Assises: le professeur Jacques Viguier redouble

Il y aura donc un second procès Jacques Viguier. Après un long week-end de réflexion, le parquet général de la cour d'appel de Toulouse a interjeté appel de l'acquittement du professeur de droit public. Ce n'est pas une surprise. Il y a une certaine logique de la part de l'accusation. On ne peut pas requérir entre 15 et 20 ans de réclusion criminelle et abandonner le combat après un acquittement. Les rares parties civiles qui sont persuadées de la culpabilité de celui qui redevient maintenant un accusé, n'auraient pas compris que le parquet général dépose ainsi les rames au milieu du gué.

A la sortie de l'audience jeudi après midi, M° Henri Leclerc, l'un des avocats de la défense, espérait que l'accusation en resterait là. "Le contraire serait faire preuve d'acharnement tant le dossier est vide" déclarait l'avocat parisien. Jacques Viguier avait le même espoir tout en sachant qu'il avait au dessus de lui cette épée de Damoclès: la possibilité d'un nouveau face à face avec les siens, avec ceux de sa femme. Un nouveau face à face surtout avec de nouveaux jurés cette fois ci au nombre de 15.

C'est, sauf coup de théâtre, le même dossier qui se présentera en seconde instance à la fin de l'année dans une autre cour d'assises. Des affaires criminelles récentes ont démontré que le second verdict peut être d'une toute autre nature. Souvenons nous de Maurice Agnelet, acquitté à Nice et condamné à 20 ans de réclusion criminelle à Aix pour l'assassinat d'Agnès Le Roux. Dans cette affaire aussi, il s'agissait d'un crime sans cadavre. En l'espace d'un an, deux jurys populaires ont écrit une vérité judiciaire différente.

Autre similitude avec l'affaire Agnès Le Roux, le dossier Viguier arrive devant les assises après avoir traversé un long labyrinthe judiciaire, neuf ans après les faits. Comme Maurice Agnelet, le professeur toulousain a accompli très peu de détention provisoire: 9 mois.

Contrairement à Maurice Agnelet, Jacques Viguier a face à lui des parties civiles divisées. Sur le même banc, étaient installés ses enfants qui le pensent innocent et les proches de sa femme qui le croient coupable.

Quant aux jurés de la cour d'assises de Haute Garonne, la justice leur a demandé de faire le choix entre deux versions. L'accusation soutenait la thèse du meurtre, après avoir penché au moment des faits pour l'assassinat. Résultat, Viguier qui encourt 30 ans de réclusion criminelle pour meurtre a vu requérir contre lui une peine allant de 15 à 20 ans. Au poids en quelque sorte. Maitre Francis Szpiner, qui défend les intérêts des soeurs de la victime, a plaidé les coups mortels, autrement dit la thèse de la dispute conjugale qui tourne mal. Un crime qui ne lui fait plus encourir qu'une peine de 15 ans.

Une accusation à géométrie variable. Une partie civile divisée et qui n'est pas sur la même longueur d'ondes que l'avocat général. Cela ne facilitait pas la tache des jurés. Après 3 heures et demi de délibéré, ils ont balayé tout cela d'un revers de manche. Ils ont répondu non à toutes les questions. Non au meurtre. Non aux coups mortels.

Ce matin, Jacques Viguier a repris le chemin de l'Université où il enseigne le droit public. Le droit pénal représente une autre partie de sa vie....

Publié par Dominique Verdeilhan / Catégories : Ma chronique