De Sarkozy à Grospiron, le business des conférenciers


Pour les vêtements ou pour les meubles, on peut faire son choix sur catalogue. Mais savez-vous qu’il existe aussi ce type de catalogue pour les célébrités ? Des sportifs, des économistes et même des hommes politiques sont très bien payés pour faire des discours. L’œil du 20h s’est lancé dans un décryptage du business des conférenciers.

Souvenez-vous du skieur champion olympique à Albertville, Edgar Grospiron. On peut "louer" ses services pour 6.500 euros l’heure. L’ancien champion olympique anime en moyenne une conférence par semaine. Et pour réserver le sportif, rien de plus simple. Sur internet, Edgar Grospiron se situe au milieu d’un catalogue de conférenciers prestigieux allant de l’économiste Jacques Attali au chef étoilé Thierry Marx en passant par le milliardaire Richard Branson ou même l’acteur Michael Douglas.

73.000 euros pour François Fillon

A Londres, l’une des agences les plus actives nous a ouvert ses portes. Pas moins de 3.000 conférenciers y sont référencés dont certains vous sont familiers tels l’ancien Premier ministre anglais Gordon Brown ou l’ex chancelier allemand Gerhard Schröder. Côté Français, des hommes et des femmes politiques donnent aussi des conférences à l’image de Michèle Alliot-Marie, Dominique de Villepin ou François Fillon.

Nous nous sommes fait passer pour les organisateurs chinois d’une grande conférence au printemps prochain. Quelques mails et coups de fil plus tard, nous avons reçu plusieurs propositions. Pour Yanis Varoufakis, le héraut de la gauche radicale européenne, c’est 55.000 euros la conférence. Bernard Henri Lévy est facturé environ 88 000 euros. Pour Rama Yade, Bernard Kouchner, Daniel Cohn Bendit ou Michèle Alliot-Marie, les agences nous demandent entre 40 et  50.000 euros. François Fillon est facturé 73.000 euros la conférence mais cela ne correspond pas forcément à ce qu’il ne gagne à la fin de sa prestation. Selon ce dernier, l’agence qui nous a fourni le devis prend une commission importante.

Chez les Français, la palme du devis le plus salé revient à l’agence américaine qui représente Nicolas Sarkozy : 160.500 dollars, soit un peu plus de 142 000 euros. Pour l’ancien Président français, il faut aussi réserver un jet privé pour les vols intérieurs chinois : compter 140.000 dollars de frais de transport et de traduction pour lui et ses 5 accompagnateurs. Enfin, pour plus de discrétion, voilà ce que son agence américaine nous a conseillé au téléphone : "Je crois qu’il sera difficile pour lui d’accepter si vous invitez la presse française."

Nous avons contacté le service de presse de Nicolas Sarkozy. Nous n’avons eu aucun commentaire sur les activités professionnelles de l’ancien Président de la République. Son équipe a seulement tenu à préciser que l’ancien Président ne tire aucun revenu de ses fonctions à la tête des Républicains.

A la suite de la diffusion du reportage, Daniel Cohn-Bendit a consacré sa chronique radio à notre reportage. L'émission est à écouter ci-dessous.

 

Poutine, un président omnisport

Hier soir, sur la glace de la patinoire olympique de Sotchi, le meilleur joueur de Hockey portait le numéro 11... et c'était Vladimir Poutine. Pour fêter ses 63 ans, le président russe a marqué non pas un, deux ou trois mais sept des quinze buts de son équipe de hockeyeurs vétérans.

Vladimir Poutine aime montrer ses muscles. Pas seulement par amour du sport. En 2007, le monde découvre Vladimir Poutine torse nu, chasseur et cavalier émérite à travers les plaines de la toundra. Sur les tatamis, Poutine judoka met tout le monde au tapis, son grade .ceinture noire 8eme dan, plus que fort que Teddy Riner. Et quand il essaie une Formule 1, ou qu'il prend les commandes d ‘un ULM, le président russe va plus vite et plus haut que le autres.

Mais quel est le sens de cette vie de président sportif ? Tour a tour hockeyeur, judoka, pilote de Formule 1 ? Une vie dont chacun des épisodes est immortalisé en images par l’ agence de presse officielle du pouvoir russe. Pour notre ancien correspondant a Moscou Alban Mickosy, cette communication est celle d’une rupture et d’ un renouveau.

