"Jusqu'ici tout va mal" : des anecdotes qui en disent long sur François Hollande

Journaliste politique au Journal du Dimanche, Cécile Amar suit François Hollande depuis dix ans. Dans Jusqu'ici tout va mal, qui sort mercredi 15 janvier, elle revient sur les couacs du début de quinquennat.

Elle tente surtout un portrait qui tombe à point nommé, entre les révélations de Closer sur la vie privée du chef de l'Etat et les courbes non inversées du chômage.

Extraits de son livre, des anecdotes et récits de ses proches mettent en lumière la personnalité du chef de l'Etat et sa manière d'exercer le pouvoir.

1 "Comment je sors sans qu'on me voie ?"
C'est l'ouverture du livre. A peine entré à l'Elysée, en mai 2012, François Hollande demande à ses collaborateurs : "Comment je sors sans qu'on me voie ?" Une obsession puisqu'avant son élection, en mars 2012, il avait déjà interrogé un de ses officiers de sécurité : "Je pourrai continuer à faire du scooter ?"
Car le scooter de l'ancien député de Corrèze, c'est bien plus qu'un moyen de locomotion : un objet-fétiche. Celui qui lui permet depuis trente ans "d'échapper à tout le monde".
Le policier douche ses espérances: s'il persiste à l'utiliser, le président aura une voiture devant lui, "une autre derrière et des motos sur les côtés". Ses collaborateurs, raconte encore l'auteure, "ont vendu son précieux deux-roues de peur qu'il ne s'enfuie". Pas sûr que la précaution ait été suffisante ...
2  Le président qui communique seul
 Autre figure qui court tout au long du livre, celle du décideur solitaire. "Il n'a confiance en personne. C'est son caractère, il n'est bien que seul".  Cécile Amar décrit un homme qui consulte beaucoup, mais tranche seul, dans un processus "itératif". Il avance, fait fuiter les idées, sans hésiter à revenir en arrière ou changer d'avis au gré des circonstances.
Quoi de plus caractéristique de cette démarche que son rapport aux médias ? Bousculant allègrement ses communicants, il répond en direct à certains journalistes et "les appelle quand il veut leur parler". "François Hollande, détaille-t-elle,  "reçoit la presse, seul, en tête-à-tête dans son bureau. Et quand il demande à relire des citations, c'est à lui et à lui seul qu'il faut envoyer la copie sur son mail perso, lui qui la corrige de son stylo plume, lui qui réécrit avec ses pattes de mouche". Notons au passage que François Hollande ne semble pas adepte du clavier.
3 "François n'a pas d'affect"
"Sans affect" : l'expression revient comme un leitmotiv.  "François n'a pas d'affect", confiait ainsi Valérie Trierweiler à Aurélie Filipetti, "un soir de déprime pendant la campagne électorale". En écho, le ministre des Finances Pierre Moscovici, par ailleurs fils de psychanalyste,  définit le chef de l'Etat en "homme qui ne montre jamais son affect".
Cécile Amar revient plusieurs fois sur cette "indifférence" apparente du chef de l'Etat, y compris vis-à-vis de proches. Après avoir quitté la rue de Solférino - il fut dix ans premier secrétaire du PS, de 1997 à 2008- il ne s'est guère occupé, dit-elle, de "recaser des amis politiques laissés au bord du chemin".
Indifférent, sans affect : autant de mots qui sonnent comme des reproches. Comme un gant, Cécile Amar les retourne en compliment, en citant François Mitterrand. A la fin de sa vie, le premier président socialiste de la Ve République, modèle tant admiré de François Hollande, avait déclaré à Jean-Pierre Elkabbach lors d'un long entretien télévisé : "La principale qualité d'un homme d'Etat, je voudrais dire que c'est la sincérité, mais c'est l'indifférence." "A cette aune-là", conclut la journaliste, "François l'indifférent est bien président de la République".
4  Un optimiste invétéré
Tentant de gérer avec habileté l'affaire Leonarda, François Hollande avait proposé à la collégienne, expulsée en octobre 2013 au Kosovo avec sa famille, de revenir, mais "seule". On s'en souvient, l'affaire avait tourné au fiasco, mécontentant tout le monde. A en croire l'ouvrage, il ne s'est pas laissé abattre pour autant.
"A ses amis qui essaient de le réconforter au téléphone, le président prédit : "Ca ira mieux". "Voilà, ajoute Cécile Amar, qui n'étonne pas son vieux pote, Julien Dray, qui définit ainsi François Hollande : "Il a le profil du gagnant du loto, il croit toujours qu'il va gagner la cagnotte".
-> "Jusqu'ici tout va mal", de Cécile Amar (Grasset, 18 euros, sortie le 15 janvier)