Pendant ses premières années d’existence, l’affiche et le bandeau-texte restent le matériel de base de la propagande du Front national. Le parti d’extrême droite n’a pas de visuel. L’imprimeur propose un fond uni sur lequel se détache un slogan en lettres capitales. Il lui arrive aussi d’appliquer un mélange de couleurs dont le coût est peu élevé.
Le FN opte immédiatement pour les couleurs « nationales » : bleu, blanc et rouge. Elles ont un impact visuel fort – le rouge est la première couleur perçue par l’œil. Pour ces raisons pratiques, la maquette frontiste est simple et repose, en quelque sorte, sur une typographie à la mode.
Le matériel de propagande du FN doit être visible de loin. Cette remarque ne prend pas en compte seulement des exigences publicitaires. Frank Marest - le concepteur des affiches du FN pendant les années quatre-vingt-dix -, explique la raison essentielle : « Il faut dire aussi que, si nous présentons quelque chose à Le Pen, lui a un œil en moins et ne dessine pas. C’est une chance qu’il ne voie pas bien car lui aussi regardait les affiches en voiture. Et s’il ne distinguait pas certaines choses, il poussait une gueulante : "Elle est nulle cette affiche, je ne vois rien." On faisait donc les lettres plus grosses. On était arrivé à ce système : il faut que le Président la voie ».
En intégrant l’ensemble de ces contingences, Jean-Pierre Stirbois créé la première charte graphique du FN : bandeau et/ou affiche, texte sur fond monochrome composé de formules courtes, caractères espacés et typographie stabilisée, logo et mention de l’adresse du siège du parti… et utilisation des trois couleurs : le bleu - davantage positif, couleur de la réflexion - se réfère à l’action du FN. Le blanc annonce la fracture et le rouge – la couleur négative, celle de l’interdit - évoque, la plupart du temps, les immigrés.
C’est une première forme d’identité visuelle qui fonctionne pendant une décennie (1978-1989). L’identification avec le FN est immédiate.