Quand la radio prend le temps de raconter le métier d’instit’ (1) : pourquoi la maternelle


Le reportage radiophonique est très certainement le dernier endroit de l’audiovisuel qui prend le temps : de raconter des individus, des histoires, des itinéraires, de les rencontrer, pleinement, et de les écouter vraiment.

Il y a quelques temps dans l’excellente case « Sur les docks », France Culture nous donnait à écouter deux magnifiques documentaires.

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Le premier document, signé Katia Chapoutier et Nathalie Salles est intitulé « La maternelle, école de la vie ? ». L’auteur Katia Chapoutier se rend dans une école maternelle de banlieue parisienne, part à la rencontre des enseignants, pose son micro dans les classe et interroge : « Quel rôle joue la maternelle dans le développement de la capacité à penser ? ».

Au moment où les politiques tentent de faire passer dans l’opinion publique que l’école maternelle ne sert pas à grand-chose et qu’il ne faut pas commencer l’école trop tôt (avec pour objectif de la supprimer pour faire des économies et la remplacer par des garderies ?), il n’est pas inutile de rappeler quelques petites choses que l’école maternelle apporte à l’enfant… Ce que font opportunément les intervenants de ce reportage : enseignants, psychologue, pédagogue.

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S’émanciper. La première fonction de l’école maternelle, nous disent les enseignants, est d’émanciper l’enfant du regard parental, dans une séparation structurante. Il devient élève en devenant autonome et indépendant, en passant de l’amour des parents à la bienveillance des instits.

Apprendre à penser. Le langage est évidemment décisif : grâce à lui l’enfant apprend à être attentif, à penser, à entrer dans la durée, à différer ses réactions et donc à ne plus être dans l’impulsif. « Apprendre à penser, nous dit ici Philippe Meirieu, c’est apprendre à surseoir. Entre la pulsion et l’acte s’introduit la pensée. La pensée apprend précisément à ne pas être dans le passage à l’acte : l’enfant apprend à attendre, le temps que la pensée émerge et rencontre celle de l’autre ». L’école est un espace hors menace et sécurisé qui protège l’enfant des autres mais aussi de lui-même et de sa toute puissance.

Découvrir l’abstraction. L’école maternelle est également le lieu où l’enfant découvre l’abstraction. « Cela étonne toujours certains parents qui pensent qu’on vient en maternelle pour jouer ! s’amuse une instit. Pourtant un enfant bien préparé à la maternelle parce qu’il a manipulé des objets, construit des volumes sous forme de jeu, arrivera à l’école élémentaire avec des images mentales qui vont lui permettre de comprendre des concepts abstraits ».

Ecouter des histoires. Une simple histoire lue par l’enseignant travaille en réalité des choses profondes chez l’enfant : « C’est ce qui permet à l’enfant de comprendre que ce qu’il vit dans sa tête a été vécu par d’autres et ça le relie à d’autres. Quelque chose correspond à ce qui est en lui. La culture à l’école maternelle est essentielle car elle permet de relier ce que l’enfant a de plus intime avec ce qu’il y a de plus universel ».

Le bonheur de réussir. « L’école maternelle a une grande responsabilité, nous dit Meirieu : on y apprend le bonheur de réussir. C’est ce plaisir éprouvé à comprendre que l’enfant voudra de nouveau éprouver ». Il apprend parallèlement la contrainte, qui ne bride pas forcément : « Ce sont des contraintes fécondes, de belles contraintes qui permettent d’accéder à plus de liberté et d’expression de soi ».

L’école maternelle est donc « une société en miniature, une présentation du monde en plus petit ». Comment fonctionner dans ce monde ? interroge-t-elle au quotidien.

On est loin des couches à changer, non ?…

Prenez le temps d’écouter ce document, lui prend le temps de vous immerger dans cette petite école et de rendre compte, sereinement, de la réalité.

De toute façon, y a rien à la télé ce soir.

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Lundi, épisode 2 : « Instit à tâtons – Professeur des écoles, un métier en questions ».

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