Mais parfois la ficelle est un peu grosse. Dans la série archéologue sous marin, le président est filmé en train de découvrir dans la vase des amphores vieilles de quinze siècles mais sur elles, ni coquillage ni algues. Bizarre, le Kremlin sera obligé d’ admettre qu'elles avaient été nettoyées et placées au fonds de l'eau pour la photo officielle. Comme quoi en matière de propagande, il faut se méfier des images trop parfaites

Lobbies : la loi santé en eaux troubles ?

Un lobby s’est récemment infiltré dans le projet de loi Santé. Derrière le cercle des eaux minérales naturelles - CEMIN - auquel adhèrent des parlementaires de droite comme de gauche se cache une agence de communication spécialisée dans le lobbying : une agence qui a pour client la chambre syndicale des eaux minérales qui représente les plus grandes marques.

Dans le cadre de la loi santé, le cercle des eaux minérales naturelles voulait attirer l'attention sur un problème de santé publique : « La canicule de 2003 avec ses 15 000 décès en 20 jours nous a fait prendre conscience de la nécessité d’anticiper ces périodes… une éducation à une bonne hydratation quotidienne est primordiale… » Et pour intervenir dans la rédaction de la loi, le club rédige des amendements clé en main.

Au Sénat, 28 élus ont repris au moins l’un de ces amendements pré-rédigés. A l’Assemblée, ce ne sont pas moins de 32 députés qui les ont utilisés. Les élus connaissaient-ils l’origine industrielle de leurs amendements ? Ceux que nous avons interrogés le savaient et cela ne semble pas leur poser de problème. Les industriels de l’eau minérale estiment-ils avoir agi en toute transparence ? Son agence de communication - elle - n'a pas souhaité répondre à nos questions. Mais visiblement, les efforts de l’industrie n’ont pas suffi. Aucun des amendements proposés par les défenseurs de l'eau minérale n’a finalement été retenu dans la loi.

Réfugiés : les personnalités en accueillent-elles vraiment ?


Le Pape François, Eric Cantona, le chroniqueur radio Franck Tanguy et Charles Aznavour ont un point commun, ils se sont tous prononcés pour accueillir des migrants. Un mois après leur annonce, l’œil du 20h a voulu savoir si ces personnalités avaient tenu leur engagement.

Pour Charles Aznavour, la promesse tient toujours mais elle est reportée après sa tournée. Eric Cantona se disait lui aussi dès le 9 septembre prêt à ouvrir les portes de son domicile (vous pouvez voir l'intégralité de l'interview de Cantona sur le site du Parisien). Début octobre, l’ancien footballeur n’avait toujours pas accueilli de migrants chez lui. Selon son entourage, c’est plus compliqué que prévu : « La démarche est enclenchée. Ça passe par une association et les préfets, ce n’est pas aussi rapide que ça ».

Le chroniqueur radio Franck Tanguy était également très clair au micro de RMC. Nous l’avons contacté, ce dernier affirme ne pas avoir encore de migrants chez lui mais il assure avoir démarré le processus : « Pour moi c’est une démarche de long terme. J’ai avancé en ayant pris contact avec une association, j’ai manifesté mon désir de faire ce que j’ai dit. » Seul problème, l’association en question n’a pas trouvé le nom du chroniqueur sur la liste des accueillants. Pourquoi ? A cette question, nous n’avons pas obtenu de réponse de Franck Tanguy avant diffusion du sujet. Ce dernier a cependant précisé le lendemain qu'il comptait honorer son engagement.

Quant au pape François, ce dernier a lancé un « appel aux paroisses, aux communautés religieuses à accueillir une famille de réfugiés ». Cet après-midi, l’épiscopat nous a transmis des chiffres : depuis le printemps dernier, environ 300 migrants ont été accueillis dans une douzaine de diocèses sur les 95 que compte la France.

Logement : où est passé le O du DALO ?


En 2007, le gouvernement de Dominique de Villepin avait promis de résoudre le problème du mal-logement en France en appliquant le principe du droit au logement opposable (DALO). A priori, l’esprit de la loi est très clair : un droit opposable, cela veut dire qu’on peut forcer l’Etat à le faire appliquer. En réalité, les procédures peuvent prendre des années et l’Etat se paie des amendes à lui-même. Certes, l’argent des pénalités va dans un fonds qui sert à reloger des familles, en priorité des dossiers DALO. Mais ce système d’astreinte n’est pas très contraignant comme le souligne un rapport sénatorial qui date de 2012.

