La cavale d'Yvan Colonna garde ses mystères

 

 

Plus d’un an après sa condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité pour l’assassinat du Préfet Claude Erignac, Yvan Colonna est réapparu dans un box. Celui qui avait quitté son second procès bien avant le verdict affichait ce matin devant la 16ème chambre correctionnelle de Paris un visage détendu, souriant. Le condamné a peut être un peu blanchi mais il est nettement moins amaigri et affaibli qu’il y a un an. Colonna comparait cette fois ci pour un délit : détention d’armes et de munitions dans la bergerie où il a été arrêté en juillet 2003

 

Alors qu’il portait encore des menottes, il a embrassé ses avocats, son frère et sa sœur  qui ont pu s’approcher du box. Il a également embrassé quelques uns des prévenus, jugés depuis ce matin pour l’avoir assisté dans sa cavale, ce qu’il avait appelé au début de l’instruction, «sa prise de recul ».

 

Si deux d’entre eux, Patricia Gattacceca et Frédéric Paoli, assument leur geste d’hospitalité, Marc Siméoni, un des fils d’Edmond, figure emblématique depuis 1975 du nationalisme corse, se défend d’avoir hébergé le fugitif dans son appartement de Bastia. L’accusation se base sur des expertises génétiques, des traces papillaires relevées sur les lieux en question et sur la carte bancaire que le prévenu aurait mis à la disposition du fuyard.

 

Sur les 4 ans de cavale de Colonna, la justice a bien été en mal de reconstituer le parcours de celui qui était alors l’assassin présumé du préfet. Deux courts séjours en 2002 chez Patricia Gattecceca, plusieurs passages de quelques semaines au domicile de Marc Siméoni en 2002 et 2003, pour finir par la bergerie d’Olmeto en juillet 2003, les juges d’instruction ont laissé beaucoup de pages blanches dans l’agenda du fugitif Colonna. Il n’existe aucune trace dans le dossier de ce que les médias avaient avancé à l’époque, à savoir un départ pour le Venezuela ou un séjour à Paris.

 

Ce matin, fidèle à sa philosophie, Colonna s’est refusé de combler les trous de l’accusation. Pas question pour lui de dénoncer ses soutiens. Il prend bien soin de répondre après les prévenus simplement pour confirmer leurs dires. Il affirme qu’il n’y a pas eu de réseau pour l’aider et que lui et ses proches ont uniquement frappé à des portes.

 

Ce matin, certains des avocats de la défense ont tenté de faire reporter le procès. Selon eux, on ne peut juger les complices présumés de la cavale de Colonna avant que la justice n’ai statué sur le dossier principal, l’assassinat du préfet. Colonna a été condamné à la peine maximale en mars 2009. Il s’est pourvu en cassation. La condamnation n’est donc pas définitive. La défense du berger de Cargèse espère un troisième procès à l’issue duquel elle souhaite qu’Yvan Colonna soit acquitté. Question des avocats : Peut-on juger et donc condamner les complices d’une cavale d’un homme qui peut être innocenté par la même justice.

 

La plupart des prévenus est poursuivi pour « recel de malfaiteur ». Tout est question de lecture de l’article 434-6. « Le fait de fournir à la personne auteur ou complice d’un crime…. ». Pour la défense, le texte parle d’une personne condamnée. Pour l’accusation, la jurisprudence a étendu le principe à un individu suspecté. « Ce qui compte, c’est la conscience du receleur » a précisé le substitut du procureur à l’audience.

 

Le tribunal a rejeté la requête. Le procès continue. Quant au pourvoi de Colonna, il ne sera pas examiné avant juillet prochain.

Publié par Dominique Verdeilhan / Catégories : Ma chronique