Un anniversaire avec trois francs six sous

chagrin d'enfant. © Eve Omel, 2014.

Ce weekend-là de septembre, un épisode à la fois cocasse et pathétique m’a comme on dit rappelée à la réalité.

Septembre pas tendre.

Tout parent sait que le mois de septembre est un cauchemar financier : on s’est fait plaisir pendant les vacances d’été et il faut maintenant rhabiller les enfants pour l’automne, acheter les fournitures et inscrire sa progéniture qui au sport, qui à la musique, qui aux deux, dégager des salaires pour les baby-sitters et… bien entendu payer ses impôts. Bref, je ne fais pas exception mais mon seul salaire n’y suffit pas. Et quand l’anniversaire de l’enfant arrive, il n’est plus temps de regretter les cornets de glaces des vacances, il est simplement l’heure fatidique de vivre le refus de paiement à La Grande Récré.

 Grande Récré.

J’avais prévu ce samedi-là une fête d’anniversaire pour les huit ans de ma fille avec sept de ses copains. Impossible avant le samedi matin de dégager un créneau « course » pour la dînette et les pochettes-surprises, j’entraîne donc mon enfant dans cette grande surface pour moins de 15 ans et/ou parents hystériques, lieu délirant s’il en est, antre de l’opulence et du jeu standardisé, nous avions réfléchi ensemble à un programme qui nécessitait d’acheter « quelques bricoles ». J’arrive à la caisse avec les fameuses bricoles qui s’annoncent hors de prix, je donne ma carte bleue qui refuse de passer (on est alors le 13 du mois) je demande qu’on me mette les bricoles de côté le temps d’aller retirer de l’argent : distributeur en panne (mais on ne serait pas allé bien loin de toute façon), enfant qui comprend que ça sent le roussi sur l’anniversaire, coup de fil à la banque ouverte le samedi matin pour racler les fonds de tiroirs puis écouter sueur sur la tempe la phrase redoutée : « chère Madame, ces transactions ne seront effectives que lundi matin », qui sonne comme un glas. Exit les bricoles. Enfant inconsolable et moi le cœur fendu. Enfin pas trop longtemps parce que ce jour-là sept gosses allaient débarquer chez moi quatre heures plus tard.

 

Au galop.

Tout ce bazar nous avait conduits à la fin de la matinée et au triple galop dans les rues, j’ai expliqué à ma fille qui n’a même pas fait semblant d’y croire qu’au fond on s’en fichait de se prendre la honte à La Grande Récré et je lui ai promis un bel anniversaire : nous ferons nous-même les pochettes-surprises avec du papier crépon, du scotch et du ruban de couture ; idée à laquelle elle a aussitôt adhéré et qui a permis de gommer à mesure du galop la morosité des minutes précédentes. Combien de billes avait-elle dans sa trousse ? « Plein et puis aussi des scoubidous ». C’était parfait. « Oui mais les jeux, maman ? », Quoi les jeux ?, n’avait-elle jamais joué à mordre une pomme dans une bassine d’eau ? Le truc le plus drôle de la terre. La pièce dans la farine, non plus ? Alors, nous nous amuserons bien ! Moins d’un euro pour la farine, moins de deux pour un sac de pommes en magasin discount, de quoi faire un gâteau au yaourt - pommes en plus des deux ateliers qui tiendraient les enfants une partie de l'après-midi. Le reste puisqu’il faisait beau s’inventerait au square de la mairie. Ce qui fut fait, dans la bonne humeur et même la joie.

 

A toute allure dans les rues. © Eve Omel, 2014.

Mieux fait ailleurs.

Pourquoi n’y avoir pas pensé plus tôt, faire simple quand les moyens manquent ? Sans doute un léger déni de réalité, la précarité dans laquelle je plonge gentiment chaque année est suffisamment effrayante pour que j’évite d’y réfléchir trop. Et Penser au rabais l’anniversaire de mon enfant ne m’avait pas encore effleuré l’esprit, j’ai des résidus de réflexe bourgeois, c’est vrai, on ne se refait pas comme ça.

Après cet épisode somme toute assez drôle, j’ai cherché sur le Web *anniversaire enfant pas cher*, évidemment, il y a tout ce qu’il faut et du mieux fait que chez moi. Cliquez donc sur Si tu veux jouer, un blog admirable tenu par Madeleine Deny.