Salade niçoise

Les débats politiques amènent parfois (souvent) leur lot de surprises (ou disons, de créativité) sur le plan juridique. M. Christian Estrosi nous en a encore donné exemple aujourd’hui dans le cadre d’un débat sur l’implantation d’une mosquée, autorisée sur la commune de Nice par le préfet des Alpes maritimes, alors que la municipalité avait envisagé à cet endroit la création d’une crèche.

La préfecture des Alpes-Maritimes a démenti jeudi la présence de deux individus fichés S dans un cortège officiel saoudien en août 2015, comme l'a affirmé sur RTL le maire LR de Nice Christian Estrosi. © BERTRAND LANGLOIS / AFP

Confronté à cette situation, M. Estrosi, en sa qualité de maire de la commune, a décidé de convoquer un conseil municipal extraordinaire pour « proposer des mesures fortes » afin de s’opposer à la décision préfectorale et, notamment, de porter plainte contre le gouvernement, s’agissant au surplus d’une mosquée « à tendance salafiste » selon les termes employés par l’édile.

Il semble que l’annonce de M. Estrosi excède largement l’étendue des possibilités qui lui sont en réalité offertes, pour ce qui est de « porter plainte contre le gouvernement ».

En effet, d’une part, l’article 121-2 du code pénal précise que « Les personnes morales, à l'exclusion de l'Etat, sont responsables pénalement ». Dans ces conditions, toute plainte déposée contre le gouvernement (donc contre l’Etat) serait inévitablement vouée à l’échec.

Par surcroît, le dépôt d’une plainte suppose l’existence d’une infraction. J’ai beau chercher dans la législation pénale pourtant extrêmement importante (je ne crois pas avoir fini de pester contre la tendance actuelle à vouloir encadrer l’intégralité des comportements humains par des dispositions pénales), il n’existe aucun crime, délit ou même contravention susceptible d’être imputée au gouvernement, au préfet ou à quiconque, pour avoir délivré cette autorisation de construction d’une mosquée, fût-elle jugée salafiste.

La seule voie juridique ouverte à la municipalité pour s’opposer à l’ouverture projetée de ce lieu de culte consiste à saisir le tribunal administratif en annulation de la décision préfectorale. Mais il est bien évident que l’annonce d’une telle action, pour être plus exacte juridiquement, serait certainement moins porteuse en termes de communication politique.