Des élections boudées par près de la moitié des électeurs

(photo Jeff Pachoud - AFP)

Près d'un électeur sur deux n'a pas déposé son bulletin dans l'urne ce dimanche. L'abstention est en baisse, affirment certains observateurs, par rapport aux dernières cantonales de 2011. Ils ont raison. Mais il faut lire et relire les résultats de ces élections départementales avec cette donnée fondamentale qui imprègne notre société depuis de nombreuses années : pour ce type d'élections, la moitié des électeurs Français s'est détournée de la politique et ne tient pas (ou plus) à participer à la vie électorale.

La droite remporte une soixantaine de départements, la gauche perd plus de la moitié de ses territoires et le FN gagne des cantons. 66 départements pour la droite, 34 pour la gauche et aucun pour le FN. Voici ce qu'on peut avancer à quelques heures des résultats... et entendre.

Car ses commentaires sont récurrents depuis quelques temps. Marine Le Pen parle de « score historique » (estimé à 40%), d'un parti qui est devenu une « grande force politique ». Les « résultats exceptionnels » des élections départementales, assure la Présidente du Front national, sont le « socle des grandes victoires de demain ». Ils représentent une « étape cruciale (…) sur le chemin du pouvoir ».

Certes, la députée européenne interprète sciemment certaines données pour faire illusion : les 40% avancés sont les résultats des candidats FN-RBM des cantons où le FN affichait sa présence ce 29 mars. Certes, Marine Le Pen utilise toujours le même registre politico-émotionnel lorsqu'elle dénonce les « magouilles électorales UMP et PS » et le mode de scrutin majoritaire.

Mais ces élections locales signifient indéniablement une nouvelle marche pour le FN : celle d'une implantation locale confirmée. Avec l'ensemble de ses élus, nouveaux et anciens, le FN maintient la feuille de route qu'il s'est fixé : de plus en plus de militants, de cadres et d'élus formés par le parti... autant de relais locaux qui vont apporter une parole frontiste formatée – et la banaliser - dans les divers territoires.

Ce matin, le Front national se réveille sans département. Mais il peut revendiquer un nombre d'élus et de cantons inédits dans son histoire. Certaines données parlent d'elles-mêmes : en nombre de voix, le FN réalise des percées importantes dans plusieurs départements dans le nord et le sud-est, notamment dans le Pas-de-Calais, le Gard et le Vaucluse. D'un conseiller général sortant, le FN passe à 62 élus (sur un total de plus de 4000) et va donc gérer 31 cantons. Enfin, en parvenant à décrocher plusieurs sièges dans ses villes, le FN se voit conforter dans sa politique municipale. Aujourd'hui, il écrit même son histoire en l'anticipant puisqu'il annonce déjà sa prochaine "victoire" aux régionales de décembre (qui se dérouleront avec un mode de scrutin différent) ; une nouvelle étape inclue dans son plan de conquête de pouvoir.

La présidente du Front national remplit donc assez rigoureusement son cahier des charges : résultats électoraux et nombre d'élus en hausse, à chaque nouvelles élections depuis 2012 ; des femmes et des hommes garants du maillage territorial.

Le FN espère jouer un rôle d'arbitre dans quelques jours pour l'élection des présidents des conseils régionaux... et avance la notion de bipolarisation politique "FN-RBM – UMPS". Nous n'en sommes pas à cette opposition duelle. Avec environ 20% des voix au second tour des départementales, la formation d'extrême droite participe à l'affrontement électoral face à ses deux rivaux : l'UMP et le PS.