Donald Trump coincé face au Congrès

Le président américain fait face depuis le week-end dernier à un dilemme : signer le texte promulguant les sanctions contre la Russie ou imposer son veto. Ce texte de loi l'embarrasse d'autant plus que son intention à son entrée à la Maison-Blanche était de lever une partie des sanctions, adoptées par l'administration d'Obama, sur la Russie. 

Pieds et mains liés. Mardi, la Chambre des représentants votera une loi sanctionnant la Russie, principalement pour sa présumée intervention dans la campagne présidentielle américaine, mais aussi pour l'annexion de la Crimée. Le 15 juin, le Sénat avait adopté dans une quasi-unanimité ce projet de loi, mais le texte était resté bloqué au Congrès où les négociations ont finalement abouti samedi dernier.

Du côté de la Maison-Blanche, ses membres font parvenir des déclarations contradictoires depuis ce week-end. "La Maison-Blanche indique qu'elle soutient la proposition de loi sur les sanctions contre la Russie", titrait lundi The Wall Street Journal. Pourtant, dimanche après-midi, sur Twitter, Donald Trump dénonçait, "l'hypocrite chasse aux sorcières russes", devenue selon lui un prétexte pour les Démocrates de justifier l'élection qu'ils ont perdue. Le locataire de la Maison-Blanche regrettait aussi que les élus républicains en fassent "très peu pour protéger leur président".

En réalité, le Wall Street Journal se faisait l'écho des déclarations de la nouvelle porte-parole de la Maison-Blanche, Sarah Huckabee Sanders. Dimanche, cette dernière avait indiqué sur la chaîne ABC : "Nous soutenons la législation actuelle, et nous continuerons à  travailler avec la Chambre et le Sénat pour imposer ces sanctions sévères contre la Russie, jusqu'à ce que la situation en Ukraine soit pleinement résolue".

Un veto sans conséquences 

De son côté, le nouveau directeur de communication de la Maison-Blanche, Anthony Scaramucci, invité sur la chaîne de télévision CNN, a fait preuve de prudence. Il n'a pas dit si Trump envisageait ou pas de signer la promulgation de cette loi. "Le président n'a pas encore pris la décision de signer la loi ou non", a-t-il notamment déclaré.

Ce texte de loi faisait l'objet de résistance à la Maison-Blanche car, comme le rappelle le New York Times, il empêcherait Donald Trump de lever les sanctions existantes contre Moscou imposées par Obama. Si le président américain imposait son veto, il pourrait être finalement soupçonné de sympathie à l'égard de son homologue russe. Indirectement, cette loi place Trump sous surveillance par le Congrès.

Mais même en cas de veto du président républicain, la Chambre des représentants pourrait le surmonter avec une majorité des deux tiers. Le sénateur démocrate Ben Cardin, invité sur Fox, est certain que la loi sera votée à une très large majorité. "S'il met son veto, nous surmonterons son veto", a-t-il assuré.

Une fois la loi adoptée au Congrès, le Sénat revotera, probablement avant les vacances de la mi-août. Une initiative qui laisse inquiète l'Europe, redoutant les "conséquences non désirées" de ces sanctions américaines, selon les mots d'un porte-parole de la Commission européenne.

Aliénor Vinçotte

Qui est Neil Gorsuch, le nouveau juge de la Cour suprême?

Plus d'un an après la mort d’Antonin Scalia, juge conservateur de la Cour suprême américaine, le Sénat américain vient de confirmer la nomination de Neil Gorsuch pour occuper le siège vacant.

Un juge conservateur

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Neil Gorsuch s'exprime après sa nomination, mardi 31 janvier. (CNBC)

À 49 ans, ce juge fédéral à la cour d’appel du Colorado (dixième circuit), avait tous les atouts pour séduire l’establishment républicain.

Nommé en 2006 par le Président George W. Bush, il avait été confirmé sans opposition par le Sénat. Réputé conservateur, le juge s’est notamment fait connaître par son soutien à la décision Burwell v. Hobby Lobby en 2013.

