Hormone de Croissance: l'avocat général ne veut pas d'une seconde relaxe

 
Bruno Sturlese, avocat général à la cour d’appel de Paris sait qu’il est autant écouté par les prévenus que par les parties civiles. Ainsi tout au long des 2 heures et demi de son réquisitoire, le magistrat va s’efforcer de se démarquer du jugement qui a été rendu en janvier 2009. Un jugement de relaxe qui ne veut pas voir une seconde fois prononcé par les juges d’appel. « La première instance a été un rendez-vous manqué avec la vérité » a dit déclaré en préambule.
 
Analyse juridique, scientifique et humaine de ce dossier qui avec le temps s’est vu réduit à la portion congrue. D’un coté, le nombre de décès a augmenté pour atteindre aujourd’hui 120. De l’autre, deux des prévenus sont morts à la fin de la procédure. L’un durant le délibéré des premiers juges. L’autre avant le procès en appel.
 
Dans ce second procès, trois prévenus, relaxés en première instance, ne sont poursuivis que sur le volet civil du dossier. En vue pour eux d’éventuels dommages et intérêts à verser aux parties civiles.
 
Deux prévenus sont rejugés au pénal. Fernand Dray, 88 ans, ex directeur du laboratoire de l’Institut Pasteur et Elisabeth Mugnier, 61 ans, une des responsables de la collecte des hypophyses.
 
Pour l’avocat général, le premier a « gravement manqué à l’esprit des bonnes pratiques ». « Vous n’êtes pas un exécutant mais un décideur » assène le magistrat à l’encontre du vieil homme qui prend des notes. Puis l’avocat général poursuit : «  Je soutiens qu’il connaissait le risque de contamination », ce que conteste énergiquement M° Henri Leclerc, son avocat à la sortie de l’audience. Pour son « manque de rigueur, de recul, de vigilance et d’humilité », le magistrat requiert 3 ans avec sursis, contre 4 ans avec sursis requis en première instance.
 
Contre la seconde, il réclame entre 6 mois et 12 mois avec sursis (un an au premier procès). « Elle s’est livrée à une course à l’hypophyse privilégiant le rendement quantitatif au détriment des protections sanitaires ».
 
Ce procès intervient 30 ans après les faits. Après une procédure longue, sans fin pour les deux parties, défense et victimes. « Avant d’être condamné, vous êtes déjà sanctionné par ce marathon judiciaire humiliant et stigmatisant » lance Bruno Sturlese à l’encontre de Fernand Dray. A la suspension d’audience, une mère d’un enfant mort à l’âge de 13 ans nous déclare qu’elle ne souhaite pas voir ses deux prévenus en prison. « Seulement qu’ils soient considérés comme coupables » nous dit-elle.
 
Pour le représentant de l’accusation, le jugement de condamnation doit avoir une autre valeur. « Un signal clair et dissuasif » à l’encontre de la communauté scientifique et médicale. Faisant allusion aux récents événements du médicament « Merdiator », l’avocat général insiste sur ses mots. « Les catastrophes sanitaires ne sont pas derrière nous ».
Publié par Dominique Verdeilhan / Catégories : Ma chronique