Six mois après l'investiture présidentielle américaine, le New York Times a publié, mercredi, une interview de Donald Trump qui s'est entretenu pendant cinquante minutes avec trois journalistes du célèbre média américain, Peter Baker, Michael S. Schmidt et Maggie Haberman.
C'est bien connu, entre Donald Trump et les médias c'est une histoire de désamour. Alors que le prestigieux journal new-yorkais avait été qualifié de "fake news" par le président américain, ce dernier a quand même accepté de recevoir les journalistes du New York Times dans le Bureau Ovale. Une occasion pour lui d'avoir son heure de vérité, sous la forme d'un long entretien enregistré, puis retranscrit à l'écrit.
Voici quelques extraits qui illustrent une conversation totalement décousue, sans queue ni tête, de la part du locataire de la Maison-Blanche. C'est un Donald Trump dans toute son incohérence qui se révèle ici.
Son "amitié" avec Emmanuel Macron
Donald Trump est revenu sur son voyage en France à l'occasion du 14 juillet. “Il m’a appelé et m’a dit, ‘j’adorerais que vous veniez pour vous rendre hommage en France’, en rapport à la fête du 14 juillet. En plus, c’est le 100e anniversaire de la Première Guerre mondiale. C’est énorme. Et j’ai dit oui", raconte-il. Sauf qu'Emmanuel Macron l'avait invité à assister au traditionnel défilé des Champs-Elysées surtout pour commémorer le 100ème anniversaire de l'entrée en guerre des Etats-Unis pendant la Première Guerre mondiale en 1917.
Un peu plus loin, il raconte aux journalistes : "Quand Macron m'a demandé de venir, j'ai dit : 'Tu penses que c'est une bonne chose que je vienne à Paris? Je viens de rompre l'Accord de Paris la semaine dernière. Est-ce une bonne idée ?' Il m'a répondu, 'Ils vous adorent en France.' Du coup j'ai dit, 'OK, je ne veux pas te blesser".
Extrait de l'interview du New York Times
C'est un fait, le président américain ne cache pas son enthousiasme à l'égard du nouveau président français, évoquant la fameuse poignée de main. Pour lui, il ne fait aucun doute qu'Emmanuel Macron "adore" lui tenir la main... et il n'hésite pas à le répéter trois fois de suite.
Extrait de l'interview du New York Times (2)
“C’est un mec génial. Intelligent. Fort. Il adore me tenir la main. Les gens l’ignorent mais il adore me tenir la main. Ça, c’est bien. […] Vraiment. C’est un mec super. Et c’est un mec coriace, mais bon, il est obligé. Je pense qu’il sera un président formidable pour la France. Mais il adore me tenir la main”, s'enthousiasme-t-il.
A propos du dîner présidentiel à la Tour Eiffel, pour Trump, ce fut la "plus grande célébration dans l'histoire de la Tour Eiffel". "Je veux dire, il y avait des milliers et des milliers de personnes, parce qu'elles ont appris qu'on allaient dîner là", Et si on lui expliquait le concept du tourisme ?
La petite leçon d'histoire
Lors de sa visite du tombeau de Napoléon aux Invalides, Macron a donné un petit cours d'histoire à Trump, notamment sur l'héritage laissé par l'empereur à la France. "C'est incroyable ce qu'il a fait. Il a dessiné Paris." C'est en tout cas ce qu'a retenu le président américain de la leçon d'histoire de son homologue français.
Sauf que c'est Napoléon III qui a redessiné Paris au XIXème siècle, et non pas le premier. Confusion ? Mais la petite leçon d'histoire ne s'arrête pas là. Le milliardaire américain récite face aux journalistes ce qu'il a appris, expliquant que Napoléon a trop sous-estimé le climat russe et laissé sa Grande Armée "mourir de froid". Et continue son récit en racontant que "la même chose" est arrivée à Hitler : "La météo a chuté à -35 degrés, et ce fut la fin de cette armée."
Extrait de l'interview du New York Times (3)
L'entrevue secrète avec Vladimir Poutine
De quoi ont bien pu parler les deux présidents américain et russe lors de leur rencontre à Hambourg à l'issue du G20 le 7 juillet ? Le mystère reste entier. Sur Twitter, Trump avait écrit que “les fake news sont de plus en plus malhonnêtes. Même un dîner organisé pour les leaders du G20 en Allemagne devient suspect " afin d'enlever toute idée de soupçons. Mais voilà qu'au New York Times, il affirme qu'il s'agissait juste d'un "échange de politesses" qui n'a duré que 15 minutes.
Extrait de l'interview du New York Times (4)
"Elle était assise à côté de Poutine et quelqu’un d’autre, et c'est comme ça. On était en train de manger et au moment du dessert, je suis juste allé dire bonjour à Melania, et pendant que j’étais là, j’ai dit bonjour à Poutine. Un échange de politesses plus que tout autre chose. Ça n’a pas été une longue conversation, vous savez, peut-être 15 minutes. On a juste parlé – de choses. À vrai dire c’était très intéressant, on a parlé d’adoption", raconte-il au New York Times.
Puis, plus loin dans la conversation, il bafouille quelques réponses "inaudibles", mais nie toute implication financière avec la Russie : "On dit que j'ai gagné de l'argent grâce à la Russie. C'est faux. Ce n'est pas mon truc, je ne fais pas ce genre de choses."
Extrait de l'interview du New York Times (5)
Le renvoi de James Comey, ex-directeur du FBI
Le locataire de la Maison-Blanche s'est aussi confié sur James Comey, ancien directeur du FBI qu'il a limogé en mai dernier. Ce dernier était en charge de l'enquête sur une possible ingérence russe dans l'élection présidentielle américaine. Un acte qui a fait la une de tous les journaux, certains faisant le parallèle avec le scandale du Watergate qui a abouti à la démission du président Richard Nixon, dans les années 1970. Le 11 mai dernier, il confiait sur NBC News : "J'allais le virer de toute façon. C'est un fanfaron qui est là pour amuser la galerie." Cette fois-ci, au New York Times, il explique qu'il a agi pour le pays : "Je pense que j'ai fait là quelque chose de bien pour le peuple américain."
Extrait de l'interview du New York Times (6)
Un grand-père gâteux
C'est sans conteste le moment le plus surréaliste de toute l'entrevue. L'interruption de l'interview par la petite-fille du président, Arabella, 6 ans. Trump ne cache pas sa fierté envers sa petite-fille, cherchant à impressionner les journalistes en lui faisant parler chinois : "Elle est géniale. Elle parle couramment chinois. Elle est vraiment top. […] Elle a même parlé avec le Président Xi. Chérie ? Peux-tu dire quelques mots en chinois ? Je ne sais pas moi un truc comme 'Je t'aime, Grand-père'. Elle est incroyable, hein?" Et de glisser à la fin aux journalistes, "c'est dans les gènes".
Extrait de l'interview du New York Times (7)
Aliénor Vinçotte