Dans cette décision en appel, la cour avait jugé que les chefs d’entreprise pouvaient utiliser des motifs religieux afin de refuser de fournir des moyens de contraception à leurs employées, comme les y obligeait l’Obamacare. La Cour Suprême avait par la suite validé ce jugement.

Rétablir la majorité conservatrice

Neil Gorsuch restaure la majorité conservatrice de la Cour, avec cinq juges conservateurs contre quatre plus libéraux. Campant des positions similaires à celles de Scalia quant à l’interprétation de la Constitution, Gorsuch serait néanmoins plus ouvert au dialogue avec ses collègues.

Avoir choisi un juge jeune n’est pas anodin pour Donald J. Trump. Gorsuch pourra siéger à la Cour pendant plusieurs décennies. Fidèle aux valeurs républicaines mais moins clivant que le juge défunt, le nominé de Donald Trump semble être un choix sage, qui a été applaudi dans les rangs républicains dès sa nomination.

Une confirmation compliquée 

Les sénateurs démocrates, agacés par le comportement de leurs collègues républicains l’année dernière, ont essayé de faire échouer sa confirmation. 

En mars dernier, les républicains avaient en effet refusé d’examiner la nomination de Merrick Garland par Barack Obama. Une décision controversée qui avait poussé le New York Times à parler, en janvier, de nomination « illégitime » de la part du Président Trump.

En minorité au Sénat – la chambre se composant de 48 sièges démocrates contre 52 sièges républicains –, les démocrates ont utilisé leur unique arme: le filibuster (ou obstruction), consistant à rallonger le débat parlementaire. Il fallait alors 60 sénateurs aux républicains pour passer outre, un nombre presque impossible à atteindre.

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Neil Gorsuch, aux côtés de Mitch McConnell, leader de la majorité républicaine au Sénat qui a enclenché "l'option nucléaire" jeudi 6 avril. (AP Photo/ J. Schott Applewhite) 

 

Recours à "l'option nucléaire"

Ces derniers ont donc décidé jeudi 6 avril de mettre leurs menaces à exécution en ayant recours à "l'option nucléaire", qui consiste à modifier le règlement intérieur du Sénat. Comment? En abaissant le seuil nécessaire pour passer outre l'obstruction de 60 à 50 sénateursIls ont ainsi pu confirmer la nomination de Neil Gorsuch et se passer de l'accord des démocrates ce vendredi 7 avril.

Les démocrates devraient payer cette obstruction au prix fort puisque cette modification aura probablement des conséquences à long terme. Outre faciliter les futures nominations du président dans les années qui viennent, c'est un changement du fonctionnement du Sénat auquel nous devrions assister. Jusqu'ici considéré comme favorisant le travail entre les deux camps, le Sénat pourrait, à l'image de la Chambre des représentants, devenir plus partisan, cela favorisant ainsi "des nominations plus idéologiques," selon Nina Totenberg.

Supreme Court Associate Justices Anthony Kennedy testifies on Capitol Hill in Washington, Monday, March 23, 2015, before a House Committee on Appropriations subcommittee on Financial Services hearing to review the Supreme Court's fiscal 2016 budget request. (AP Photo/Manuel Balce Ceneta)

Le Juge Anthony Kennedy au Capitole le 23 mars 2015. (AP Photo/ Manuel Balce Ceneta)

Neil Gorsuch pourrait ne pas être le seul juge nominé par Donald Trump pendant sa présidence. Anthony Kennedy, juge conservateur de la Cour, avec qui Gorsuch a par ailleurs travaillé, pourrait saisir l’opportunité pour prendre sa retraite, comme le souligne le Washington Post. Il donnerait la possibilité à l’Administration Trump de s’assurer d’un deuxième siège conservateur pour plusieurs années et ainsi de sécuriser la majorité conservatrice de la Cour.

Victoria David