Et si l'influence des députés se mesurait aussi hors de l'Hémicycle...

Les députés à l'Assemblée nationale pour la dernière séance de la législature, le 22 février 2017. (PATRICK KOVARIK / AFP)

La XIVe législature est morte. Vive la XVe ! Enfin, pas tout à fait. Si les portes de l'Assemblée nationale se ferment le 24 février 2017, la législature en cours s'achèvera officiellement, elle, le 19 juin. Après le scrutin présidentiel (23 avril et 7 mai) et les élections législatives (11 et 18 juin). A la suite de ce tunnel de quatre mois commencera alors la XVe législature de la Ve République. C'est le bon moment pour faire le bilan du travail de nos députés et, en particulier, mesurer leur influence.

Une agence de "communication d'influence globale", Rumeur Publique, primée "Agence de l'année" en 2015 et 2016, s'est livrée à cet exercice. Et il ne s'agissait pas seulement d'évaluer le nombre d'heures passées dans l'Hémicycle ou en commission par chaque élu. Le jeu consistait à prendre aussi en compte la présence des députés dans la presse, lieu plus accessible au grand public, et leur activité sur les réseaux sociaux (Twitter et Facebook) qui ont connu un développement considérable depuis le début de la décennie.

Ce classement a d'autant plus d'intérêt qu'une bonne partie de ces parlementaires va remettre son mandat entre les mains des électeurs - quelques dinosaures du Palais-Bourbon vont quitter la partie - et que pour la première fois de l'histoire de cette République, loi sur le cumul des mandats oblige, il n'y aura plus aucun maire sur les bancs de l'Assemblée. Or, ce mandat est celui de la proximité par excellence. Et donc de l'influence. Bon nombre de députés de droite souhaitent, si celle-ci remporte les législatives, remettre en cause les restrictions qui vont entrer en vigueur.

Le "frondeur" socialiste Christian Paul tient le haut du pavé

Sur les 577 députés, Rumeur Publique en a testé 572, c'est-à-dire tous ceux qui avaient ce mandat de janvier à décembre 2016. Hasard ou concrétisation de la situation politique de la gauche, le premier du classement général est socialiste, donc appartenant au groupe majoritaire, et "frondeur", donc membre de la minorité de ce groupe. Il en est même le chef de file. Christian Paul (PS, Nièvre), qui préfère l'expression "émancipation parlementaire" à celui de "fronde", a fait adopter nombre d'amendements contre l'avis du gouvernement et il n'a pas ménagé ses critiques contre l'exécutif dans la presse et sur les réseaux sociaux.

C'est l'homogénéité de ses classements - il n'est au-delà de la 100e place dans aucune des catégories - qui lui confère sa place de leader d'influence. Cette position lui donnera-t-elle un avantage ou sera-t-elle un handicap ? Réponse en juin. La question ne se posera pas pour le deuxième, Laurent Grandguillaume (PS, Côte d'Or) car lui ne se représente pas. A 39 ans, l'âge où Emmanuel Macron se lance dans la course à l'Elysée, Grandguillaume quitte la politique pour s'engager autrement après 10 ans de mandats électifs !

La troisième marche du podium est occupée par un représentant de l'opposition : Eric Ciotti (LR, Alpes-Maritimes). Bretteur à l'Assemblée, dans la presse et sur les réseaux sociaux, Ciotti a façonné son influence autour de son engagement inconditionnel pour Nicolas Sarkozy et maintenant pour François Fillon dans la joute présidentielle. En multipliant aujourd'hui les critiques contre Macron. Il devance justement un fidèle lieutenant de l'ex-ministre de l'économie, Richard Ferrand (PS, Finistère), et un rallié de fraîche date à Macron, François de Rugy (ex-écolo, PS, Loire-Atlantique), respectivement quatrième et cinquième.

Twitter et Facebook entrent dans la vie des parlementaires

En entrant dans le détail de chaque catégorie, on constate que "ceux qui contribuent les plus efficacement au travail parlementaire", note l'agence, "sont peu connus du grand public". Parmi ces "piliers du Parlement", Valérie Rabault (PS, Tarn-et-Garonne) se place première. Il est vrai qu'elle a occupé une place de choix, obtenue grâce à ses compétences, en tant que rapporteure générale du Budget pour la majorité. Même constat pour son dauphin, Gérard Bapt (PS, Haute-Garonne), rapporteur du budget de la sécurité sociale. Pilier du Parlement, Bapt en est un exemple criant : à 71 ans, il cumule 34 ans de mandat de député ! Et il devance un "jeunot" de 33 ans son cadet, Razzy Hammadi (PS, Seine-Saint-Denis).

Les plus assidus dans les médias ne sont pas ceux qui alimentent le plus l'accomplissement législatif. Mais ceux là sont bien mieux connus de l'opinion. Et pour cause. Ils sont candidats à l'élection présidentielle ou ils et elles ont été participant-e-s à des primaires. L'opposition tient la rampe. François Fillon (LR, Paris), champion de la droite pour l'Elysée, est premier devant Bruno Le Maire (LR, Eure), Jean-François Copé (LR, Seine-et-Marne) et Nathalie Kosciusko-Morizet, NKM, (LR, Essonne). Suivent le premier secrétaire du Parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis (PS, Paris), et son candidat présidentiel, Benoît Hamon (PS, Yvelines). L'écologiste et ex-ministre Cécile Duflot (Non inscrits, Paris) est huitième et la députée d'extrême droite, Marion Maréchal-Le Pen (Non inscrits, Vaucluse) ferme ce Top10.

Enfin, le vent de Twitter et de Facebook souffle aussi sur l'influence parlementaire. Pour Twitter, Rumeur Publique a calculé le "nombre de retweets obtenus par le député indépendamment du nombre tweets et du nombre de followers". Pour Facebook, l'agence a retenu le "nombre de personnes ayant mentionné la page du député durant la dernière semaine". Au jeu des "As du clavier", NKM décroche la timbale en devançant Henri Guaino (LR, Yvelines) et Fillon sur Twitter. Alors que sur Facebook, Le Pen nièce est en tête devant son collègue de même obédience politique, Gilbert Collard (Non inscrits, Gard) et encore... Fillon. A l'évidence, les réseaux sociaux élargiront leur influence au cours de la XVe législature.

L'étude et les classements effectués par Rumeur Publique peuvent être lus ici en intégralité.

Publié par Olivier Biffaud / Catégories : Actu