Mariage pour tous : l'examen de la loi avancé, les anti évoquent "guillotine" et "guerre civile"

(CHRISTIAN HARTMANN / REUTERS)

Le gouvernement prend tout le monde de vitesse en accélérant son calendrier sur le mariage pour tous. Le jour de l'adoption du texte par le Sénat, il a décidé de le faire revenir en seconde lecture à l'Assemblée nationale plus vite que prévu. Le mariage pour tous est inscrit à l'ordre du jour dès mercredi prochain, le 17 avril alors qu'initialement, la loi devait être réexaminée par les députés fin mai.

"Après ces débats approfondis et de qualité, le gouvernement souhaite que les articles restant en discussion soient soumis à l'Assemblée dans les meilleurs délais", explique le ministre des Relations avec le Parlement, Alain Vidalies. Le gouvernement espère un vote "conforme", c'est-à-dire que les députés votent le texte tel que le Sénat l'a adopté. Dans ce cas, le mariage pour tous serait définitivement adopté par le Parlement. Une hypothèse "plausible et souhaitable" aux yeux du président de la Commission des lois de l'Assemblée nationale , le député PS Jean-Jaques Urvoas. Dix huit articles, "d'importance inégales" à ses yeux, restent en discussion dans la loi car les articles adoptés "conformes" par les sénateurs ne seront pas débattus à nouveau par les députés.

"L'article 1 qui institue le principe de l'ouverture du mariage aux couples de même sexe a été adopté 'conforme' par les sénateurs, l'article 2 qui institue le droit à l'adoption également, donc l'Assemblée et le Sénat ont voté les grands principes de cette loi", estime Olivier Dussopt, député socialiste de l'Ardèche. "Les sénateurs ont modifié le texte à la marge, et, il n'est pas utile de recommencer un débat qu'on a déjà eu dans ce contexte de regain d'homophobie et de radicalisation", m'explique Olivier Dussopt. Sous couvert d'anonymat, un autre député me confie que cette accélération du calendrier permet également de "couper l'herbe sous le pied des opposants au texte et de ne pas les laisser s'organiser pour leur grand barnum de la Fête des mères", allusion à la manifestation prévue le 26 mai par le collectif de la "Manif pour tous".

"Hollande veut du sang, il en aura"

Sans surprise, les réactions des opposants au projet de loi sont virulentes, voire violentes. Le chef de file des députés UMP, Christian Jacob, estime que "le président de la République prend le risque d'une confrontation violente avec les Français". Philippe Gosselin, député UMP de la Manche, en pointe depuis des mois dans la lutte contre  le mariage pour tous, se demande carrément si "c'est la guerre civile qu'il [François Hollande] veut ?". Christine Boutin parle elle aussi de "guerre civile" sur son compte Twitter.

Quant à Frigide Barjot, la porte-parole du collectif de la "Manif pour tous", elle "n'a pas de mot". Très remontée et légèrement dépassée par ce changement de calendrier, elle m'explique au téléphone qu'il "y a un moment où trop, c'est trop. J'étais partisane de ne pas toucher à Hollande, mais là, on va y aller, on va appeler à sa démission et pointer tout ce qui ne va pas dans sa politique". Excédée, Frigide Barjot menace : "Le  président nous force à sortir du périmètre de la loi, ça va être violent !" Et elle ajoute  : "On est en dictature ! François Hollande a guillotiné le peuple !". Contactée par l'AFP quelques minutes plus tard, Frigide Barjot est "au bord des larmes" et elle s'emporte : "Hollande veut du sang, il en aura." 

"Il faut qu'ils retrouvent leur calme", réagit le député Olivier Dussopt. L'élu socialiste dénonce un "appel à la haine inacceptable". "Ça promet", s'exclame de son côté le président socialiste de la Commission des lois.  Serein, Jean-Jacques Urvoas estime que les "arguments n'ont pas bougé, les points de vue ont eu le temps de s'exprimer". Et il ajoute : "Tout a déjà été dit, est-ce qu'on n'a pas déjà eu l'impression que le Sénat était le remake de l'Assemblée nationale ?"