Lancée en 1968, Channel 1 a brusquement cessé d’émettre, ce mercredi, dans le cadre de la réforme contestée de l’audiovisuel public voulue par Benyamin Netanyahou.
Il est un peu moins de 20 heures, mardi, quand Geoula Even, présentatrice vedette de la première chaine de télévision israélienne, interrompt son flash pour relayer un communiqué qui vient de lui parvenir. « Nous allons retransmettre ce soir notre dernier journal télévisé », lance-t-elle d’une voix tremblante. Ceci est lié à la création d’un nouveau service public ». Et de poursuivre, presqu’en sanglots : «Je souhaiterais remercier tous ceux qui ont travaillé pendant ces d’années avec tant de professionnalisme ».
Quelques instants plus tard, débute l’ultime JT de Channel 1. Sur le plateau, journalistes et techniciens se regroupent devant les caméras et prennent la parole à tour de rôle, improvisant un adieu qu’ils ponctuent en entonnant l’Ha’Tikva, l’hymne israélien. Les équipes semblent sonnées par l’annonce brutale de la fermeture de leur chaîne, survenue après trois ans de mobilisation contre le gouvernement, à l’origine d’un vaste projet de réforme de l’audiovisuel public. D’ici au 15 mai, l’Autorité de diffusion israélienne (IBA) sera remplacée par la Corporation de radiodiffusion publique (Kan). Outre Channel 1, plusieurs fréquences radios vont cesser d’émettre, menaçant des centaines d’emplois supplémentaires.
L’avenir de la radio-télévision publique a été au centre d’un long bras de fer entre le Premier ministre Benjamin Netanyahou et son ministre des Finances Moshe Kahlon, le premier ne voulant plus d’une réforme qu’il avait d’abord soutenue alors que le second tenait à ce qu’elle soit menée à bien à cause de l’importance des sommes déjà investies dans le projet. Netanyahou est allé jusqu’à brandir la menace de provoquer des élections anticipées si un accord n’était pas trouvé. Le bras de fer a été résolu fin mars grâce à un montage complexe. Officiellement, la réforme visait à dynamiser un service public à bout de souffle et à regagner une partie du terrain perdu face aux chaînes privées.
La volonté d’emprise de Netanyahou sur l’information passe cependant aux yeux de nombreux commentateurs israéliens pour un facteur primordial de la crise. Ces dernières années, le chef du gouvernement israélien s’est vu accusé de mener une guerre sans merci à certains journaux « hostiles » à son pouvoir, à l’instar du Haaretz qui a révélé de nombreuses affaires de corruption dans lesquelles la justice tente depuis d’établir son degré d’implication. Le 8 janvier dernier, la deuxième chaîne de télévision israélienne dévoilait le contenu d’un entretien de plusieurs heures avec le patron du quotidien à grand tirage Yediot Aharonot (« les dernières nouvelles »). Il se résume à un compromettant marchandage : moyennant une couverture favorable de sa personne, Netanyahou consentait à rendre payant le journal concurrent « Israel Hayom », financé par l’un de ses proches, le milliardaire juif américain, Sheldon Adelson.
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