Le procès Viguier rebondit à la Chancellerie

 

Le procureur général de la cour d’appel de Toulouse, Patrice Davost,  est attendu jeudi à la Chancellerie. Le cabinet du ministre de la Justice veut « débriefer » le second procès Viguier.

 

Après le premier procès qui s’était tenu à Toulouse et qui s’est soldé par l’acquittement de Jacques Viguier, Patrice Davost avait interjeté appel. Rien à redire puisque l’avocat général Marc Gaubert avait requis à son encontre entre 15 et 20 ans de réclusion criminelle. On avait souligné déjà à l’époque le peu de portée que les interventions du magistrat de l’accusation avaient eu à l’audience. On avait souligné combien la différence d’approche du dossier entre le parquet général et certaines parties civiles avait du perturber les jurés. Là où le premier parlait de meurtre, les secondes avançaient la thèse des coups mortels.

 

Etant à l’origine de ce second procès, on attendait de l’accusation qu’elle fasse preuve de conviction et de pugnacité pour défendre son dossier vieux de 10 ans. Le parquet général de Toulouse pouvait changer de titulaire afin de faire entrer dans le procès un œil neuf. Désigner un autre membre de son parquet général de Toulouse ou confier cette tache au procureur de la république d’Albi. Il a fait un autre choix. Il a renouvelé sa confiance à Marc Gaubert, l’avocat général. Si l’on retiendra du procès d’Albi la grande maîtrise, la grande rigueur et la parfaite connaissance du dossier par le président Jacques Richiardi, nous devons constater qu’il marque l’effondrement de l’accusation.

 

Rares sont les procès où le président des assises recadre et rappelle à l’ordre son collègue du parquet. Rares sont les procès où les jurés jettent des regards stupéfaits en direction du ministère public. Rares sont les procès où d’une manière unanime et sans concertation, les journalistes soulignent à l’encre rouge les défaillances d’un magistrat.

 

Nous même, nous avons souligné combien le réquisitoire était déstabilisant, déroutant, confus, à la limite de l’illisible. L’avocat général a requis la même peine, ouvert la porte aux coups mortels tout en disant qu’il n’y croyait pas et laissant les jurés définir alors le quantum de la peine. Bref une image complètement brouillée d’une accusation en perdition. A la veille du verdict, le représentant de l’accusation était devenu le pire allié de la partie civile et le meilleur soutien de la défense. M° Szpiner qui pleure et M° Dupond-Moretti qui sourit.

 

On connait la suite, les jurés d’Albi ont rejoint ceux de Toulouse en rendant sa liberté à l’accusé et en condamnant une enquête de police aléatoire et une instruction judiciaire incomplète. Le dossier Viguier est donc une faillite collective de la phase d’instruction. Pas plus les magistrats du siège que ceux du parquet ne sortent grandis de 10 ans de procédure. Pas très réconfortant à la veille d’une réforme de procédure pénale qui veut écarter les premiers au bénéfice des seconds.

 

Au lendemain de ce second acquittement, le parquet général s’est empressé de dire qu’il renonçait à se pourvoir en cassation. Comme pour mieux refermer à jamais ce dossier et tenter de tourner la page d’un livre noir. Faut-il rappeler que les pourvois en cassation sur des arrêts d’acquittement sont sans conséquence pour l’accusé ? Un acquittement en appel est définitif. Le pourvoi ne peut être fait que dans l’intérêt de la loi. Autrement dit dans un souci jurisprudentiel.

 

Jeudi à la Chancellerie, il ne sera pas question de jurisprudence mais de bonne administration de la justice.

Publié par Dominique Verdeilhan / Catégories : Ma chronique