Un manque de 800 000 logements

A l’heure actuelle, près de 60 000 dossiers DALO reconnus comme prioritaires sont encore en attente et selon la fondation Abbé Pierre, il manque actuellement 800 000 logements en France.

Petite pression sur la presse régionale ?

Ces derniers jours, à la une de tous les journaux y compris de la presse régionale, impossible d’échapper au scandale Volkswagen. Pas franchement une bonne publicité pour la marque… Volkswagen fait justement beaucoup de promotion dans la presse. Alors quand un gros annonceur est pris dans un scandale, est ce que cela peut changer la physionomie de vos journaux ?

Ce n’est pas un scoop, la presse écrite se porte mal. Ainsi pour être plus forts, les principaux quotidiens régionaux se sont regroupés au sein d’une régie publicitaire unique dénommée Régie 366. D’après un mail révélé par le Canard Enchaîné, le patron de Régie 366, Stéphane Delaporte a trouvé un moyen de limiter les risques de pertes de revenus publicitaires. « Si nous pouvons assurer formellement  à l’agence et à la marque que lors des dates de parutions des 6, 8 et 10 octobre prochain, il n’y aura aucun article relatif à la crise VW, nous conserverons les investissements… soit 315 000 euros. »

Source Canard Enchaîné

Nous avons contacté la vingtaine de destinataires de ce mail. La plupart n’ont pas voulu nous répondre. D’autres affirment n’avoir jamais reçu le message de Stéphane Delaporte. Mais pour ceux qui l’ont reçu, deux types de réactions : à Ouest-France et à Sud Ouest, on ne voit aucun chantage. Les Dernières Nouvelles d’Alsace, le Télégramme de Brest, Paris Normandie et La Montagne affirment avoir dit “non” à cette pression des annonceurs. Stéphane Delaporte n’a pas souhaité nous rencontrer. Quant à Régie 366, un communiqué nous a été adressé pour réfuter toute pression sur les journaux. De son côté, Volkswagen et son agence de communication (voir communiqué ci-dessous) nie toute velléité de censure de sa part.

Bienvenue au "cimetière" des trains


Que deviennent les trains qui ne circulent plus ? Sont-ils stockés, récupérés par des collectionneurs, vendus à des pays étrangers ? En réalité il existe en France des « cimetières » où stationnent des dizaines de locomotives fret de la SNCF dont certaines sont en état de fonctionnement selon des cheminots que nous avons rencontrés. A la gare de triage de Sotteville-lès-Rouen (Normandie), parmi les 400 engins de fret qui y sont entreposés, 43 machines pourraient encore circuler sur le réseau selon un document interne (inventaire réalisé en avril dernier). Réunion du comité d'établissement régional

Contactée, la SNCF n’a pas souhaité nous accorder d’entretien filmé et a préféré répondre à l’écrit : “Il s’agit de locomotives anciennes ayant un nombre très élevé de kilomètres au compteur. Il n’est pas possible de les louer ou de les vendre”. Pourtant, certains véhicules ont été revendus au Maroc. La SNCF aurait-elle refusé de céder son matériel usagé à ses concurrents français ?

Alertés par un article du Canard Enchaîné, la ministre de l’Ecologie, Ségolène Royal et le secrétaire d’Etat chargé des transports, Alain Vidalies ont demandé des comptes au patron de la SNCF. Le service de presse de la SNCF a réfuté toute volonté de “protectionnisme”. Selon la société, toutes les motrices de Sotteville sont inutilisables. Et si certaines ont été rénovées, c’est pour mieux les radier. Comme quoi, les voies de garage de la SNCF sont parfois impénétrables.

Thierry Braillard, le ministre logé par les Hôpitaux de Paris

La semaine dernière, l’œil du 20h passait au crible les étranges attributions de logements des hôpitaux de Paris (AP-HP). Plusieurs cas nous avaient surpris dont celui d’un avocat au barreau de Paris et d’une directrice de casting spécialisée dans les programmes de télé-réalité, logés dans les immeubles prévus pour le personnel de l’AP-HP sans jamais y avoir travaillé. Le gouvernement a décidé de prendre les choses en main en proposant dans son projet de loi de modernisation du système de santé un amendement facilitant la résiliation des baux de l’AP-HP. Mais en rédigeant cet amendement, le gouvernement savait-il qu’un de ses ministres pourrait être lui aussi concerné ?

