De la com... en carton.

Au delà de l'affaire, proprement dite, dont a été victime Théo, il y a désormais quelques jours, on le voit bien, un autre problème, apparaît, de manière récurrente, et n'arrange rien à tout cela: la communication.

De mon point de vue, cela n'a jamais été le fort de notre administration. J'ai toujours eu tendance à penser qu'elle ne savait pas montrer de manière positive, le travail de la police.Si la communication autour d'une enquête est actuellement du seul ressort du parquet (je suis, de mon coté, pour une évolution de ce principe, et des textes), il ne m’apparaîtrait pas si inadéquat que la Police Nationale fasse un peu plus savoir ce qu'elle fait.

Alors désormais, non seulement la communication "positive", on ne sait pas la faire, mais on recule encore un peu, puisqu'on en arrive à une communication, non pas passive, mais bien négative. Qui nous fait du tort. Et les exemples ne manquent pas.

La version de l'IGPN sur la thèse du viol "accidentel" dont a été victime Théo

"Accident" ! Dit comme ça, c'est une vraie catastrophe. Combien ont pensé, en lisant le terme accident, le "oups, j'ai pas fait exprès". Comme si la thèse, de ce que l'on sait, défendue par l'IGPN pouvait se résoudre à ça ! N'aurait-il pas été souhaitable de faire oeuvre de pédagogie et d'expliquer un peu plus que ce simple mot ? Rappeler les éléments constitutifs d'une infraction (légal, matériel et moral) et dire qu'il leur semblait, à cet instant de l'enquête, que l'élément moral, l'intention de violer, ne leur apparaissait pas présente? Et même quand cette information est reprise en presse, moquée de tous, personne n'est là pour recadrer le débat. Personne. Pas un mot; on laisse dire. Fail.

"Bamboula... c'est à peu près convenable"

Ces mots, ils sortent de la bouche de Luc Poignant, chargé de communication au sein du syndicat SGP, majoritaire chez les gardiens de la Paix. Il est alors invité de l'émission "C dans l'air", sur France 5. Il est alors question de jeunes de banlieues et policiers qui s'invectivent réciproquement. Et c'est à cet instant qu'il prononce cette phrase! On peut se refaire l'histoire du mot "bamboula" des 50 dernières années, se rappeler que c'était une marque de biscuit, etc... mais non, et mille fois non, i ne s'agit plus, en 2017, de quelque chose de convenable. Il n'y a plus aucun rappel d'humour. C'est clairement une insulte raciste. Et, de ce fait, elle n'a rien à faire dans la bouche d'un policier.

Il y a encore quelques semaines, c'est Nicolas Comte, qui était encore le chargé de communication, et j'avais alors dit, lorsqu'il avait annoncé son départ, que je le regrettais. Il était, selon moi, le meilleur communiquant pour la police; celui qui en parlait le mieux, argumentait le mieux. Il n'aura fallu que quelques semaines pour être conforté.

En ce qui me concerne, Luc Poignant, même si je pense qu'il ne pensait pas cela, qu'il s'est mal exprimé, n'a plus rien à faire à la communication de son syndicat. Il a perdu toute crédibilité. Fail 2.

La dépêche qui salue le sauvetage d'une enfant par la police

C'est la dernière en date. Dimanche, une manifestation de soutient à Théo est organisée à Bobigny. Comme prévu, cette manifestions s'embrase. Dans la soirée, la communication de la Préfecture de Police sort une dépêche à l'attention de la presse. Au milieu de celle-ci, une petite phrase " des effectifs de police ont dû intervenir pour porter secours à une jeune enfant se trouvant dans un véhicule en feu". Quelques heures plus tard, c'est le Bondy Blog qui sort l'info, ce n'est pas la police qui a sorti l'enfant de la voiture, mais un jeune qui quittait la manifestation. Encore une fois, il ne m’apparaît que l'info essentielle réside dans "qui a sorti l'enfant", mais bien qu'elle soit en vie, mais aussi qu'elle a été mise en danger par le comportement d'abrutis, et je pèse mes mots. Pour autant, l'on peut s'interroger sur ce qui a piqué la Préfecture de sortir une telle info! Quelle est l'origine de cette info? Un mauvais compte rendu venu du terrain? une mauvaise interprétation? Que sais-je ! Toujours est-il que c'est une faute, et que, une fois de plus, cela donne le sentiment qu'il y a quelque chose à cacher, ou que l'on fait de la com, et qu'on veut manipuler l'opinion. En ce qui me concerne, je reste persuadé qu'il s'agit d'une erreur, mais c'est mon sentiment personnel. Fail 3.

En somme, voilà trois erreurs de communication commises à des degrés divers, en moins d'une semaine! Çà fait beaucoup, lorsque l'on sait que l'on est dans une période on ne peut plus sensible, et que la "com d'urgence" c'est un métier, comme le traitement en lui-même des urgences.

Qu'on le veuille ou non, que l'on soit d'accord ou pas, qu'on aime ou pas, la communication fait partie intégrante de notre société, et notamment autour de ce qui est "sensible". Il convient donc de faire avec, et se mettre au niveau. Apprendre à faire avec, sans être utilisé. On le voit, rien que sur des affaires dites "sensibles", qui ont un large écho dans la presse, ce sont des syndicalistes qui interviennent en télévision pour parler d'un fait divers. Avec un nombre d'erreurs au mètre carré assez impressionnant.

A quand un véritable officier de communication, autorisé à parler, donner quelques informations de base, sans que l'enquête ne soit mise en péril?

Bref, ce n'est pas notre cœur de métier. Mais, à un moment donné, à l'image de la Gendarmerie Nationale, il va falloir s'y mettre. Y'a du boulot.