Alors que le séminaire sur la transformation « profonde » du Front national débute le vendredi 21 juillet, Louis Aliot, invité sur LCI, revient sur le positionnement idéologique de son parti. « Dans sa constitution et son ADN », affirme le vice-président du FN, « c'est un parti de droite. Mais c'est un parti de droite populaire, c'est un parti de droite sociale, qui a réussi à agréger à lui des gens qui, par le passé, était à gauche. Tout l'électorat anciennement communiste qui a basculé chez nous, des socialistes dans la ruralité, dans le Sud-Ouest, qui ont basculé chez nous ». Avec ces quelques mots, le député des Pyrénées Orientales fait quasiment du copié-collé avec Jean-Marie Le Pen au moment des premiers temps du Front national. Retour sur ce parti de « droite sociale, populaire et nationale », constitué en octobre 1972, qui s’engage pour ses premières élections à l’occasion des législatives de mars 1973.
Un parti de « droite sociale, populaire et nationale »
Le FN n’a que quelques mois et part en campagne en se proclamant de droite. Au début des années soixante-dix, ce terme n’est pas vraiment habituel. Il est même « tabou » et témoigne d’une certaine originalité. Pour Jean-Marie Le Pen, c’est la « façon la plus radicale de montrer son opposition ». La droite qu’il incarne s’oppose à la gauche et doit chasser la majorité du pouvoir (l’Union des démocrates pour la République, UDR) qui, par sa politique, ouvre la route au communisme et trahi ses électeurs. Le FN entend se démarquer de la droite classique pour rétablir ainsi « l’équilibre politique et faire cesser la démagogie qui entraîne toujours plus à gauche le corps politique français, il faut redonner à la France une droite digne d’elle, une droite qui ose dire son nom et se battre sous ses couleurs » explique Jean-Marie Le Pen dans Le Monde (27 décembre 1972). Sa tribune s’intitule « Front national et droite populaire ».
Trois adjectifs, rattachés au vocable droite, définissent donc le FN émergent : sociale, populaire et nationale. Le premier numéro de la publication du parti, Front national, du 7 novembre 1972 y revient :
« La Droite sociale, ennemie des monopoles capitalistes et des professionnels de la lutte de classe, qui ne refuse pas le progrès, mais entend le soumettre aux seuls intérêts de l’Homme.
La Droite populaire, héritière des traditions humanistes qui ont forgé le visage de notre peuple : amour et goût de la terre, respect du travail, joie de l’amour et de la famille, sens de la responsabilité, loyauté des gouvernants, esprit de sacrifice et de fraternité.
La Droite nationale, pour qui l’amour de la Patrie est la forme la plus haute de la solidarité entre les hommes de notre peuple, respectueuse à la fois des anciens qui ont lutté et souffert pour que nous vivions libres et de ceux qui viennent à nous et à qui nous devons transmettre l’héritage ».
À l’automne 1972, la France compte une formation politique supplémentaire. Les chances pour qu’elle parvienne à s’affirmer dans le paysage politique sont minces. Son discrédit, lié à l’histoire des années de guerre et à l’existence, en France, d’un parti de droite majoritaire, constitue son principal handicap. Jean-Marie Le Pen est convaincu, au contraire, que c’est ce qui fait sa force : il déplore l’absence d’une droite, digne de ce nom, depuis 1962 et croit porter sur son nom cette espérance. Près de quarante-cinq ans après la naissance du FN, alors que Marine Le Pen envisage de changer le nom du parti et de supprimer la présidence d’honneur, l’empreinte paternelle demeure.