COP 21 : L'heure de la pédagogie

Les coulisses des éditions spéciales, c'est aussi leur documentation. Voici, en plusieurs articles, une sélection des ouvrages qui nous ont permis d'aborder la COP 21 en sachant à peu près de quoi nous parlons. Tout est dans le "à peu près" tant le sujet est vertigineux et pluridisciplinaire !

 

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Le ciel nous tombe sur la tête, Brice Lalonde et Alain Hervé, Arthaud

Brice Lalonde commentera avec nous l'ouverture de la COP 21 lundi 30 novembre vers 11 heures. L'ancien ministre de l'Environnement était l'ambassadeur chargé des négociations internationales sur le changement climatique pour la France à Copenhague en 2009. Il est depuis conseiller spécial pour le développement durable à L'ONU. Autant dire qu'il connaît parfaitement les rouages, les possibilités et les limites des grandes négociations sur le climat. Son expérience nous sera précieuse. 

Ce livre est un jeu de questions réponse, 101 exactement (Hasard ou parfum de mai 81 ?...). Le questionneur est Alain Hervé, journaliste, fondateur des Amis de la terre. Ses interrogations, faussement naïves, souvent décapantes, sont parfois aussi longues que les réponses de Brice Lalonde. Les deux hommes se connaissent depuis des années et cette interview tient plus du dialogue, non pas entre deux visions de l'écologie politique, mais entre deux manières de la pratiquer.

Lalonde a appris à ne pas trop attendre des grandes messes internationales mais refuse farouchement de les décréter inutiles, ce que bon nombre d'éditorialistes panurgistes ne manquent pas de faire. Le Français est si rétif au compromis qu'il voit toujours un échec lorsque l'objectif n'est pas atient à 100%... Il répond à des questions concrètes (Par exemple "va-t-on protéger nos zones côtières avec des digues ?"), philosophiques ("la résignation de Lovelock est-elle acceptable ?") ou encore politiques ("Comment infléchir les revendications pathétique du "toujours plus" des citoyens de gauche, qui ne prennent pas en compte la crise écologique ,"). Je vous recommande la question n°46 et sa réponse. Quand Alain Hervé fait mine de vouloir revenir à une société agrarienne à grand renfort de dénonciation de notre horrible société de consommation, et que Brice Lalonde lui rappelle en substance ce qu'est une "réaction" au sens historique, et qu'un autre futur est à inventer. On imagine que ces deux-là n'en finissent plus de débattre avec complicité.

Les politiques ont sauvé Copenhague

La politique, la vraie, est presque partout dans ce livre qui dénonce "l'aveuglement" des leaders, l'absence d'un personnage historique au charisme mondial qui pourrait fédérer un changement de paradigme. Brice Lalonde a digéré les faux espoirs et résilié les désillusions. Et il montre avec calme que tout n'est pas joué, loin de là. Surtout, il réaffirme le rôle central des chefs d'Etat, "qui ont sauvé Copenhague", crie-t-il, et qui, mieux que les négociateurs embourbés dans d'obscures et interminables palabres, ne voient plus l'essentiel.

L'Homme programmé pour cultiver l'espoir et l'illusion

L'économie, l'éducation, l'adaptation sont balayés par ce propos très complet.

Le livre s'achève sur une 101ème question sans réponse. Alain Hervé y affirme que l'homme a du mal à admettre le désordre climatique comme il n'accepte pas l'idée de sa propre mort, "programmé dans [sa] chair pour cultiver l'espoir et l'illusion".

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Climat, 30 questions pour comprendre la conférence de Paris, pascal Canfin et Peter Staime, Les petits matins

Pascal Canfin était l'un des ministres écologistes des gouvernements Ayrault, en charge du Développement. Il il est Conseiller principal pour le climat du World Resources Institute (WRI), un think tank américain spécialisé dans les questions environnementales. Son co-auteur est un habitué des négociations internationales, qu'il examine depuis dix ans. 

Leur ouvrage est plus académique et moins "au fil de l'eau" que celui de Brice Lalonde et Alain Hervé. Il se lit plus comme un guide, dans lequel le lecteur peut picorer. Sont examinés successivement les enjeux, puis la diplomatie, l'éventualité d'un accord à la COP 21, et l'économie. Il débouche sur douze propositions politiques pour que Paris soit un succès, ainsi que des conseils pour s'engager dans ce combat.

Une manière très synthétique pour le lecteur de faire la point sur la vision écologiste française des négociations en cours. Une vison bien plus pragmatique qu'un bête préjugé me laissait attendre. Comme de nombreux analystes, les auteurs commencent par rappeler la fameuse étude de proceedings of the National Academy of Sciences très souvent citée. Elle démontrent l'influence de la sécheresse sur l'émergence d'un désordre politique majeur en Syrie. Le livre fait ensuite le point sur les grandes données (qui émet quoi ? La politique française et ses limites, etc...) Et contrairement à la thèse de Brice Lalonde, il affirme l'échec de Copenhague. Les auteurs expliquent ensuite pourquoi ils considèrent que Paris a plus de chances de déboucher sur des avancées, avec un chapitre consacré aux promesses financières des Etats riches aux pays les plus pauvres.

Enfin l'ouvrage assume son caractère de guide en égrenant quelques conseils pratiques à ceux qui voudraient se rendre à la COP21. Des conseils à prendre avec précautions, puisque l'ouvrage a bien sûr été rédigé avant les attentats et leurs conséquences sur les conditions d'accès au Bourget, là où se tiennent les débats.

 

Publié par Pascal Doucet-Bon / Catégories : Non classé