence un de ses piliers idéologiques. La « lutte contre l’immigration migratoire (…) le mot d’ordre numéro un » - présentée dans les années soixante-dix comme l’« invasion de la France par les indésirables » - traverse les années avec moult aménagements.

Aujourd'hui, le constat frontiste est sans appel : le rétablissement des frontières doit être considéré comme le « premier jalon vers le retour de la sécurité des Français ». Les « migrants », substitut réthorique des demandeurs d'asile et des « clandestins (...) affluent en nombre et sans aucun contrôle dans nos communes, nos banlieues, nos services sociaux, obligeant parfois nos pauvres et nos SDF à leur laisser leur place ». Ces hommes et femmes sont désignés comme les coupables de la situation politique, économique et sociale en France... avec, en ligne de mire, le développement de l’islamisme radical. Des profiteurs ? Des spoliateurs ? Des terroristes ? Pour le FN, toute nouvelle régularisation représente une immigration supplémentaire. Une seule solution : l'arrêt total de toute régularisation, la « déchéance » de nationalité, le rétablissement des frontières nationales et la sortie de l'espace Schengen.

Ce 20 novembre, Marion Maréchal-Le Pen tenait meeting à Montfavet, dans le Vaucluse, dans le cadre des élections régionales. Logiquement, la sémantique utilisée par la députée FN se calque sur celle de sa tante : « À la tête de la région nous serons en première ligne pour arrêter la submersion migratoire actuelle, en attendant le grand changement national de 2017. (...) Notre combat régional est lié à notre combat national. Car sans frontières et sans souveraineté, cette liberté disparaît » .