La victoire de Sarkozy ouvre une ère de cohabitation au sein de l'UMP

Nicolas Sarkozy, le 28 octobre 2014 à Marseille. (BORIS HORVAT / AFP)

Nicolas Sarkozy l'a emporté mais pas exactement comme il l'avait prévu ! L'ancien président de la République est "redevenu" président de l'UMP, le 29 novembre, face à Bruno Le Maire et Hervé Mariton, au terme du vote des militants réunis en congrès électronique. Il est arrivé en tête avec 64,5% des voix.

Sur les 155.285 suffrages exprimés pour 268.336 adhérents officiellement à jour de cotisation, Sarkozy en a recueilli 100.159 (64,50%), soit deux fois plus, bon poids, que le total de Le Maire (45.317 suffrages et 29,18%) et dix fois celui de Martiton (9.809 voix et 6,32%). En 2004, il était devenu président de l'UMP avec 85% des suffrages - ils étaient moins nombreux qu'aujourd'hui -, en écrasant Dupont-Aignan et Boutin.

Certains de ses lieutenants avaient, certes, préparé le terrain, en déclarant que l'essentiel était de gagner et de la faire dès le premier tour, ce qui était une manière d'annoncer qu'il ne rééditerait pas le score soviétique obtenu dix ans avant mais ni lui ni son entourage ne misaient sérieusement sur un résultat inférieur à 70%. A cette aune, il apparait plutôt comme une victoire à la Pyrrhus.

Déception perceptible ici, exaltation rayonnante là

A la déception perceptible ici - il suffisait de constater la discrétion inhabituelle du fan club sarkozyste sur les réseaux sociaux, au soir du scrutin - s'opposait une exaltation rayonnante là. En frôlant la barre des 30%, objectif qu'il s'était secrètement fixé, Le Maire avait réussi son coup. Il s'appuie désormais sur un socle mesurable qu'aucun de ses adversaires quarantenaires dans le parti ne peut revendiquer.

Les amis de Sarkozy peuvent toutefois se rassurer - ce qu'ils ont commencé à faire -, en assurant que Le Maire a non seulement rassembler ses propres partisans mais qu'il a aussi rameuté une bonne partie des fidèles de Juppé et de Fillon ainsi que les anti-sarkozystes "apatrides". Et au bout du compte, cet assemblage là représente moins d'un tiers des votants, ce qui est à la fois assez peu et... beaucoup.

C'est assez peu car cette opposition représentent la somme de trois personnalités du mouvement et c'est beaucoup car Sarkozy n'a jamais eu à faire face à une opposition interne aussi imposante. Et même si la participation est élevée (57,9%), il n'en reste pas moins que plus de 110.000 militants n'ont exprimé aucune préférence. Ou bien n'ont manifesté aucun soutien.

Le plus dur reste maintenant à faire : le rassemblement

En réalité, la tâche de rassemblement que s'est assignée Sarkozy au soir de sa victoire ne vas pas être aisée à réaliser. Au pôle de résistance que constitue désormais le score de Le Maire se sont ajoutées les réactions distantes des prétendants à la primaire présidentielle : Juppé, Fillon et Bertrand. Le score de l'un et l'attentisme des autres ne préfigurent pas un amour fusionnel.

Au contraire, ce résultat électoral ouvre une ère de cohabitation au sein du parti. Au mieux, Sarkozy va parvenir à constituer une équipe de direction qui englobera tout ou partie de ses opposants, ce qui ne paraît pas être l'hypothèse la plus probable. Cet attelage dans lequel les acteurs se regarderaient en chiens de faïence se révélerait rapidement pour ce qu'il serait : une pure fiction.

Au pire, il ne réussira pas à provoquer cette coagulation ou ne voudra pas la faire, préférant se consacrer à la constitution d'un nouveau parti entièrement à sa main, et tous les acteurs resteront alors l'arme au pied dans une guerre souterraine qui ne dira pas son nom. Dans les deux cas, cette cohabitation risque d'être meurtrière.

Publié par Olivier Biffaud / Catégories : Actu