Lycée Airbus: une formation de haut vol

On pourrait les prendre pour les ouvriers se rendant à l'usine : tous les matins, Laetitia Caze et Romain Leoccardi, 19 ans tous les deux, badgent pour aller au lycée!

Car les cours ont lieu en plein milieu de la plus vielle usine Airbus, celle de Saint-Eloi, en plein coeur de Toulouse. Romain Leoccardi y est habitué "on traverse une partie de l'entreprise avant d'arriver dans les salles de cours".

Ce matin là, le cours de mécanique a lieu juste à côté des chaînes de production, tous les élèves doivent enfiler leur bleu de travail, et une casquette renforcée, comme sur n'importe quel site de production aéronautique.

Car tous sont en classe de Terminale du lycée professionnel Airbus, justement spécialisé dans les métiers de l'aéronautique: Chaudronnerie, Production mécanique informatisée, Electricité cellule aéronef, ou encore Mécanique cellule aéronef, la filière qu'ont choisie Laetitia et Romain. Carlingues d'avions reconstituées, outils de haute précisions : les ateliers reproduisent les mêmes conditions que sur un site d'assemblage Airbus.

Créé en 1949, le lycée Airbus est l'un des plus vieux lycées d'entreprise de France. 5000 compagnons en sont sortis. Si les premieres promotions étaient exclusivement masculines, le secteur se féminise doucement: ainsi, l'établissement accueille aujourd'hui 10% de filles qui, comme Laetitia, n'ont pas peur de se frotter à la mécanique de haut niveau. D'ailleurs pour son professeur Michel Gorsse, lui-même salarié Airbus, les filles sont de précieuses recrues:" l'avantage des filles c'est qu'elles sont tempérées, très minutieuses, et dans le métier on demande justement beaucoup de minutie".

Les élèves entrent sur concours, niveau troisième: 600 candidats, pour 120 reçus. Certains sont venus de loin comme Romain Leoccardi, qui a quitté sa famille à La Réunion pour suivre sa passion : 

"en face d'une des façades de ma maison, il y avait l'aéroport de La Réunion, étant petit les avions ça m'a toujours attiré. Etre ici c'est un rêve qui se réalise petit à petit".

La garantie d'un emploi

Ce qui fait rêver les 360 élèves du lycée, c'est aussi la garantie d'un emploi. 95% d'entre eux seront embauchés une fois bacheliers, au sein d'Airbus ou de ses partenaires aéronautiques, un soulagement pour Florian Pimprenelle, élève de terminale: " On nous offre un CDD, puis un CDI, et puis ensuite à nous de nous tenir". Sa voisine confirme: "Ca rassure".

Maths, Anglais, Français, les élèves suivent les mêmes cours qu'un lycée professionnel normal, et alternent 15 jours en entreprise et 15 jours en classe. Le lycée suit le programme de l'Education Nationale, à un détail près : les exercices pratiques collent au projet de la maison. " Nous, notre but ce n'est pas de les envoyer chez d'autres constructeurs, reconnaît Michael Boizumault, l'un des enseignants, on les forme vraiment pour nos chaînes d'assemblage".

L'esprit d'entreprise

Et pour s'assurer que les élèves n'iront pas faire un tour chez la concurrence, ils sont tenus de respecter, intégrer l'esprit Airbus. Ainsi, la pause déjeuner a lieu au milieu des salariés, dans la cantine de l'usine. Oubliée, l'insouciance de la vie lycéenne : " ici, on sait déjà que c'est strict, explique Florian Pimprenelle, il y a l'entreprise, il y a les salariés, il faut un minimum de respect, donc ça se sent". Maxime Barolin, également en terminale, a mis du temps à s'y acclimater les premiers jours :"il faut se raser, les portables c'est interdit...au début on se fait prendre, et après les premières sanctions...ben on évite".

Apprendre directement sur un avion

Les terrains d'apprentissages des futurs bacheliers sont les différents sites d'assemblage et de production Airbus, et parmi eux le fleuron de l'avionneur : l'A380, assemblé à Toulouse. Un mastodonte volant à 400 millions d'euros. Laetitia Caze y travaille en alternance depuis un an :

" C'est impressionnant, il est énorme cet avion! C'est grandiose pour nous, au début je faisais très attention j'avais peur de l'abîmer".

Comme elle,100 élèves sortent chaque année de ce lycée.  A première vue, c'est une goutte d'eau parmi les 3000 recrutements d'Airbus cette année, mais en réalité ces apprentis sont une manne que l'entreprise peut utiliser au gré de ses contrats, comme l'explique Thierry Barril, Directeur des Ressources Humaines d'AIRBUS-EADS : "Ils ont la connaissance de l'entreprise, du produit, de nos procédés car ils approchent nos produits pendant leurs études, et puis dans leur cursus de formation ils ont une approche très aéronautique que l'on ne trouve pas systématiquement à l'extérieur, et ça c'est un gros avantage".

En attendant le CDI, Laetitia Caze révise assidument son bac. Dans trois mois, si tout va bien, elle volera de ses propres ailes. C'est même elle qui les construira.

 Voici le sujet diffusé (avec les images de Vincent Barral)

 

Publié par Jihane Benzina / Catégories : Actu