"True Detective" : pourquoi la saison 2 risque d'être décevante

Peut-on réussir un plat exquis en conservant la recette mais en changeant tous les ingrédients ? Ce n'est pas l'intitulé de l'épreuve de philo du bac option cuisine, mais le casse-tête qu'ont dû résoudre les créateurs de True Detective. Car, en affirmant dès le début de la diffusion de la série que chaque saison serait complètement indépendante entraînant ainsi systématiquement un changement d'acteurs, d'environnement et d'intrigue, ils se sont privés d'une base solide consécutive à la réussite de la première saison.

Nic Pizzolatto, créateur du show pour HBO, a dû ainsi partir d'une page blanche pour la suite de sa série et renouveler complètement son casting. Pour le meilleur ? Ou pour le pire ? Pop Up liste les éléments qui font que l'on craint d'être déçu par cette saison 2, diffusée lundi 22 juin sur OCS.

Parce que Matthew McConaughey n'est plus là

Rarement un acteur n'avait autant illuminé une série. En choisissant un Matthew McConaughey, pourtant au creux de la vague depuis plusieurs années à Hollywood, Nic Pizzolatto a eu le nez fin (ou la main heureuse). Par sa présence magnétique et son regard désespéré, l'acteur texan a largement contribué à la réussite de la saison une en incarnant le détective Rusty Cohle. Une prestation époustouflante, qui lui a permis de relancer complètement sa carrière, mise en valeur aussi par la présence de Woody Harrelson à ses côtés dans le rôle de son coéquipier au bon sens familial à géométrie variable.

Pour la saison 2, HBO a tenté à nouveau le coup de l'acteur talentueux au creux de la vague en recrutant Colin Farrell. A l'image de Matthew McConaughey, l'Irlandais a connu un début de carrière en fanfare (Minority Report, Le Nouveau Monde...) avant de disparaître peu à peu des radars avec des films de plus en plus quelconques (Total Recall, Un amour en hiver).

Une bonne idée sur le papier même si les premiers teasers ne nous ont pas convaincus avec un Colin Farrell habitué à cabotiner lors de ses derniers films, qui incarne un flic corrompu et moustachu. Sans oublier qu'il devra forcément endurer les comparaisons avec Matthew McConaughey. Il confiait d'ailleurs à Première en mai qu'après avoir vu la première saison il n'avait "surtout pas envie participer à la deuxième saison ! Comment rivaliser avec ça ? Je sais très bien que tout le monde nous attend au tournant (il mime un type en train d’aiguiser un couteau)."

Le reste du casting soulève aussi des questions, car, si le choix de Taylor Kitsch et de Rachel McAdams pour incarner deux flics torturés est intéressant, difficile en revanche de comprendre pourquoi les créateurs du show ont enrôlé Vince Vaughn pour incarner un parrain local, l'acteur étant généralement habitué aux rôles comiques un peu gras. Un pari risqué qui pourrait s'avérer être "une erreur de casting" comme le craint Télérama.

Parce que ce n'est plus le même réalisateur

C'est la deuxième grosse inquiétude qui pèse sur la saison 2 de True Detective. Réalisée par Cary Fukunaga, la première saison bénéficiait d'une mise en scène léchée qui collait parfaitement au sujet et à l'environnement – ce bayou lunaire et poisseux – de la série et à l'état d'esprit de ses principaux protagonistes. Le réalisateur était en parfaite harmonie avec son script et ses acteurs et nous offrait même une scène d'anthologie au cours de l'épisode 4 avec une scène d'action en un seul plan-séquence complètement dingue de six minutes.

Le hic, c'est qu'après s'être sérieusement embrouillé avec Nic Pizzolatto, le réalisateur a refusé de s'engager pour une deuxième saison, et c'est Justin Lin qui a réalisé les deux premiers épisodes. Un choix étonnant, car ce dernier est plus connu pour avoir réalisé trois épisodes de Fast and Furious (du 4 au 6) que des œuvres plus... sensibles. De quoi se poser quelques questions tant l'univers de True Detective et celui de la saga de Vin Diesel semble éloignés.

Pas de quoi inquiéter ce cinéaste américano-taïwanais, aujourd'hui âgé de 42 ans, qui a expliqué à Deadline, après avoir refusé de réaliser FF7 qu'il ne pouvait "plus grandir ou progresser en tant que cinéaste. J'avais besoin de plus, d'un point de vue créatif". Et de montrer de l'enthousiasme face au défi qui l'attendait en réalisant la saison 2. "Je suis vraiment ravi d'avoir pu m'attaquer à True Detective, et de travailler avec ces scénarios si exceptionnels de Nic Pizzolatto, qui se lisent comme des romans !" 

Parce que les premières critiques sont (très) mitigées

La marche était haute. Faire mieux que la première saison semblait impossible. Faire aussi bien, difficile. Et donc décevoir, prévisible. Et les premières critiques américaines n'ont pas été particulièrement emballées par les trois premiers épisodes. "Ceux qui s'attendent à quelque chose s'approchant de la magie transmise par le duo Matthew McConaughey-Woody Harrelson devraient immédiatement tempérer leur enthousiasme pour la saison 2 de True Detective, assure ainsi Variety. Peut-être était-ce trop demander à Pizzolatto de nous émerveiller en repartant de zéro avec un nouveau réalisateur et de nouveaux acteurs."

Du côté du New York Times, on se montre moins sévère, même si cette deuxième saison est aussi considérée comme moins intense que la première. "True Detective est une série monochromatique qui se prend au sérieux, mais elle construit du suspense avec finesse et traite avec poésie et finesse la corruption politique et la pourriture urbaine. Cela fait qu'elle est intrigante, mais pas captivante. Mais un second roman est parfois un prélude à un troisième qui est lui vraiment deux fois meilleur."