Les questions que pose le jugement Kerviel

 
Le jugement de l’affaire Kerviel était très attendu. Sans surprise, il engendre une série de commentaires et d’interrogations. Logique.
 
C’est évidemment le montant des dommages et intérêts dus à la Société générale qui focalise l’attention. A tel point que cette décision civile pollue et discrédite en partie la condamnation pénale.
 
Ceux qui ont suivi le procès ne peuvent être surpris par la condamnation. Ses avocats plaidaient la relaxe mais ils étaient les seuls à y croire.
 
La réaction première consiste à dire que les juges, une fois de plus, ont condamné le lampiste.
 
Pour y voir un peu plus clair au lendemain de cette décision, tentons de répondre très simplement à quelques questions.
 
Pourquoi Kerviel est ressorti libre ?
 
La condamnation à 3 ans ferme n’a pas été assortie d’un mandat de dépôt. Ce dernier n’a certes pas été requis par l’accusation mais le tribunal pouvait très bien le décerner.
 
La Société Générale pouvait-elle être condamnée ?
 
Non. Même si Kerviel a tenté de faire transformer son procès en celui de la banque, il n’y avait que l’ex trader sur le banc des prévenus. La SG était dès le départ de la procédure présente en qualité de partie civile, de victime. Le tribunal pouvait simplement dans ses attendus rendre un jugement critique sur les défaillances et failles du système de surveillance de la banque. Il ne l’a pas fait. Il a simplement constaté qu’elle avait été sanctionnée par la Commission bancaire. En conséquence, rien n’est apparu aux yeux des magistrats qui puissent constituer l’amorce de circonstances atténuantes à Kerviel.
 
Les dommages et intérêts pouvaient-ils être moindres ?
 
Les juges ont fait un choix. Contrairement à ce qui avait été requis, ils n’ont pas condamné l’ex-trader à une amende dont le maximum pouvait s’élever à 375 000 euros. En revanche, même s’ils ont tenu compte de son âge, de son respect du contrôle judiciaire, de son casier judiciaire vierge, de son salaire, de ses 41 jours de détention provisoire, ils ont mis le curseur sur l’indemnité à la banque au maximum, autrement dit le montant demandé par celle-ci. A aucun moment, les magistrats n’ont sorti leur calculette pour se livrer à une projection de leur décision : 4,9 milliards d’euros équivaut à 177 000 années de salaire de l’actuel conseiller en informatique.
 
Jérôme Kerviel est-il obligé de payer ?
 
Non. Car tout simplement en faisant appel de la condamnation, il a gelé tout processus. Non seulement, il reste libre jusqu’au second procès mais l’indemnisation n’est pas exécutable pour l’instant. Kerviel peut donc juste espérer que l’ardoise soit réduite par les juges d’appel.
 
Quand aura lieu le procès en appel ?
 
Probablement à l’automne 2011. En attendant Jérôme Kerviel devra réfléchir à un éventuel changement de stratégie de défense. En attendant, il devra se faire à l’idée qu’il a, au dessus de lui, deux épées de Damoclès : un possible retour en prison et l’obligation un jour ou l’autre d’être le créancier de son ex employeur.
 
 
 
 
Publié par Dominique Verdeilhan / Catégories : Ma chronique