Fabrice Burgaud rejoint les sages de la cour de cassation

Certains pensent que la page « Outreau » a rejoint les annales de la justice. C’est évidemment une erreur tant le traumatisme a été dévastateur. 7 ans après le premier procès rendu par la cour d’assises de Saint-Omer, ce séisme judiciaire provoque encore des secousses.

Les plaies vont assurément se rouvrir en septembre prochain avec la sortie du film « Présumé coupable » tiré de l’ouvrage d’Alain Marécaux. L’un des acquittés d’Outreau, huissier de justice, avait raconté sa descente aux enfers dans « Chronique d’une erreur judiciaire ». Son rôle est interprété par Philippe Torreton.

Il y a quelques jours, c’est l’une des victimes reconnues de ce dossier qui faisait paraitre un ouvrage. Cherif, fils des époux Delay condamnés dans cette affaire, réitérait ses accusations contre les acquittés, quitte à prendre quelques libertés avec les faits.

Mais avant de devenir du cinéma, l’affaire Outreau reste une triste réalité. Si certains des acquittés semblent, en apparence, avoir repris le dessus, d’autres n’ont pas quitté la rubrique judiciaire. Ainsi les époux Lavier comparaitront devant le tribunal correctionnel de Boulogne sur Mer le 7 juillet prochain. Un palais de justice qu’ils ont évidemment connu au début de la procédure quand à l’issue de leur garde à vue, ils ont été présentés au juge Fabrice Burgaud. A nouveau placés en garde à vue en mai dernier, ils doivent désormais répondre de « corruption de mineurs ». Des esprits malveillants considèreront que ces faits sont bien la preuve que le premier dossier n’était pas aussi vide qu’on a bien voulu le dire. Malgré deux décisions de justice, il circule encore dans la tête de certains un doute quant à l’innocence de ceux que la justice a dans un premier temps accusé. C’est ce que Maître Eric Dupond-Moretti appelle le « révisionnisme judiciaire ». Face à ce nouveau rendez vous de Frank et Sandrine Lavier avec les juges, d’autres, à commencer par leurs avocats, avanceront que ces faits sont la conséquence des épisodes précédents. « Doit-on condamner des personnes qui ont été broyées par la machine judiciaire ?» Beau thème de réflexion a proposé aux auditeurs de justice de l’ENM.

De tous les magistrats qui ont eu à connaître de cette procédure, seul le juge Burgaud a été pointé du doigt. Gérald Lesigne, à l’époque procureur de la république, a été simplement déplacé. Ce qui est le minimum. Traduit devant le Conseil Supérieur de la magistrature, l’ancien juge d’instruction a été réprimandé par ses pairs. La plus basse des sanctions. Une tape sur les doigts.

Après avoir quitté Boulogne, Burgaud a été nommé à Paris au parquet. Il y a longtemps été chargé de l’exécution des peines. Poste qu’il souhaitait quitté depuis de nombreux mois. C’est désormais chose faite. Il vient d’être nommé auditeur à la cour de cassation. Autrement dit, magistrat, il n’occupe qu’une fonction administrative dans le service de documentation et d’études. Pas question pour lui de statuer sur le droit ou d’influer sur des jurisprudences à venir.

Reste que celui dont le nom est à jamais lié à l’affaire judiciaire la plus retentissante et la moins glorieuse de notre système siège aujourd’hui dans la plus haute juridiction française.

Publié par Dominique Verdeilhan / Catégories : Ma chronique