Congrès des Œnologues à Cognac (deuxième partie)

john gale

Nous avons vu dans mon dernier texte la notoriété et le rayonnement du Cognac sur les marchés mondiaux. Le Cognac est une eau-de-vie de vins issus d'un vignoble que je vais à présent présenter, puis expliquer comment est obtenue cette eau-de-vie à partir du vin.

Le vignoble

L'aire délimitée de l'appellation Cognac fait un peu plus de 80.000 hectares répartis principalement sur les départements de la Charente et de la Charente Maritime et débordant un peu sur ceux de la Dordogne et des Deux-Sèvres.

La production étant essentiellement destinée à la distillation, elle est donc constituée à plus de 95% de vins blancs. Ceux-ci sont issus de trois cépages, l'Ugni Blanc, la Folle Blanche et le Colombard. Depuis une soixantaine d'années l'Ugni Blanc a petit à petit pris le dessus pour devenir aujourd'hui largement majoritaire et ceci pour plusieurs raisons : il est très résistant à la pourriture grise, il a un fort rendement, il donne des vins à acidité élevée et taux d'alcool faible, ces deux derniers critères représentant ce qui est idéalement recherché dans le vin destiné à la distillation. En effet, l'idéal est une acidité totale supérieure à 7 grammes/litre et un taux d'alcool entre 8,5 et 10% vol.

L'appellation

Le décret de l'AOC Cognac date du 15 mai 1936. Depuis il a été modifié à plusieurs reprises et ce dès le 13 janvier 1938 qui a défini des crus à l'intérieur de l'appellation. Ces crus sont au nombre de six : la Grande Champagne, la Petite Champagne, les Borderies, les Fins Bois, les Bons Bois et les Bois Ordinaires.

Tous les vins destinés à l'appellation Cognac doivent être obligatoirement distillés au 31 mars, dernier délai, qui suit la récolte.

La distillation

Dès que la fermentation alcoolique du moût est terminée le vin doit être distillé. Pour obtenir une bonne eau-de-vie il faut que le vin soit sans défaut. En effet, lorsqu'on distille le vin, il est concentré de 7 à 10 fois selon son taux d'alcool d'origine. S'il y a un défaut dans le vin qui pourrait être acceptable, cela ne passerait pas dans l'eau-de-vie.

La distillation, selon la tradition d'origine imposée par le décret, se fait dans un alambic charentais dit « à repasse ». Il est composé d'une chaudière, surmontée d'un chapiteau en forme d'oignon, prolongé par un col de cygne se transformant en serpentin traversant un bassin réfrigérant appelé « pipe ». Le vin est porté à ébullition, les vapeurs composées de tous les éléments volatils (alcool, arômes, etc.) se dégagent et au contact du réfrigérant se condensent pour s'écouler sous forme liquide.

La distillation s'effectue en deux temps. Le premier distillat obtenu, appelé « brouillis », titrant environ 28 à 32 % vol. est ensuite remis en chaudière pour une seconde distillation appelée la « bonne chauffe » dont le taux d'alcool ne doit pas dépasser 72,4 % vol. Lors de cette deuxième distillation l'opérateur doit procéder à une « coupe » : les premiers liquides qui s'écoulent, très riches en alcool et appelés les « têtes », sont écartés, ils représentent 1 à 2% du volume. S'écoule ensuite le « cœur » qui donnera le Cognac. Puis, en fin d'opération, le distillateur élimine également les « secondes » estimées lorsque le distillat titre moins de 60% vol. Les « têtes » et les « secondes » seront redistillées ultérieurement, rajoutées soit à un vin, soit à un « brouillis ».

Le vieillissement

Le « cœur » de la distillation est mis en fûts de chêne de 270 à 450 litres. Pour obtenir l'AOC le séjour en fûts doit être au minimum de deux ans comptés à partir du 1er avril de l'année suivant la vendange. Le bois va apporter à l'eau-de-vie sa couleur caractéristique et participer à son développement aromatique. Le Cognac va également perdre progressivement sa force alcoolique mais aussi de son volume par évaporation. Celle-ci est appelée «  Part des Anges » et représente l'équivalent de 20 millions de bouteilles par an.

Le temps de vieillissement est variable selon les eaux-de-vies et les destinations de celles-ci et peut se faire pendant plusieurs décennies.

Assemblage et comptes d'âge

Comme en Champagne, les maisons de Cognac sont passées maîtres dans l'art de l 'assemblage. Celui-ci se fait à partir d'eaux-de-vies de différents âges et provenant de différents crus.

Contrairement au vin, l'alcool n'évolue plus lorsqu'il est sous verre soit en bonbonnes appelées « Dame-Jeanne » pour les très vieux Cognacs, soit en bouteille pour ceux prêts à être expédiés. Les mentions de vieillissement sont réglementées par le cahier des charges de l'appellation et sont attachées à un compte d'âge particulier. On distingue ainsi les « VS » (Very Special) ou anciens « Trois Étoiles » dont l'eau-de-vie la plus jeune doit avoir au moins 3 ans, puis les « VSOP » (Very Special Old Pale) dont l'eau-de-vie la plus jeune doit avoir au moins 5 ans, ou encore les « XO » ou Extra Old pour lesquels l'eau-de-vie la plus jeune a au moins 7 ans.

Il existe, enfin, un assemblage particulier appelé « Fine Champagne » qui doit obligatoirement être issu de l'assemblage de Cognacs des crus Grande Champagne et Petite Champagne avec un minimum de 50% de Grande Champagne. La maison Rémy Martin, une des plus importantes maisons de Cognac, n'élabore et ne commercialise que des Cognacs Fine Champagne.