« Cette solution répond à un souci d’économie »

Il s’agit de Thierry Braillard, secrétaire d’Etat aux sports nommé en 2014. Selon nos informations, les hôpitaux de Paris lui ont accordé un appartement dans un bel immeuble de 88 mètres carrés situé à deux pas du jardin du Luxembourg. Thierry Braillard n’a pourtant pas travaillé à l’AP-HP, il est avocat spécialisé en droit social. Sur sa déclaration de patrimoine, on peut seulement lire qu’il possède une maison évaluée à 400 000 euros, mais elle est située à Lyon. Comment le secrétaire d’Etat aux sports s’est-il vu attribuer un appartement des hôpitaux de Paris ? « Il y a une convention passée entre l’Etat et l’AP-HP pour mettre à disposition des logements de fonction pour les ministres », nous a-t-on répondu au cabinet du secrétaire d’Etat aux sports. « Cette solution répond à un souci d’économie : les logements loués dans le parc public sont moins chers que dans le parc privé. »

"Il n'y aura pas déménagement du ministre, a fait savoir le secrétariat des Affaires sociales (ministère de la Santé), la convention signée par l'Etat avec l'AP-HP pour ce logement n'est pas concernée par l'amendement". Quant à Thierry Braillard qui n'a pas souhaité répondre à nos questions, ce dernier s'est fendu d'un tweet après la diffusion du sujet : "je vous confirme que les ministres ont un logement de fonction à Paris. C'était pas la peine de faire peur à la gardienne ! Ridicule."

Femmes voilées à la CAF, l’histoire d’un photomontage

De réseaux sociaux en réseaux sociaux, c’est l’histoire d’une photo qui a été postée par la députée européenne Mylène Troszczynski (FN) sur laquelle l’œil du 20h a décidé de se pencher. On y voit un groupe de femmes en voile intégral massées devant la caisse d’allocations familiales de Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). L’élue précise que le cliché a été pris le 9 décembre 2014.

Nous sommes donc allés à Rosny-sous-Bois devant la caisse d’allocations familiales. Entre l’image twittée et la caisse d’allocations familiales, rien à voir. Devant le bâtiment, les barrières sont complètement différentes. Normal, la supposée photo a été prise à Londres, dans le quartier de Westminster. Le bâtiment de la CAF est en fait un commissariat de police. Mylène Troszczynski voulait dénoncer le non-respect de la loi sur le port du voile intégral avec cette photo. L’a-t-elle truquée avant de la poster hier ? La réponse est non car ce photomontage circule depuis près d’un an notamment sur les réseaux sociaux d’extrême droite. Pour Marine Le Pen, "l’erreur est humaine". Nous aurions bien voulu en parler directement avec Mylène Troszczynski mais pas de chance, aujourd’hui l’Eurodéputée était en voyage à Saint-Pétersbourg. On attend ses photos.

L'Arabie Saoudite est-elle experte en droits de l'homme ?

Un pays peut-il être à la fois membre du conseil des droits de l’homme de l’ONU et pratiquer la décapitation de ses dissidents ? En nommant l’ambassadeur de l’Arabie Saoudite, Fayçal Bin Hassan Trad à la tête d’un groupe consultatif qui propose des experts chargés d’enquêter sur les violations en matière de droits de l’homme, l’ONU répond par l’affirmative.

Cette semaine pourtant, l’Arabie Saoudite se retrouve sur le banc des accusés. Ce sont justement des membres de l’ONU qui l’exhortent à renoncer à une exécution, celle d’un jeune mineur inculpé pour avoir manifesté contre le régime saoudien. Ce dernier, Ali Mohammed al-Nimr appartient à la communauté chiite et son oncle est un opposant politique. En le condamnant à mort alors qu’il était mineur au moment des faits, l’Arabie Saoudite ne respecte pas l’un de ses rares engagements internationaux en matière de droits de l’Homme. Ce soir, la vie d’Ali Mohammed Al-Nimr n’est pas entre les mains des défenseurs des droits de l'homme mais entre celles du roi d’Arabie Saoudite. Sur l’ordre d’exécuter le jeune homme, il ne manque plus que sa signature.