Pourquoi vous avez eu tort de passer à côté de "Bloodline"

Noyé sous les critiques et les annonces des 47 séries prometteuses cette année, vous êtes largué. Que bingewatcher désormais ? Pas de panique, Pop Up’ se charge de faire le tri pour vous. Et cette semaine, on vous conseille Bloodline, disponible (légalement) sur la plateforme française de streaming, Netflix. Chez Pop Up’, on parie que ce thriller familial va vous séduire, surtout si vous avez aimé…

La série "Damages"

Bloodline, c’est la nouvelle création des frères Glenn et Todd A. Kessler et de Daniel Zelman, déjà derrière Damages, le drama judiciaire porté par l’immense Glenn Close dans lequel elle incarnait durant cinq saison “Patty” Hewes, une glaçante avocate new-yorkaise aux méthodes peu orthodoxes (<= euphémisme).

 

Bloodline (“la lignée”) est l’histoire d’une famille, les Rayburn, dont le frère aîné, Danny (l’insondable Ben Mendelsohn), se tient à l’écart depuis des années. Il revient dans la propriété familiale (un resort luxueux dans les Keys, ce chapelet d’îles au sud de la Floride) pour assister à la célébration de la réussite de ses parents. Danny est un paria dans sa propre famille, éternel loser qui attire les emmerdes comme les Everglades attirent les moustiques. Mais l’aîné des Rayburn entend bien reprendre en main le cours de son destin. A commencer par sa place dans la fratrie.

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Comme ils l'ont fait dans Damages, les créateurs de Bloodline jouent avec la ligne du temps. Le récit est parsemé de flash-back (procédé classique) qui nous plongent dans l’enfance des enfants Rayburn et surtout de flash-forward qui nous dévoilent leur futur et sont là pour avertir le spectateur. On sait dès le pilote que les choses vont très mal finir : le drame va se muer en thriller. Les douze épisodes qui suivent démêlent (trop?) lentement le fil de l’intrigue et expliquent comment les choses ont pu en arriver là.

La série "Friday Night Lights"

Bloodline, c’est aussi l’occasion de retrouver Kyle Chandler, le génial coach Eric Taylor de la série Friday Night Lights. Loin des stades de foot texans et de son équipe des Dillon Panthers, il incarne John Rayburn, le cadet de la fratrie dont le regard tombant façon Droopy nous attendrit toujours autant. Toujours droit dans ses bermudas (il est désormais flic), John tente d’arranger les choses. Du moins en apparence. Mais dans Bloodline, elles sont toujours trompeuses. Voix narrative de la série, John Rayburn n’est pas forcément le bon fils. Mais il en a le rôle. Bloodline est une série co-écrite par deux frères et ce n’est pas sans conséquences. Quid de notre propre famille et de nos liens avec celle-ci ? Nous interroger sur notre place dans notre propre fratrie et la façon dont les autres nous y perçoivent est une des réussites de Bloodline.

Le roman "Crime et Châtiment"

Sans surprise, le créateur Todd A. Kessler convoque l’écrivain russe Dostoïevski et son chef d’œuvre Crime et Châtiment dans ses interviews. Un roman dans lequel le héros Rodion Romanovitch Raskolnikov commet l’irréparable en pensant faire le bien (pardon pour ce pitch succinct, Fédor). Car si Bloodline est une série qui interroge nos liens familiaux, elle questionne également nos décisions et nos gestes. John Rayburn a quelque chose de Raskolnikov, lui aussi en quête de rédemption dès le premier épisode lorsqu’il s’adresse au spectateur : “Please, don’t judge us. We’re not bad people but we did a bad thing” (“S’il vous plaît ne nous jugez pas. Nous ne sommes pas mauvais mais nous avons fait une chose terrible”). Tuer est-il moralement acceptable si l’on pense faire le bien ? Vous avez quatre heures.

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D’un rythme assez lent, Bloodline est un peu longue à démarrer mais vaut vraiment le coup de s’accrocher. Et s’il n’est pas nécessaire d’avoir lu Dostoïevski pour apprécier Bloodline, il n’est pas impossible que vous décidiez de vous plonger dans ce roman fleuve, en attendant la deuxième saison, déjà commandée et assez maladroitement amenée dans le season finale. Mais ce léger bémol ne saurait entacher notre enthousiasme pour Bloodline qui sera un antidote parfait à la très prochaine fin de Mad Men.