La gifle

Au rayon "activités des VIP" de la semaine qui vient de s'écouler, la presse nous apprend que Mme Valérie Trierweiler aurait giflé un client d'un café du XVe arrondissement de Paris.

L'ancienne première dame, Valérie Trierweiler, le 14 novembre 2014, à Paris.

Le client en question, M. Mohamed Rizki, ancien candidat UMP à des élections municipales, aurait demandé à l’ex première dame "comment allait François". Le malotru aurait alors été sommé de présenter des excuses, et devant son refus, l’auteur de « Merci pour ce moment » l’aurait giflé devant plusieurs personnes.

Mme Trierweiler a elle-même évoqué l'événement d'un sobre tweet : "Un seul mot #StopALaMuflerie".

L’histoire aurait certainement pu se terminer là, mais c’était compter sans la réaction du client giflé, suffisamment procédurier pour déposer plainte au commissariat pour des faits de violences volontaires, non sans préciser par voie de presse avoir été choqué, humilié, "violenté dans [sa] liberté d'expression" et victime d’une atteinte à son intégrité physique, morale et à sa dignité humaine (rien que ça).

Visiblement déterminé à ce qu’une audience pénale ait lieu, il a pris attache avec un conseil qui a d'ores et déjà fait part de son intention de demander à la justice que soit ordonnée une expertise psychiatrique de Mme Trierweiler, son comportement leur apparaissant relever d'une pathologie sur ce plan.

Sans vouloir préjuger de l'orientation que le parquet de Paris souhaitera donner à ces faits, on peut dès à présent considérer qu'il n'est interdit à personne de faire preuve de mesure concernant cette « affaire » (dont strictement personne, pas même peut-être le commissariat local, n'aurait entendu parler n'était la personnalité des deux protagonistes) et les suites judiciaires susceptibles d'y être apportées.

En effet, les faits pouvant être reprochés à Mme Trierweiler sont constitutifs de violences volontaires. Le code pénal lie la gravité de la répression appropriée aux conséquences de telles violences. Ainsi des violences ayant entraîné le décès de la victime sont-elles de nature criminelle, relevant à ce titre de la cour d’Assises. Les violences n’ayant entraîné aucune incapacité de travail constituent, à l'autre bout du spectre pénal, une contravention tombant dans le champ de compétence de la juridiction de proximité.

En l’occurrence, les conséquences de la gifle trierweilerienne sont vraisemblablement très réduites.

Soit M. Rizki n’a subi aucune incapacité totale de travail, et la peine maximale encourue par la mise en cause est une amende de 750 €, selon l'appréciation qu'aurait des faits la juridiction de proximité ; soit il a subi une incapacité totale de travail inférieure à 8 jours et la peine maximale encourue est également une amende contraventionnelle, d’un montant de 1500 € cette fois, pouvant être prononcée par le tribunal de police.

A moins d'imaginer que Mme Trierweiler n'administre des claques d'une puissance destructrice peu commune, une telle procédure n'aurait pas été examinée par un tribunal correctionnel. Il n’est d'ailleurs pas rare qu’une telle infraction fasse l’objet d’une alternative aux poursuites (rappel à la loi notamment), particulièrement lorsque son auteur est dépourvu d'antécédents judiciaires.

Quant à la demande d’expertise psychiatrique que le plaignant évoque vouloir solliciter, elle me paraît totalement illusoire.

On peut déjà rappeler que les experts psychiatres, qui sont peu nombreux et totalement débordés sur l'ensemble du territoire français, ont mieux à faire qu’examiner l’auteur d’une gifle pour diagnostiquer une éventuelle pathologie psychiatrique. Soulignons à cet égard que Mme Trierweiler ne s'est pas subitement précipitée sur un tiers pour le frapper sans crier gare, mais que son geste semble avoir répondu (de façon certes inexcusable) à une phrase dont l'intéressée expliquera probablement à qui de droit qu'elle était volontairement provocante envers elle, tandis que M. Rizki a déjà précisé qu'elle n'avait dans son esprit "rien d'insultant, ni de moqueur".

Par surcroît, si les tribunaux de police ou correctionnels commencent à désigner des experts pour chaque dossier de violences légères, les délais de procédures risquent de s’allonger considérablement, au détriment des justiciables.

Enfin, je n’imagine pas que la renommée particulière de Valérie Trierweiler lui réserve un traitement judiciaire différent de celui qu'on accorde aux autres justiciables, dans un sens ou dans l'autre.

Bref, il ne me semble pas utile de donner à cette gifle plus de retentissement udiciaire qu’elle n’en mérite, contrairement aux souhaits exprimés par M. Rizki.