Aux Etats-Unis, la dépression ne cesse d'augmenter chez les 15-24 ans. ©Pixabay

Jacob Towery : « Les adolescents percoivent certaines épreuves comme la fin du monde »

Avec The Anti-depressant book, le psychiatre américain Jacob Towery s'adresse directement aux adolescents en souffrance. Son livre – à feuilleter tout en écoutant la version audio – regorge de conseils et d'exercices pour sortir de la dépression. Une problématique plus que jamais d'actualité aux Etats-Unis. Et pour cause, le suicide ne cesse d'augmenter chez les 15-24 ans.

Pourquoi le taux de suicide est-il si élevé chez les adolescents ?

Jacob Towery exerce à Palo Alto (Californie).

J.T : D'abord, les adolescents ont tendance à être plus impulsifs que les adultes. S'ils ont une idée en tête, ils peuvent agir rapidement, même si celle-ci est mortelle. J'aimerais que les Etats-Unis ne rendent pas l'accès si facile aux armes car les jeunes peuvent les utiliser en cas de crise. Les 15-24 ans ont moins d'expérience pour gérer leurs émotions et rebondir. Alors que les adultes ont du recul, les adolescents percoivent parfois certaines épreuves comme la « fin du monde ». En outre, trop peu d'entre eux ont accès aux thérapies notamment parce qu'il n'y a pas d'assurance maladie ici.

Que faire lorsqu'un adolescent sombre dans la dépression ?

J.T : Chacun peut décider s'il veut rester ou non en dépression. Mais, il est important de réagir rapidement. Pour certains, la lecture de mon livre peut suffir. Il permet de découvrir tout ce qui empêche de surmonter une dépression. J'explique ensuite comment changer sa façon de penser pour guérir et rester en bonne santé. Les adolescents, mais aussi les adultes, y apprennent des techniques pour s'en sortir rapidement. Pour les autres, ils auront sans doute besoin d'être évalués par un psychologue qualifié avant de s'engager dans une thérapie.

Quelles sont ces techniques qui permettent de guérir ?

J.T: Bien dormir, faire de l'exercice physique ou encore méditer quotidiennement. S'ils décident de faire un effort, les adolescents apprennent des habitudes saines. Ils acquièrent la capacité à gérer, de manière optimale, des situations difficiles.

Dans votre livre, vous évoquez aussi l'utilisation effrenée des smartphones. Quelles en sont les conséquences ?

J.T : A cause de cette utilisation constante, les adolescents ont une durée d'attention plus courte, dorment moins longtemps et ne supportent pas d'être moins stimulés. Ceux qui souffrent de dépression sont aussi plus vulnérables. Les plus petits événements peuvent déclencher des réactions émotionnelles intenses. [NDLR : dans son livre, le psychiatre explique combien il peut être douloureux pour un adolescent d'attendre la réponse à un SMS.]

Quels sont vos conseils pour bien utiliser les smartphones  ?

J.T : Utilisez-les moins souvent ! La nuit, il est important d'éteindre son téléphone, et tous les appareils électroniques en général. Vous pourrez alors dormir huit heures d'affilée. Il est aussi utile de faire une détox digitale. Personnellement, j'adore faire du camping pendant plusieurs jours, sans nouvelles technologies !

C.L

En bref

Comme dans une conversation, Jacob Towery s'adresse directement à son lecteur. Avec un vocabulaire simple, et quelques touches d'humour, le psychiatre pousse l'adolescent à transformer sa vie. Au fil des pages, il propose des tests, des conseils et des exercices pratiques. Ce guide se veut ainsi ludique, motivant et encourageant. Jacob Towery s'appuie sur les thérapies cognitivo-comportementales (TTC), fondées sur l'apprentissage de nouveaux comportements. Selon l'auteur, tout adolescent peut surmonter rapidement et efficacement sa dépression s'il apprend et met en place de nouvelles habitudes de vie. Le médecin s'adresse aussi aux parents, afin de les aider à gérer la dépression de leur enfant.

The Anti-depressant book (non traduit en français), Paperback, $9,95

[Revue de presse] Et si un hallucinogène devenait un nouveau remède contre la dépression?

Le New York Times et le Washington Post du jeudi 1er Décembre 2016 parlent de deux études scientifiques  qui pourraient révolutionner les traitements pour les patients atteints de cancers, souffrant également de dépression et de crises d'angoisse.

"Une étude sur les hallucinogènes joue un nouveau rôle pour les drogues illégales," titre le New York Times.

Le Washington Post à l'inverse fait les gros titres sur un remède pour les crises d'angoisse, sans mentionner qu'il s'agit d'un remède concernant uniquement pour les patients atteints de cancers: "des psychédéliques ont été découvert pour réduire les crises d'angoisses," explique le quotidien.

Ce médicament en question est le psilocybin, un ingredient trouvé dans les champignons hallucinogènes, il a un effet immédiat sur la dépression et l'angoisse chez les patients atteints de cancers. "Le psilocybin était illégal aux Etats-Unis pendant plus de quarante ans," explique le New York Times, parce qu'il fait parti des drogues dites 'dures'.

Cette situation fait encore polémique aux Etats-Unis, certains chercheurs sont pour l'utilisation de cette drogue thérapeutique, "Il est temps de prendre les traitements psychédéliques en psychiatrie et oncology sérieusement," explique David Nutt, un psychiatre à Imperial College à Londres, lors d'une interview au Washington Post.

Bertha Madras, psychologue à l'école de médecine de Harvard explique au journal qu'il y a déjà une épidémie d'overdose dû à l'opioïde, un analgésique morphinique. Laurie McGinley, du Washington Post va encore plus loin, et a interviewé un autre chercheur qui se positionne contre l'utilisation du psilocybin.

Joshua Gordon, directeur de l'Institut National  pour la Santé Mentale  explique que ce genre de substances peuvent avoir des effets dramatiques sur le corps, "certaines personnes vont essayer de prendre ces médicaments sans l'avis d'un médecin pour voir si ça marche, et c'est vraiment quelque chose qu'il faut qu'on évite".

Le New York Times se positionne en faveur du psilocybin comme traitement médical. Le journaliste auteur de l'article a majoritairement reçu des témoignages de chercheurs voulant mettre ces méthodes en avant.

Le journal explique que 80% des patients atteints de cancers ont montré des signes d'encouragement, ils se sentaient moins déprimés et les crises d'angoisse avaient nettement diminuées.

Jan Hoffman, journaliste pour le New York Times présente le cas d'Octavian Mihai, 25 qui est en rémission du lymphome de Hodgkin, un cancer qui touche le système immunitaire. Lorsqu'il a commencé à être en rémission, il est devenu paranoique, pensant que son cancer allait revenir, il est tombé dans un dépression sévère et a essayé de régler ses problèmes avec l'alcool. Lorsqu'il a commencé le psilocybin, l'effet a été immédiat. Mihai dit que ce médicament lui a changé la vie "j'ai eu une épiphanie!" dit-il au journaliste. 

Des chercheurs aux Etats-Unis mais également en Europe font des recherches pour que le psilocybin ait également des effects positifs sur l'alcoolisme et l'addiction au tabac. Dr. Stephen Ross, le chef du service addiction et psychiatrie à New York University explique au New York Times, que les personnes atteintes de cancer, suivi par de sévères depressions et qui nécessitent de l'aide immédiatement, trouvent en le psilocybin le médicament idéal. "Encore plus pour ceux qui sont à haut risque de commettre un suicide".

 

Clémentine Boyer Duroselle