Cela ne sera en apparence qu’une audience de pure forme. Dans le jargon du métier, on appelle cela une audience relais.
Lundi 31 janvier à 13h30, les avocats des prévenus des dossiers des emplois fictifs de la Ville de Paris et du RPR se retrouveront face aux magistrats du tribunal correctionnel qui doivent juger leurs clients à partir du 7 mars prochain. Parmi eux, un prévenu pas comme les autres, l’ancien Chef de l’Etat, Jacques Chirac.
Logiquement, il s’agit de mettre la dernière main à un procès qui doit durer un mois. Déterminer avec précision le nombre de témoins et affiner le calendrier des audiences.
A un peu plus d’un mois de l’ouverture de ce procès très symbolique en termes d’image, une inconnue demeure : la présence du principal protagoniste.
Deux intérêts s’opposent. Celui de la justice qui consiste à aller jusqu’au bout de la logique. Jacques Chirac a été renvoyé par deux juges d’instruction, certes contre l’avis de deux procureurs. Ce qui s’applique à n’importe quel citoyen doit s’appliquer à celui qui a exercé les plus hautes fonctions de l’Etat, redevenu citoyen « ordinaire ».
Celui de la politique enfin qui souhaite, sans le dire ouvertement, épargner au Président sortant cette épreuve.
Alors que la presse judiciaire demande à pouvoir couvrir ce procès dans les meilleures conditions, la Chancellerie et les chefs de juridiction parisiens abordent ce rendez-vous judiciaire avec beaucoup de retenue, de détachement.
Car à la problématique de cette comparution de l’ancien président de la République s’ajoute une autre question à base d’interrogations, de non dits, de rumeurs. Jacques Chirac, âgé aujourd’hui de 78 ans, peut-il assurer sa défense devant les juges ? Certes, il est assisté de trois avocats dont M° Jean Veil et M° Georges Kiejman. Mais l’ex Chef de l’Etat est-il en capacité de répondre aux questions des magistrats sur des faits antérieurs à ses années à l’Elysée ? L’entourage de M. Chirac est assez vague sur ce point. Vendredi dernier, Charles Pasqua qui comparait en appel dans le dossier « Angolagate » a renoncé à le faire citer comme témoin, ajoutant devant la presse : « Je crois que physiquement, il n’est pas en état de venir ».
L’audience de lundi nous permettra peut être d’y voir plus clair.
De son coté, Chantal Arens, la présidente du TGI de Paris a tenu à rassurer la presse en affirmant que le procès aurait bien lieu. Mais on ignore encore sous quelle forme.
Plusieurs cas de figure sont possibles. Allons-nous vers un report du procès ? Ce qui serait dommageable pour les Co-prévenus qui attendent d’être jugés.
Assisterons-nous à un procès Chirac sans Chirac ? Ses avocats demandant une dispense.
Nous dirigeons nous vers une disjonction ? On juge comme prévu les autres protagonistes. L’ex Chef de l’Etat sera alors jugé plus tard. Mais quand ?
Bref les juges sont aujourd’hui prisonniers d’une disposition constitutionnelle. En gelant les poursuites contre l’ancien président le temps de ses mandats, elle a rendu impossible une justice dans les délais raisonnables.