Festival de Cannes : cinq souvenirs de cinéma du président Gilles Jacob

"Je me souviens d'avoir piqué la poitrine de Sharon Stone en lui épinglant sa décoration" (Gilles Jacob)

Promis, juré, Gilles Jacob, 83 ans, abandonnera la présidence du Festival de Cannes en 2015. A regrets sans doute, même si ce fou de cinéma sait se consoler avec sa plume.

Dans La vie passera comme un rêve, il avait raconté  avec malice et élégance ses années d'enfant juif caché près de Nice, pendant la seconde guerre mondiale, son arrivée en 1977 comme délégué général du festival, l'éblouissante sélection 1979 (avec l'Apocalypse now de Coppola), la consécration du Festival sur la scène mondiale grâce à la fidélité des poids-lourds d'Hollywood.

Il revient sur sa passion pour le cinéma - et plus encore pour les actrices - dans Les Pas Perdus, livrés par Flammarion juste avant l'édition 2013 du Festival. A la façon de Georges Perec (dont le livre vient d'être réédité), il y décline ses "Je me souviens" les plus marquants.

Cinq  extraits illustrés - que l'auteur nous pardonne - par des vidéos dont la qualité n'égale pas celle des projections cannoises.

1 "Je me souviens de ...Silvana Mangano"

 "Je me souviens qu'il fallait moins de deux minutes à SIlvana Mangano pour qu'un homme tombe amoureux d'elle.
Pas seulement la Mangano de Riz amer, odalisque pulpeuse dont les appas généreux et les cuisses gantées de noir ne pouvaient qu'ensorceler Vittorio Gassman et tous les jeunes gens qui, comme moi, rôdaient dans leur adolescence." 

(Riz Amer de Giuseppe De Santis,1949)

2 "Je me souviens de ...Catherine Deneuve"

"Je me souviens de m'être demandé si Catherine Deneuve était plus belle dans Le Sauvage ou dans Liza - la seule question qui vaille en matière de cinéma"...
"Dans ces deux films, elle se révèle dans "le simple appareil d'une beauté arrachée au sommeil" : au naturel, ébouriffée, toute blondeur, elle enquiquine Montand et fait le chien pour Mastroïanni, dans des îles où chacun voudrait la garder pour lui seul".

(Sorti en 1975, Le Sauvage de Jean-Paul Rappeneau a été projeté en version restaurée à Cannes le 16 mai 2011)

3 "Je me souviens de... Pedro Almodovar"

"Je me souviens que Pedro Almodovar m'en a longtemps voulu de n'avoir pas sélectionné à Cannes Femmes au bord de la crise de nerfs. Je ne lui donne pas tort".

(Sorti en 1988, Femmes au bord de la crise de nerfs a été projeté au Festival de Berlin comme à la Mostra de Venise, mais pas à Cannes. Il a obtenu de multiples récompenses).

4 "Je me souviens de ... Barbara"

"Je me souviens que Barbara s'appelait Monique Andrée Serf. Dans Camille redouble, Yolande Moreau et Michel Vuillermoz chantent, de Barbara, Une petite cantate -Si, mi, la, ré, sol, do, fa- et nous sommes en larmes."

(Camille redouble a été présenté à la Quinzaine des réalisateurs, au Festival de Cannes 2012)

5 "Je me souviens de ... Plein soleil"

"Je me souviens que, dans Plein soleil, Tom Ripley s'exerce à imiter la signature de Philippe Greenleaf. L'idée, bien sûr, étant de vider son compte en banque après l'avoir assassiné.

J'ai fait le rapprochement lorsqu'un inconnu, qui venait tous les jours dans l'hôtel du Midi où je séjournais, s'est mis à signer ses additions de mon nom".

(Plein Soleil est un film de René Clément, sorti en 1960, avec Alain Delon, Maurice Ronet et Marie Laforêt comme interprètes principaux. L'oeuvre est présentée en version restaurée le 25 mai à Cannes).

-> Les pas perdus, Gilles Jacob, Flammarion (15 euros, 172 pages)

 

Publié par Anne Brigaudeau / Catégories : Actu