FN et peine de mort : où en est-on ?

Affiche FN années 1980 (archives personnelles)

Ce 7 janvier 2016, Patrick Henry a obtenu une libération conditionnelle, suspendue pour quelques mois à un appel du parquet de Melun. Emprisonné pendant près de 35 ans, le meurtrier de Philippe Bertrand était sorti de prison en 2001 pour y retourner en 2003.

Le 9 octobre 1981, la peine de mort est abolie en France sur la proposition de Robert Badinter, alors Ministre de la Justice. Sur les 486 votants (480 suffrages sont exprimés), 363 voix se prononcent pour l'adoption de la loi et 117 contre. Le 30 septembre 1981, la loi est définitivement adoptée par les sénateurs. La disposition « Nul ne peut être condamné à mort » est inscrite dans la Constitution.

Le FN est le seul parti politique à demander le rétablissement de la peine de mort. Pratiquement depuis qu’il existe, le Front national se prononce pour. C’est même une de ses revendications phares qui, à partir des années 2000, évolue. Aujourd’hui, le FN propose l’organisation d’un référendum pour se prononcer sur une « alternative » : le rétablissement de la peine de mort ou la réclusion à perpétuité - sans aucune possibilité de remise de peine - par le biais d’un référendum.

Un marqueur historique du FN

Parmi les premières brochures imprimées par le FN : le Dossier de la peine de mort. Peu avant l’abolition de la peine de mort par le gouvernement Mitterrand, le parti d’extrême droite réaffirme ses convictions :

Peine de mort 1981

Entre 1986 et 1988, le FN - représenté à l’Assemblée nationale par une trentaine de députés FN-RN - dépose une soixantaine de propositions dont une sur le rétablissement de la peine de mort (30 mai 1986). Cette revendication reste souvent associée, aux temps du FN de Jean-Marie Le Pen, à une autre : celle de l’abolition de la loi Veil et « du droit à la vie de la famille et de l’enfant ». Schématiquement, le FN réclame « la vie pour l’être innocent, la peine de mort (…) pour les criminels ». Le combat contre l’immigration est inhérent à la revendication frontiste. Car, explique le chef de file du courant catholique traditionaliste Bernard Antony, comment peut-on invoquer le « drame de dénatalité pour dire la nécessité de faire venir en Europe dans les quarante ans qui viennent, plus de cinquante millions d’immigrés ? ». Et de poursuivre : « Avortement et immigration sont bien les deux forces de la politique de génocide français et européen que combat le FN. (…) S’il n’admet pas que des centaines de milliers de petits enfants périssent dans les avortoirs, le FN pense par contre qu’il convient de n’avoir aucune indulgence pour des êtres capables de crimes aussi atroces que ceux commis par l’ignoble Thierry Paulin., effroyable tortionnaire de plus de vingt vieilles dames . Pour sanctionner de tels actes, le rétablissement de la peine de mort s’impose comme base même du système judiciaire ».

À partir d’un livret élaboré par Marine Le Pen pour le second tour de la présidentielle de 2002, Jean-Marie Le Pen annonce un référendum annuel dans le cadre de son « programme de redressement national » : cinq référendums successifs sur les thèmes de l’immigration, les impôts, la peine de mort, le statut de la famille et la défense de la vie sont proposés. Le président du FN explique vouloir inscrire la « préférence nationale » dans la Constitution et, au terme de son quinquennat, le « caractère sacré de la vie humaine et le respect des équilibres naturels ».

À la question « êtes vous partisan du rétablissement de la peine de mort ? », Jean-Marie Le Pen répond alors : « Plus que jamais pour les crimes les plus graves. La peine de mort est la clef de voûte de tout système judiciaire. La rétablir permettrait de rompre symboliquement avec le laxisme moral et social qui a duré durant les quarante dernières années ».

En 2010, lors de sa campagne pour la présidence du FN, Marine Le Pen campe sur les fondamentaux du lepénisme : « préférence nationale, rétablissement de la peine de mort, inversion des flux migratoires, décrue fiscale, défense de la vie depuis la conception jusqu’à la mort naturelle, défense de l’indépendance et de la souveraineté française, refus des lois liberticides ». Quelques mois plus tard, en novembre 2011, sa position marque une évolution. Entre temps, Marine Le Pen est devenue présidente du FN. Aussi, dans le cadre de la campagne présidentielle de 2012, elle propose un référendum sur le rétablissement de la peine de mort, s'y déclarant favorable pour « ceux qui tuent nos enfants. (…) Il faut rompre avec des décennies de laxisme à l'égard de la délinquance » poursuit la présidente du FN avant de réclamer de « réduire le délai de traitement, notamment des crimes commis par les mineurs ». Elle précise peu après, qu’en cas d’élection à la présidence de la République, elle organiserait un référendum « pour demander aux Français de faire le choix entre la peine de mort et la réclusion criminelle à perpétuité réelle ». Et de rajouter : « Je pense que ceux qui tuent nos enfants doivent risquer leur peau ». Le Programme politique du FN (2012) prend acte noir sur blanc de la proposition mariniste : « rétablissement de la peine de mort ou instauration de la réclusion criminelle à perpétuité réelle ».

En mars dernier, quelques semaines après les attentats de janvier, Marine Le Pen confirme les positions inscrites dans le programme de son parti. L’avocate rajoute qu’un système pénal ne peut, selon elle, « pas tenir sans la peine capitale ». Peu après les attentats de novembre, Jean-Marie Le Pen se fait entendre sur ce sujet, en précisant qu’il faut « affirmer les principes fondamentaux de légitime défense et de préférence nationale, (…) rétablir pour les terroristes la peine de mort avec décapitation comme le fait Daech ».

La plupart du temps, le FN revient sur le rétablissement de la peine de mort dans un contexte spécifique, présentant une charge émotionnelle et suscitant une forte indignation. Souvent, la propagande du parti rajoute à son slogan « peine de mort pour les assassins » le mot « enfants » ; une instrumentalisation visant à convaincre l’électeur sur le plan idéologique mais aussi émotionnel.

 

FN 3. Peine de mort pour les assassins d'enfants

Marine Le Pen et son père veulent rétablir la peine de mort en France. Au sein du Front national, les voix divergent. Florian Philippot, tout comme Marion Maréchal-Le Pen et Gilbert Collard, se prononcent contre. Le débat n’est pas tranché. Ce qui explique « l’alternative » proposée par le référendum… en attendant une position d’ensemble pour 2017 ?