Pourquoi Hollande s’intéresse à Montebourg

Le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, lors d'une conférence de presse à Paris, le 25 septembre 2012. (MAXPPP)

Ce jeudi soir 24 janvier, Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, est, en direct sur France 2, l’invité-vedette de la prestigieuse émission « Des paroles et des actes ». Seul ministre depuis l’élection de François Hollande à avoir eu auparavant ce privilège : le ministre de l’Intérieur Manuel Valls, star des sondages. Mais l’un et l’autre n’ont pas le même positionnement politique : Valls occupe –avec talent- le flanc droit de la majorité. Quant à l’avocat Montebourg - qui rappelle par moments le jeune Mitterrand, avocat comme lui- tout indique que Hollande aimerait le voir incarner à sa façon le flanc gauche de… la gauche. Pour éviter que Jean-Luc Mélenchon ne réussisse (de l’extérieur) son OPA sur des électeurs que le pragmatisme présidentiel a tendance à déboussoler.

Quatre raisons expliquent l’intérêt que porte Hollande à un homme qui avait rédigé sa lettre de démission après avoir été envoyé dans les cordes par Jean-Marc Ayrault pour avoir osé parler de « nationalisation possible » à propos de Florange. Et aussi pour avoir tendance, au sein du gouvernement, à n’en faire qu’à sa tête.

1   Montebourg est talentueux

Eloquent, séducteur, réactif et parfois cruel, le ministre du Redressement productif (dénomination dont il était, au départ, très fier), Arnaud Montebourg –qui avait recueilli, à la surprise  générale, 17% des voix lors des primaires PS- a une haute idée de lui-même, beaucoup d’ambition et pas mal d’entregent. C’est une des valeurs montantes du PS.  Au fond de lui, il est convaincu qu’il sera un jour président de la République.

 2  Montebourg est dangereux

L’homme tient son rang, et aime à être pris au sérieux. Il avait surpris lors des primaires PS, se classant troisième. Il est convaincu qu’il surprendra encore. Il assure ne pas être un solitaire. Et il sait montrer sa force. Et gare à qui lui manque de...respect !

3  Montebourg est imprévisible

Désavoué et surtout humilié par Jean-Marc Ayrault dans l’affaire de Florange, Montebourg avait bel et bien rédigé sa lettre de démission. Et, depuis, il a lourdement souligné que seuls deux hommes l’avaient convaincu de la déchirer : François  Hollande et Edouard Martin, le leader de la CFDT à Florange. L’homme n’est pas changeant, mais il n’est jamais définitivement là où on le croit. Hier, il avait pareillement « tapé » sur les patrons, la famille Peugeot en tête qu’il malmenait. Aujourd’hui, le propos s’est adouci : bien sûr, des patrons, il en faut. A Renault, par exemple.

4   Montebourg est utile

Comme l’aile droite du PS est tenue par Manuel Valls, c’est à gauche qu’on attend aujourd’hui Arnaud Montebourg, dont l’allure giscardienne ne doit pas faire illusion. Avec une mission explicite (que lui a discrètement fixée le chef de l’Etat) : déloger Jean-Luc Mélenchon qui, de l’extérieur, ne cesse de dénoncer la « dérive » social-libérale du pouvoir, et sur quel ton ! Mais il y a du Mitterrand jeune chez Montebourg:  son positionnement d’aujourd’hui ne préjuge ne rien son positionnement d’après-demain. Pour accéder à l’Elysée, François  Mitterrand –son maître- ne suggérait-il pas jadis dans les Congrès socialistes qu’il allait « rompre avec le capitalisme » ? Mitterrand-Montebourg, mêmes combats. Pour conquérir le pouvoir, il tapera à gauche. S’il l’exerce un jour –à Matignon ou plus haut-  il aura vite fait, lui aussi,  de se recentrer.