Il y a chaque année, 577 816 personnes placées en garde à vue. Elles ne se terminent pas forcement par une procédure judiciaire. Mais cela représente quand même 1% de la population française qui tous les ans se retrouve interrogé par des policiers.
L'an dernier, l'une d'entre elles avait fait la "une" de l'actualité. Reconnaissons le, c'est parce qu'elle concernait au premier chef un journaliste. Le 28 novembre 2008, à l'heure du laitier, Vittorio de Filippis, était interpellé chez lui. Ancien directeur de publication de "Libération", il faisait l'objet d'un mandat d'amener délivré par une juge chargée d'un dossier de diffamation publique. Déjà la mesure coercitive apparaissait disproportionnée par rapport à l'infraction reprochée.
Remis en liberté à l'issue de sa garde à vue et après avoir été mis en examen, le journaliste détaillait son interpellation. Les policiers étaient arrivés à son domicile à 6h45 et sans ménagement l'avait menotté et insulté sous les yeux de l'un de ses fils.
Muriel Josié, la juge d'instruction, justifiait le mandat d'amener en avancant que le journaliste n'avait pas répondu à ses convocations.
Nicolas Sarkozy disait comprendre l'émoi suscité par cette interpellation musclée. François Fillon s'avouait choqué par le procédé. En revanche, Rachida Dati et Michèle Alliot-Marie se déclaraient solidaires de leurs troupes en rappelant que la magistrate avait agi en toute indépendance et en respectant la procédure.
Ce matin, les magistrats de la chambre de l'instruction ont purement et simplement condamné l'utilisation du mandat d'amener et de ce fait annuler la mise en examen. Le dossier quant à lui subsiste mais l'arrêt de ce jour constitue bel et bien un désaveu des méthodes du juge. Les conditions de l'interpellation n'étaient pas "proportionnées à la gravité de l'infraction et l'interrogatoire immédiat de Vittorio de Filippis par le juge d'instruction ne s'imposait pas pour les nécessités de la procédure" écrivent les juges de la chambre de l'instruction.
Bien sur, la magistrate aujourd'hui réprimandée par ses collègues ne sera pas traînée devant le conseil de discipline. Cette petite tape sur les doigts, ce "panpan cucul" n'est pas en commune mesure avec la sanction infligée au juge Burgaud.
Non, les suites sont d'un tout autre ordre. Rappelons simplement qu'un mois après la polémique qu'avait engendrée cette affaire, le Chef de l'Etat faisait part de son souhait de supprimer purement et simplement le juge d'instruction.