En 48 heures, toute la complexité procédurale de l'affaire Bettencourt vient de jaillir. Hier, c'est un document saisi au ministère de l'Intérieur qui mettait en avant l'avancée de l'enquête sur le volet concernant l'obtention de la légion d'honneur à Patrice de Maistre, le gestionnaire de la fortune de Liliane Bettencourt. Aujourd'hui, ce sont des preuves de la faiblesse psychologique de cette dernière que d'autres enquêteurs ont cherché au domicile de la milliardaire.
Deux procédures spectaculaires qui n'émanent pas du même magistrat. Celle visant le role exact de l'actuel ministre du travail Eric Woerth dans la décoration remis à M. de Maistre a été diligenté par Philippe Courroye, le procureur de la république de Nanterre. Celle menée au domicile de l'héritière de l'Oréal est le fruit d'une commission rogatoire délivrée par Isabelle Prévost-Desprez, la présidente de la 15 ème chambre correctionnelle de Nanterre. La première porte sur des faits supposés de trafic d'influence et de favoritisme. La seconde se limite à un abus de faiblesse. Dans le premier cas, c'est l'ancien trésorier de l'UMP est visé. Dans le second cas, c'est François-Marie Banier qui est dans le collimateur de la juge. Difficile de s'y retrouver d'autant plus que l'on connait les tensions qui existent entre les deux magistrats.
Maître Georges Kiejman s'est déclaré "scandalisé" par la perquisition menée au domicile de sa cliente. L'avocat n'a pas caché au cours des audiences publiques les réserves que lui inspirent les méthodes de la juge. "Je réfléchis au moyen de la faire sanctionner" a-t-il déclaré aujourd'hui. Le conseil de Mme Bettencourt s'insurge de cet acte de procédure qui intervient alors que dans 14 jours la cour d'appel de Versailles doit statuer sur le bien fondé du supplément d'information mené par Isabelle Prévost-Desprez .
Dans une lettre rendue publique ce soir, Mme Bettencourt, actuellement en Espagne, se déclare "outrée, choquée, bléssée et triste de voir sa vie privée étalée et violée de nouveau". Si elle avait donné son accord pour cette perquisition, considérant qu'elle "n'a rien à cacher", elle s'insurge contre le déroulement de cette visite par les enquêteurs de la brigade financière, évoquant des serrures de coffres forcés et les chambres de son personnel fouillées. D'une écriture à peine tremblante, Liliane Bettencourt écrit : "La façon dont ma fille s'acharne et dont cette juge se comporte prouve qu'elles considèrent toutes deux que je suis assez vaillante pour subir leurs humiliations et leurs attaques".
Les enquêteurs envoyés à Neuilly par la juge de Nanterre avaient mission de chercher des petits papiers, sorte de pense-bête pour une vieille femme qui n'aurait plus toute sa tête. La journée se termine par une lettre d'une dame de 87 ans qui veut garder la tête haute.