La Big de Grosse Belle-Mère

Faire les vitres les jours de pluie. © Eve Omel, 2015

Faire les vitres les jours de pluie. © Eve Omel, 2015

Faire les vitres les jours de pluie

C'est toujours ainsi, je ne me "lance" dans les carreaux que quand je n'ai pas ma fille et que je n'ai pas mieux à faire, toujours les jours de pluie en somme. S'allonger dans l'herbe et ne rien faire, rien du tout, c'est le truc qui n'arrive jamais quand on est enfin seul. Un peu comme les lundis au soleil de la chanson. Alors autant faire les vitres les jours de pluie.
Pour une fois en plus, je ne souhaitais pas absolument être 'enfin seule'.

Une hirondelle

  Ma fille est revenue de chez son père dans une forme olympique alors que je redoutais le pire. Grandie et fière d'avoir pour la première fois pris l'avion toute seule, bronzée d'avoir plongé dans les piscines au grand air. Merveille des merveilles, l'enfant qui allait mal s'est refait une santé en un clin d’œil.
Revenue et déjà repartie avec ses cousins chez leur grand-père paternel, au bord de la mer, je la vois comme une hirondelle qui traverse les continents à tire d'aile.

Le big de gros dossier "belle-mère"

  Ça me fait vraiment plaisir de la voir en forme après ce "coup de mou" brutal qui m'avait affolée. Les coups de mou des enfants, ils sont terribles car ils sont violents, beaucoup plus que chez les adultes qui ont en vu d'autres et qui ont une carcasse plus ample, plus large, plus forte à supporter les blessures. Ma fille s'est pris un coup de bambou du réel, qu'elle n'a pas pu encaisser toute seule. Oh rien de très exceptionnel, les classiques des enfants de parents séparés qui refont leur vie... Avec une belle-mère très jeune, qui n'a pas d'enfant, et qui n'y comprend rien. Hélas, que faire, que dire, n'est-ce pas.

Que dire que faire

En vérité, il y a dire quand l'enfant sensible s'effondre. Au retour d'un weekend qu'elle a passé avec son père, de passage à Paris. Quand l'enfant que je récupère le lundi soir a la mine défaite et ne peut pas même esquissé un sourire pour nos retrouvailles. Quand l'école appelle affolée car l'enfant dit qu'elle veut mourir. Quand je suis convoquée par la psy scolaire le lendemain. Quand ma fille est convoquée chez la psy scolaire dans la foulée. Quand je suis obligée de convoquer le père qui est encore à Paris pour une explication à trois avec notre enfant qui craint de lui dire tout ce qu'elle a pourtant réussi à me dire de son immense déception. Sur la belle-mère qui était La Surprise que son père avait programmé dans le plus grand secret pour ce weekend à Paris. La belle-mère qui a déjà prouvé par le passé (et pas seulement à moi) son inaptitude à s'occuper de notre enfant. La belle-mère qui est incapable de comprendre qu'elle n'est jamais une bonne surprise. Sur le père qui est définitivement à côté de la plaque et qui déçoit tellement sa fille qu'elle en déprime.

"Un weekend à Paris avec Papa!" Elle en sautait de joie, elle en riait de bonheur, elle dansait. Et moi avec. Et puis le coup de bambou du réel, la tombée du placard, la dégringolade dans l'escalier jusqu'au troisième sous-sol. L'envie de mourir.

Moi ça me donne plutôt des envies de cassage de gueule en règle, et des envies de pleurer.
Ça réveille aussi des réflexes de protection, des gestes de mère couveuse, des peau-à-peau et des nuits avec l'enfant dans son lit pour qu'il se sente en sécurité, des chansons, des bercements, des trucs qu'on ne pensait plus jamais avoir à faire.

Menace du JAF: CQFD

Alors voyez-vous, j'aurais volontiers annulé les vacances chez son père. C'était pas l'envie qui manquait. Et puis non, j'ai réfléchi: la fin de l'idéalisation est un mal pour un bien. J'ai simplement raccourci les vacances. Et j'ai écrit à son père deux trois menaces discrètes si jamais notre fille revenait dans le même état que le fameux weekend à Paris: Le JAF.

CQFD car l'hirondelle est de retour.