Procédure de Bruxelles contre Rome : de quoi s’agit-il ?

La Commission européenne a demandé à placer l’Italie en procédure de déficit excessif, le 5 juin dernier à cause du niveau trop élevé de sa dette. En quoi consiste cette mesure ?

La procédure de déficit excessif fait partie du Pacte de stabilité et de croissance de l’Union Européenne. Ce pacte a été adopté au Conseil européen d’Amsterdam en juin 1997. Son objectif : coordonner les politiques budgétaires nationales au niveau européen et éviter l’apparition de déficits budgétaires trop importants. Pour garantir la bonne santé budgétaire de l’Union Européenne, ce pacte a créé la procédure de déficit excessif quand un pays membre ne respecte pas les critères imposés. Le déficit budgétaire d’un pays ne doit pas dépasser 3% du PIB et sa dette publique ne doit pas aller au-delà de 60%.

Quand un de ces critères n’est pas rempli, une procédure de déficit excessif peut être demandée par la Commission européenne. C’est ce qu’il s’est passé pour l’Italie. En cause, la dette du pays qui  ne cesse de gonfler, selon les prévisions de la Commission, elle a atteint 132,2% du PIB en 2018 et devrait monter à 133,3% en 2019 et jusqu'à 135,7% en 2020…alors que le précédent gouvernement s’ était engagé à la réduire.

Comment se déroule cette procédure ?

« Notre porte reste ouverte », la Commission européenne a insisté. Elle ne lance pas encore la procédure contre l'Italie, « c'est seulement le premier pas qui pourrait y conduire » a souligné Pierre Moscovici le 5 juin. Car le processus veut qu'après la demande de la Commission, les ministres des finances analysent le dossier à l'Ecofin, le conseil des affaires économiques et financières. Le prochain se tiendra le 14 juin. Si ces ministres confirment les recommandations de la Commission, l'ouverture de la procédure est ensuite votée par les Etats membres à la majorité qualifiée. Si le vote est positif, le pays est placé en déficit excessif et doit alors suivre les recommandations formulées par le Conseil pour améliorer sa situation budgétaire dans un délai imparti.

Quelles sont les contraintes ?

Le pays concerné doit fournir un plan des mesures et de politiques correctives envisagées, ainsi qu'un calendrier avec les dates de réalisation. Si les recommandations formulées ne sont pas suivies, le pays est passible d’une amende. Par exemple, si elle ne respecte pas ses engagements budgétaires, l'Italie pourrait être sanctionnée à hauteur de 0,2% du PIB, soit une amende d'environ 3 milliards d'euros.

Que peut faire l’Italie ?

L’Italie peut encore montrer à l’Union Européenne qu’elle fait des efforts pour baisser sa dette. Mais le gouvernement italien ne semble pas aller dans ce sens, la coalition populiste au pouvoir qui réunit la Ligue (extrême droite) et le mouvement Cinq Etoiles (antisystème) est divisée sur le respect des règles européennes budgétaires. C’est donc une longue procédure de négociations qui s’ouvre entre Bruxelles et le gouvernement italien.

Quels pays ont déjà été concernés ?

En 2011, pendant la crise économique, 24 Etats membres étaient couverts par cette procédure, dont la France. Paris a réussi à en sortir le 23 mai 2018, grâce à l’abaissement de son déficit à 2,6% du PIB. Aujourd’hui, il n’y a plus que l’Espagne qui est toujours concernée par cette procédure. Mais certainement plus pour longtemps, la Commission européenne a annoncé le 5 juin vouloir sortir le pays de la procédure de déficit excessif grâce à sa remontée économique.

Charlotte Dupon et Valéry Lerouge