Répétons-le encore une fois. Il nous a été très difficile d'apporter un éclairage équilibré au lendemain du verdict dans le dossier des viols collectifs jugé par la cour d'assises des mineurs à Créteil. Les audiences durabnt trois semaines se sont déroulés à huis clos, hors la présence des journalistes. Impossible de dire si les débats ont mis en lumière la fragilité des accusations des deux plaignantes et si les charges qui pesaient contre les 14 accusés ne tenaient pas la distance. Impossible également d'expliquer pourquoi l'avocate générale a requis du bout des lèvres, autrement dit sans prononcer le mot, l'acquittement de 6 jeunes gens. Impossible enfin d'apporter un élément d'explication aux peines prononcées, qui apparaissent dérisoires au regard des faits dénoncés.
Une semaine plus tard, nous nous devons déjà de nous projeter vers l'avenir. Au printemps ou plus probablement à l'automne prochain quand se tiendra le procès en appel. 4 condamnés et 4 des 10 acquittés seront rejugés. Ainsi en a décidé le parquet de Créteil, en accord avec le parquet général de la cour d'appel de Paris.
Avant d'aborder les faits, il reviendra aux magistrats de la seconde instance de régler une question importante. Les conditions dans lesquelles se dérouleront les audiences.
Rencontrés la semaine dernière dans le cabinet de l'un d'eux, Maître Philippe Geny-Santoni, 5 des avocats de la défense n'ont pas caché leur intention de demander que le procès soit public. Il leur reviendra de convaincre leurs clients qui jusqu'à présent n'ont pas manifesté une telle volonté. Les conseils des accusés veulent évidemment démontrer que les dires des deux jeunes filles ne sont aucunement crédibles. Quelques minutes plus tard, dans son cabinet à l'autre bout de Paris, Maître Laure Heinich-Luijer, une des deux avocates des deux plaignantes, me confiait qu'elle s'opposerait à la publicité des débats. Non pour cacher la réalité du dossier. Mais pour protéger sa cliente.
Dans une tribune publiée ce matin dans Libération, l'avocate considère que l'appel du parquet s'est fait sous la pression médiatique, "les victimes ne s'étant pas déclarées favorables préalablement".
La presse n'a pas à prendre parti dans le débat concernant la publicité des audiences. La question s'était déjà posée après le premier procès du "gang des barbares" dont le principal accusé était Youssouf Fofana. Un texte de loi changeant les conditions d'application du huis clos devant une cour d'assises avait été votée par l'assemblée nationale. Mais le dit texte n'est janamis arrivé dans l'hémicycle du Sénat.
Dans l'affaire du "Gang des barbares", l'appel avait été interjeté par le parquet général de Paris à la demande express du Garde des Sceaux de l'époque, Michèle Alliot-Marie. Le second procès à Créteil de l'enlèvement, la séquestration et le meurtre d'Ilan Halimi s'est également déroulé hors la présence des médias. Les peines ont été légèrement aggravés sans que l'on puisse expliquer pourquoi.
Le huis clos est un droit. Informer est un devoir. C'est parfois contradictoire.