La BD de la semaine : "Imbattable", le super-héros qui dynamite les codes (et les cases)

Quand vous avez lu le titre, un frisson d'horreur a parcouru votre échine. "Oh non, pas ENCORE une BD sur des mutants en slip moulant, avec des capes fluo et des masques ringards ! Je fais une overdose de ces âneries DC ou Marvel, je serai près à payer une fortune pour être téléporté(e) dans les années 80 quand cette débauche d'effets spéciaux et de scénarios débilitants n'existait pas". Souriez : Imbattable est pour vous.

Quand vous avez lu ces quelques lignes, un nouveau frisson d'horreur a parcouru votre échine : "Non, mais attends, c'est quoi cet ersatz de Superdupont ? Mis à part Fox-Boy, les super-héros sauce franco-belge sont des caricatures des vrais héros américains. C'est vraiment le signe qu'on n'a pas la culture de la série BD en France. La preuve, la BD qui se vend le mieux dans ce pays, c'est une resucée de Blake et Mortimer." Souriez : Imbattable est aussi pour vous. Et pas uniquement parce que, comme dans Deadpool, le héros a conscience d'être le héros d'une bande dessinée.

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De quoi ça parle ?

Imbattable affiche la couleur : "le seul véritable super-héros de bande dessinée", c'est lui. En effet, le super-pouvoir du personnage créé par Pascal Jousselin est de pouvoir passer d'une case à l'autre dans la page. Si ça va sans doute compliquer une éventuelle adaptation au cinéma (soyons fous !), le rendu sur les 44 pages de l'album est jubilatoire. Imbattable lance des tartes à la crème qui atterrissent sur le visage du maire véreux de la ville... installé dans sa voiture, deux strips plus bas. Il déjoue les plans maléfiques d'un savant fou qui élabore un virus tueur en sautant depuis son jardin, avec sa tondeuse à gazon, dans la case d'en-dessous, et dans le microscope du démoniaque scientifique.

Histoire de corser le tout, Imbattable doit affronter des ennemis qui disposent aussi de super-pouvoirs jouant avec les codes de la BD, dont le redoutable Plaisantin (sans doute le cousin germain du Joker) qui traverse les pages.

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Pourquoi on adore ?

Lire Imbattable est une expérience à part entière. On se surprend à essayer de voir à travers les pages pour guetter les apparitions du Plaisantin. On redouble de vigilance pour ne pas louper l'objet qu'Imbattable s'envoie dans le futur, deux strips plus loin, pour redresser une situation compromise. Si votre album a l'air déchiré page 29, c'est normal, c'est un coup du savant fou.

L'album de Pascal Jousselin s'inscrit dans le mouvement Oubapo (ouvroir potentiel de bande dessinée) qui joue avec les codes du neuvième art, petit frère de l'Oulipo qui sévit lui en littérature. Le roman La Disparition de Georges Pérec sans le moindre "e", c'est ça. La BD Cercle vicieux d'Etienne Lécroart, qui peut se lire aussi bien en commençant par le début que par la fin, en formant deux histoires différentes, c'est aussi ça. Cerise sur le gâteau, c'est un album véritablement tout public, que vous pouvez offrir officiellement au fiston pour mieux vous bidonner en cachette à la nuit tombée.

Autre bonne nouvelle, on ne devrait pas attendre cinq ans pour s'offrir le tome 2, Pascal Jousselin ayant déjà une vingtaine de pages en stock.

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Imbattable - Tome 1 : Justice et légumes frais, de Pascal Jousselin, éd. Dupuis, 48 p., environ 11 euros.