Douleur, incompréhension et colère pour les familles chinoises des disparus du MH370

1 an est passé. Et ce terrible constat: l'enquête ne donne rien de convaincant pour les familles des disparus. Le pire n'est il pas de ne pas savoir, de ne presque rien savoir? Toutes les questions restent en suspend et les non réponses deviennent suspectes. Comme si on voulait leur cacher quelque chose...

Pas de nouvelles, bonnes nouvelles?

Attendre, attendre, toujours attendre. Sinon, que faire? Cela fait un an, toujours aucune nouvelle de leur enfant, petit-enfant, mère, père, épouse, époux, soeur, frère. Rien, toujours rien. Un peu d'espoir de temps en temps, beaucoup de déceptions la plupart du temps, le sentiment d'impuissance constamment, et puis la colère maintenant. Ces familles des passagers de MH370 sont convaincues que leurs proches demeurent en vie quelque part. Où? Aucune idée. Elles sont même certaines que les autorités leur cachent la vérité. Mais pourquoi donc la leur cacherait-on? Ce n'est pas que les familles se voilent la face, et refusent délibérément d'envisager le pire; elles pourraient accepter la mort de leur proche, la mort n'est pas un tabou. Cette mère et grand-mère y a bien pensé elle-même , « j'ai été morte, puis une ambulance est arrivée, on m'a remise en vie ».  Sa fille unique, son gendre, ses deux petits-enfants étaient à bord de l'avion. «Je ne peux pas faire le deuil. Où sont les preuves d'un accident? Où sont les débris? On nous donne tout le temps des explications contradictoires ». « Aujourd'hui, je ne reste en vie que pour trouver la vérité, rien d'autre que la vérité. On me doit la vérité, on doit la vérité à mes enfants ». Puis en rentrant à la maison, face à la grand-mère, qui n'est toujours pas au courant, il faut faire semblant, « sinon cela va la tuer, sur le coup».

Le 6 mars, les familles sont très nombreuses à se rendre à la cellule de soutien pour MH370, installée dans le parc des logistiques, qui est en dehors de l'aéroport de la capitale; après une nuit en train, il leur faut trois heures depuis la gare pour rejoindre le parc, enchainant plusieurs métros et 20 minutes de marche. Tout ce trajet pour apprendre qu'aucune cérémonie n'aura lieu le surlendemain. « C'est la réponse officielle », dicte le représentant du gouvernement, « il n'y aura pas de cérémonie organisée »; un autre officiel s'adresse gentiment à un paysan de l'Anhui qui a parcouru mille kilomètres pour rejoindre Pékin: « Vous auriez dû appeler avant de faire le voyage »; « Mais personne ne répondait, et puis, cela fait déjà un an, je ne peux pas rester à la maison à attendre ». Il n'est visiblement pas conseillé de venir à la capitale. Cela risque parfois d'être pris comme un acte « illégal ». En plusieurs occasions déjà, des familles ont été placées sous la surveillance de la police, pendant une dizaine d'heures, des femmes, des enfants.

Une vingtaine de parents est arrivée le 11 février en Malaisie, pour demander à nouveau des nouvelles auprès de la compagnie aérienne et des autorités du pays. Résultat: rien. Pendant ce temps, la plate-forme à Pékin -mise en place mai dernier et ouverte les lundi, mercredi et vendredi-, continue à accueillir les familles venues d'une vingtaine de provinces. 153 des 239 personnes à bord sont chinois, nombreux d'entre eux, des enfants uniques. À la veille de ce premier anniversaire de la disparition de l'avion, les proches des passagers, souvent des personnes âgées, se massent ici, toujours plus nombreux. Ils ne se font plus d'illusions pour obtenir une réponse. « Mais où aller, autrement, nous n'avons que ça, nous n'avons que nous-mêmes » soupire une mère. Ceux qui viennent régulièrement commencent à se familiariser avec quelques visages parmi les officiels, qui viennent à tour de rôle, des équipes différentes, les services des affaires étrangères, le gouvernement central, le bureau de l'aviation, l'équipe de sauvetage, des cabinets d'avocats. La plupart du temps, c'est un diplomate qui prend la parole, très éloquent, réconfortant avec certains, condescendant avec d'autres, rarement concret. « Je vous demande tout simplement, que savez-vous, combien en savez-vous? » lance un père. La même question depuis un an. Avant d'y répondre, le diplomate prend soin de souligner une règle, « je vois quelques visages nouveaux, je répète, aucun journaliste n'est autorisé ici ». Une jeune fille avec un dictaphone est invitée à sortir de la salle. Puis, on oublie de répondre à la question.

Et les familles attendent, attendent toujours et encore.

Enzo Tsai

A voir et écouter également, l'interview d'un père français d'une famille de disparus, par notre bureau de France 2 à Londres:

https://blog.francetvinfo.fr/bureau-londres/2015/03/06/video-mystere-du-mh370-linterview-choc-dun-pere-dune-famille-disparue.html