Jérôme Kerviel doit rendre des comptes

 

Clin d’œil peut être involontaire de la justice, la présidence du TGI de Paris a audiencé le procès de Jérôme Kerviel dans la salle des criées, là où se font parfois les adjudications. De la salle des criées à la salle des marchés, il n’y a qu’un pas. La salle est en demi-lune. Semblable à un amphithéâtre. Pour le prévenu Kerviel, il s’agit surement plutôt d’une fosse aux lions. Il est seul face à ses juges, ceux là même qui ont jugé le dossier Clearstream.

 

Il s’exprime avec maladresse, articulant à peine. Par trois fois, le Président Dominique Pauthe va montrer son agacement face aux comportements de Kerviel. D’abord ce dernier prend la parole alors que le magistrat est en train de faire son exposé préliminaire. Ensuite, il boit de l’eau à la bouteille pendant que le président s’adresse à lui. Enfin, il lui pose une question. »Ici, c’est moi qui pose les questions » le sermonnera le magistrat.

 

Jérôme Kerviel incapable de se raconter autrement que par le prisme de la finance. « J’ai passé ma vie à la banque » dit-il. De 7 heures du matin à 22 h avec un sandwich mangé sur place. Aucun repos ni les jours fériés, ni pendant les vacances. Ses seuls amis ou plus exactement ses connaissances sont des traders, ses collègues de travail. Le mot n’est pas employé par le prévenu mais on y pense : de l’abattage au service d’une banque. Kerviel le confie dans son livre. Leurs supérieurs hiérarchiques parlent des traders comme de « bonnes gagneuses »…. Bonjour la comparaison.

 

Une boulimie de travail consenti par l’employé. Il est devant son ordinateur comme un joueur reste scotché à son bandit manchot ou à sa table de jeu.

 

Kerviel seul dans la fosse aux lions. Sur les bancs en demi cercle, une cinquantaine de journalistes : des chroniqueurs judiciaires mais aussi des spécialistes de l’économie. Le fixent également du regard quelques privilégiés du public qui ont réussi à trouver une place dans la salle. Ils sont venir voir celui qui a fait sauter la banque, celui qui a fait une entrée dans le palais de justice au milieu d’une meute de cameramen et de photographes. Sous le crépitement des flashs, ce sont des « Jérôme, Jérôme » qui se sont fait entendre à l’image de ce qui se passe à Cannes sur les marches d’un autre palais.

 

Assis juste derrière lui ses deux avocats : M° Olivier Metzner et M° Nicolas Huc-Morel.

Noyés eux même dans une marée de robes noires, les conseils des parties civiles. Ceux de la Société Générale et ceux des petits porteurs dont on n’arrive pas à distinguer l’exacte motivation. Ainsi viennent-ils demander des comptes à JK ou régler leurs comptes avec la Banque ?

 

Car on l’a bien compris, en dehors des sanctions pénales que le tribunal est amène de délivrer, le procès se résume à une quête. Chacun veut rentrer dans ses frais.  Les petits porteurs, les actionnaires et la banque. Elle réclame l’équivalent de ce qu’elle a perdu, près de 5 milliards, à un homme qui ne sait pas enrichi personnellement et qui aujourd’hui gagne 2 300 euros par mois comme consultant en informatique dans une petite entreprise.

 

Publié par Dominique Verdeilhan / Catégories : Ma chronique