Charles Pasqua est le sixième ministre à être jugé par la Cour de Justice de la République. Il succède à ce triste tableau d’honneur à Laurent Fabius, Edmond Hervé, Georgina Dufoix, Ségolène Royal et Michel Gillibert.
Cette juridiction, compétente pour juger des faits que les auteurs ont ou auraient commis alors qu’ils avaient un portefeuille ministériel, s’est ainsi penchée sur 12 dossiers. 6 d’entre eux se sont soldés par un non lieu ou une décision d’incompétence. 6 autres ont abouti devant la formation de jugement. Des dossiers aussi disparates que le sang contaminé, une diffamation ou des malversations financières auprès d’une association. La plupart des ministres a été relaxé. L’un a été condamné mais dispensé de peine. Un seul a été condamné. Les trois dernières affaires sont celles qui concernent Charles Pasqua
Juridiction spéciale puisque comme sa version précédente, la Haute Cour de Justice, elle est composée majoritairement de parlementaires : 6 députés et 6 sénateurs. A leurs cotés : 3 magistrats émanant de la cour de cassation. Les parlementaires ont été désignés par leurs collègues de l’Assemblée nationale et du Sénat.
L’ancien ministre va à partir de lundi prochain se retrouver face à 12 collègues parlementaires. L’équilibre des forces politiques lui est plutôt favorable, à l’image de la composition des chambres en question. 8 d’entre eux sont à droite, et 4 à gauche.
L’actuel sénateur des Hauts de Seine n’est évidemment pas jugé pour des actes politiques mais pour des délits commis alors qu’il était ministre de l’Intérieur. Délits au pluriel car ce ne sont pas moins de trois dossiers qui attendent les parlementaires dans ce procès hors normes. Charles Pasqua est poursuivi pour complicité et recel d’abus de biens sociaux dans un dossier dit de la SOFREMI, pour complicité et recel d’abus de biens sociaux dans un autre dossier dit GEC-ALSTHOM et enfin pour corruption passive dans un dossier concernant le casino d’Annemasse. Dans ces trois affaires, Charles Pasqua est accusé d’avoir favorisé des proches.
Ce sont des dossiers que la justice a déjà eu à connaître. Jeudi dernier, la cour de cassation a confirmé les condamnations du père et du fils Pasqua. Ainsi Charles Pasqua a été condamné définitivement à 18 mois de prison avec sursis pour financement illégal de campagne électorale, abus de confiance et faux dans un volet du casino d’Annemasse. Son fils l’est également à un an de prison ferme dans le dossier de la SOFREMI. Rappelons pour mémoire que le tribunal correctionnel de Paris a infligé à l’ancien ministre une peine d’un an ferme pour trafic d’influence dans le dossier de l’Angolagate. Peine non définitive puisque Charles Pasqua comme d’autres prévenus a fait appel.
Les audiences vont durer 15 jours dans la salle d’audience où a été jugé Dominique de Villepin dans le dossier Clearstream.
56 témoins vont défiler à la barre. Parmi eux : Claude Guéant, le secrétaire général de l’Elysée, Henri Guaino, conseiller de Nicolas Sarkozy, Jean-Marc Sauvé, vice président du Conseil d’Etat, Philippe de Villiers qui s’était un temps rapproché de Pasqua lors de la création du RPF avant de mettre en doute le financement du parti et de déclencher les procédures judiciaires contre l’ancien ministre. Viendra également à la barre des témoins Pierre Falcone qui, après le rejet de son pourvoi en cassation, reste en détention pour purger sa peine de 4 ans.
Au lendemain des réquisitions de l’avocat général près la cour de cassation, Yves Charpenel, les 15 jurés rendront leur décision le 30 avril.
Le 18 avril, à la veille de sa comparution devant la CJR, Charles Pasqua fêtera ses 83 ans